C’est dans cet état d’esprit très chancelant que j’appelle Senouci qui n’attendait que ça ! Lui aussi avais hésité à m’appeler, de peur que mon agenda ne lui offre aucune chance…Il m’apprends que notre ami commun Hadj Mohamed Tahar voulait visiter la grotte de Nekmaria avec Ikbal, venu du lointain Pakistan…en passant par l’Andalousie…je retrouve le sourire et la joie qui l’anime…nous voilà sur la route du Dahra…le ciel qui a eut la très bonne idée de s’habiller en turquoise est resplendissant. Un léger vent d’Ouest, à peine perceptible pousse une houle d’un blanc écarlate vers les rivages ocres et vert pistache de Chaïbia…Après la foret de Chouachi que des blessures noires défigurent de temps à autre, nous abordons la descente vers Sidi Ali que nous contournons par le sud en direction de Naïmia…une bourgade bien fertile où coulent plusieurs sources, ce qui lui donne une fertilité étonnante à plus de 300 mètres d’altitude. Puis les ravines se font plus abruptes et plus profondes. Ici l’érosion est maitresse des lieux. Avec une pluviométrie généreuse et des sols marneux à l’extrême, seuls les rares affleurements rocheux résistent à la nature.
Ça donne ces sillons de dinosaures que seul le ruissellement de l’eau de pluie cisèle sans compter. A ma droite, assis sur la banquette arrière – et oui il m’arrive aussi de ne pas conduire- Ikbal avale ces paysages qui lui rappelle Peshawar, son pays natal. Ce qui me donne l’occasion, en lui montrant les écoles et les fermes éventrées durant la décennie rouge, de lui dire cette autre similitude du salafisme destructeur qui a endeuillé tant de familles. A quelques encablures de la grotte de Ghar El Frachih, je lui fais un bref rappel de la résistance des populations et tribus du Dahra durant l’invasion coloniale française. Je parle du traité de Tanger, qui fit suite à la débâcle marocaine de l’oued Isly et qui obligea l’Emir Abdelkader à mettre en sourdine le Djihad ; ce qui incité alors le jeune Bou Maza à soulever le Dahra…L’armée d’occupation qui croyait avoir définitivement maté la résistance populaire fera le choix des massacres généralisées, commettant pas moins de 4 enfumades sur les tribus du Dahra.