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Avant «Charlie» il y avait Sanhadri, Sebti, Liabès…

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Curieuse cette attitude de certains compatriotes, qui, avec une facilité déconcertante – sans doute appuyée à une amnésie traîtresse –, affichent sans recul un alignement coupable sur un slogan qui cache beaucoup de vérités. Vérités pas toujours bonnes à dire. C’est pourquoi il nous appartient de nous en remettre au jugement de l’Histoire. Il sera implacable !

Car pour être Charlie, il eut fallu d’abord que je sois Tahar Djaout.
Pour être Wolinski, il eut fallu que je sois Youcef Sebti.
Pour être Cabu, il eut fallu que je sois Saïd Mekbel.
Pour être Charb, il eut fallu que je sois Mohamed Abada.
Pour être Bernard Verlhac, connu sous le pseudo de Tignous, il eut fallu que je sois Belkhenchir.
Pour être Philippe Honoré, il eut fallu que je sois R. Zenati.
Pour être Michel Renaud, il eut fallu que je sois H.Sanhadri.
Pour être Elsa Cayat, il eut fallu que je sois Rachida Bengana.
Pour être Bernard Maris, il eut fallu que je sois Djillali Liabès.
Pour être Mustapha Ourrad, il eut fallu que je sois Laâdi Flici.

Bien sûr, leur mort me rend triste, bien sûr, leur mort me fait de la peine, bien sûr que leur mort est stupide et qu’elle est condamnable. Bien sûr que je compatis à la douleur de leurs familles, de leurs amis et de leurs proches. Mais lorsque je sais la haine de Charlie pour le prophète de l’islam et des musulmans, j’ai de la peine à comprendre que l’on s’attaque avec autant de désinvolture au symbole d’un milliard de musulmans. Lorsque dans les rues de Paris, je vois défiler aux premières loges le sioniste Netanyahou, l’égorgeur des enfants de Ghaza, j’ai de la compassion pour mes amis français et pour ce peuple de France dans toute sa multitude et sa diversité. S’il y avait quelqu’un qui n’avait pas sa place dans ce cortège, c’est bien cet assassin d’enfants et ce tueur de paix. Lorsque je lis les déclarations de Manuel Valls, Premier ministre de la France répétant inlassablement et avec entêtement, afin que ça rentre dans la tête du bon peuple gaulois, que la France sans les juifs n’est plus la France, j’éprouve un sentiment de gêne profond pour mes nombreux et fidèles amis français, qui sont à la fois catholiques, protestants, bouddhistes, musulmans, animistes, athées, agnostiques, communistes et pour la plupart gaulois… je me dis qu’il faille faire son deuil de cette France multicultuelle et multiculturelle. Et cela serait bien dommage qu’en ces instants d’une grande douleur et d’un formidable élan de sympathie dont nous fûmes nous Algériens privés, il faille prendre cette voie tortueuse qui mène à l’élection de 2017. Cabu, Wolinski et leurs compagnons d’infortune doivent se retourner dans leurs tombes.
Car s’il est vrai qu’ils ont été la cible de quelques nervis qui n’ont qu’un lien tenu et vicié avec l’islam, sans doute qu’ils ne seraient pas heureux que le combat de leur vie serve à Hollande pour remonter dans les sondages et à Valls afin qu’il dise, encore une fois et dans l’impunité, voire dans l’indécence, qu’il est aussi le Premier ministre d’Israël et, sans aucune contestation, son meilleur avocat. Ce sont ce genre d’amalgames qui font mal à l’Histoire, car au lieu de regarder la sanglante vérité en face, ces politicards avertis sèment le doute et désignent encore une fois un faux ennemi. Sans doute que ces enseignants de Seine-Saint-Denis ont-ils vu juste lorsqu’ils déclarent sans détour : «Nous avons vu mourir des hommes qui étaient des nôtres. Ceux qui les ont tués sont enfants de France. Alors, ouvrons les yeux sur la situation, pour comprendre comment on en arrive là, pour agir et construire une société laïque et cultivée, plus juste, plus libre, plus égale, plus fraternelle. Nous sommes Charlie peut-on porter au revers. Mais s’affirmer dans la solidarité avec les victimes ne nous exemptera pas de la responsabilité collective de ce meurtre. Nous sommes aussi les parents de trois assassins.» Signé : Catherine Robert, Isabelle Richer, Valérie Louys et Damien Boussard.

Oui, sans la moindre ombre d’un doute, l’émotion qui s’est emparée du peuple de France est une émotion juste, profonde, sincère et partagée. Car elle concerne l’humain et son devenir face aux délires de son faux frère. Celui qui, tapi à l’ombre de l’obscurantisme, guette l’autre, l’ennemi qui aurait pu être le frère, le cousin et le voisin et qui, pour d’obscures déraisons, devient une cible à abattre, un ennemi implacable, une proie facile, voire même un objet de désir. Désir de vengeance, désir de violence, désir de non-sens. Faire de Paris, de Perpignan ou des Cammazes, la capitale éphémère de la lutte contre la barbarie et du rejet de l’obscurantisme, pourquoi pas ! Mais le faire en omettant de rappeler que sur cette terre digne d’Algérie, il y a à peine 10 ou 15 ans, ce sont par charrettes entières que des milliers de Cabu, de Charb et Marnis ont été enfouis dans les villes et les djebels par le même terrorisme aveugle et sanguinaire. Terrorisme dont les prophètes de malheur étaient reçus avec égards à Bonn, à Londres, à Paris et à Washington. Et qui tous les soirs s’invitaient sur les plateaux les plus prestigieux des télévisions françaises, anglaises, allemandes ou américaines pour revendiquer des attentats qui dans la journée avaient fauché nos frères, nos sœurs, nos enfants, nos amis, nos chercheurs, notre élite. En ce temps-là, il n’y avait de place que pour ce discours de haine. Un discours qui sera vite relayé par Al-Jazeera, la chaîne qatarie qui n’a été créée que pour servir la haine de l’Algérie, la haine des Algériens et qui a même créé de toute pièce un certain Qaradaoui, ramené à gros frais depuis le delta puant du Nil. Et qui distillait fatwa après fatwa sa haine de l’Algérie et des Algériens. Il aura fallu les images du 1er novembre 1994, celles qu’une caméra chancelante parviendra à capter, pour que le monde occidental et ses relais en Orient adoptent une nouvelle attitude. La veille, le 31 octobre, à minuit, levée des couleurs sur l'esplanade de la mairie de Mostaganem. Aux quelques rares officiels ainsi qu'un détachement de l'ANP, s'était joint un groupe de jeunes scouts du faoudj de St-Jules, le quartier d'à côté. Accompagné du vétéran Ahmed Boualem, le groupe se composait de pas moins de cinq de ses enfants. Après la levée des couleurs et les salves des soldats de l'ANP, la cérémonie commémorative prenait fin. Elle sera suivie d'une autre cérémonie de levée des couleurs et dépôt d'une gerbe de fleurs, le lendemain à 8h. Les scouts étaient également invités à cette cérémonie matinale. Afin de ne pas trop se disperser, ils dormiront au local de St-Jules qu'un véhicule blindé surveillera durant toute la nuit. Réveillés en trombe par Ahmed Boualem qui leur avait ramené depuis sa maison un petit déjeuner fort copieux, les scouts étaient tout excités à l'idée de revenir sur l'esplanade de la mairie prendre part au cérémonial. Tout comme la veille, seuls quelques officiels étaient présents. La direction des moudjahidine avait pris soin d'inviter les anciens combattants afin qu'ils se joignent au cortège officiel et participer à l'enterrement de leurs compagnons tombés au champ d'honneur. Un bus avait été réquisitionné à cet effet. Très rapidement, l'idée d'y embarquer les fringants scouts de St-Jules fera son chemin. Après tout, cela leur ferait une superbe promenade, eux qui étaient sevrés de sorties champêtres depuis l'émergence des maquis islamistes. Ce jour-là, le cimetière était bondé de monde. Dans la précipitation, personne n'avait remarqué qu'un arbuste avait été planté à la hâte. Sous la terre fraîchement retournée, la bombe attendait froidement le moment propice pour faucher la foule.

Massacre en «live»
C'est à l'instant où les premières sépultures des martyrs de novembre 54 retrouvaient la terre pour laquelle ils avaient combattu qu'une énorme déflagration fera trembler le sol. Croyant à une salve d'honneur des soldats, Ahmed Boualem et ses compagnons furent pris de stupeur lorsque la poussière soulevée par l'engin commencera à retomber sur leur tête. Puis soudain, les cris de douleurs des jeunes scouts de Mostaganem et de Sidi Ali que les morceaux de ferraille projetés par le souffle avaient atteint de plein fouet. Sous l'œil hagard de la caméra de l'ENTV, les premiers corps déchiquetés et ensanglantés étaient évacués vers le petit hôpital. Mais très vite on se rendra compte de l'ampleur du massacre. Ils seront plus d'une trentaine à avoir été blessés dont quatre succomberont. Ces scènes d'horreur feront le tour de la planète. Leur impact fut tel que les nombreux partisans de l'abject «qui tue qui» finiront par reconnaître l'origine du mal, ses auteurs et ses commanditaires. Désormais, à Sidi Ali est un lieu où les symboles du combat libérateur d'hier, représentés par ces 15 sépultures de martyrs, se seront imprégnés du sang des jeunes scouts pour qui novembre n'est pas qu'une halte. Novembre à Sidi Ali, ce sont les cendres de Benabdelmalek Ramdane et de ses anonymes compagnons qui s'abreuvent un court instant, du sang et de la chair de ces enfants dont le plus âgé avait à peine 12 ans. Si les blessés, dont certains seront amputés à jamais, ont été éparpillés à travers des familles d'accueil de France, mais aussi d'Algérie, les 4 martyrs, Mehdi Boualem (9 ans), Mohamed Hachelaf (8 ans), Mohamed Chawki Ayachi (7 ans) et Abdallah Chouarfia (12 ans), du groupe de St-Jules, seront enterrés dans un minuscule carré au niveau du cimetière de Sidi Benhaoua. L'endroit qui était jadis pavoisé à l'occasion du 1er Novembre, donne l'image d'une désolation et d'un méprisable abandon. Depuis 10 ans, aucune autorité n'aura pris soin d'y venir déposer la moindre gerbe ni entretenir la flamme par un simple badigeonnage à la chaux. Juste pour éloigner les mauvais esprits qui seraient tentés de flouer autrement que par les larmes le message de ces enfants martyrs.

Une stèle fantôme
Face à la moquée de St-Jules, sur la minuscule placette, l'APC avait entamé la construction d'une stèle commémorative. Sans jamais la finir. Autant de mépris à la mémoire des ces frêles victimes d'une barbarie sanguinaire ne peut s'expliquer que par l'amnésie. Il y a longtemps que les symboles de Novembre n'ont plus droit aux égards des jeunes générations. Car ils ne sont que les témoins éternels de nos rudes batailles. Au cimetière de Sidi Benhaoua, c’est tout seul, que chaque premier novembre, Ahmed Boualem, dont toute la famille ne vit plus que dans les douloureux souvenirs, va se recueillir. Parfois, il est surpris par la présence de la veuve d'un policier qui vient arroser le frêle géranium. Seul, il n'est pas facile de porter toute la détresse du monde. Ce n'est qu'en arrachant avec détermination les mauvaises herbes qui envahissent le minuscule carré que Boualem parvient à contenir sa colère. Il ne cesse à chaque fois de ressasser devant les quelques témoins que les quatre martyrs de Sidi Ali avaient été enterrés dans leurs uniformes flambants neufs. Qu’ils mettaient pour la dernière fois. Et que la poussière des martyrs de novembre 1954 est venue couvrir d'un linceul encore frétillant.
Aziz Mouats
Université de Mostaganem
 
Commentaires
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Par Anonyme (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 23:44
Pr Aziz Mouats mon prof de l'immunologie au journalisme je ne vois pas le rapport:D , mais j'avoue que c'est un très bon rappel pour les gens qui ont un peut de cervelle dans la tête :)
Par Ce Moi . (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 23:40
LA ' JOURNALISTE ' CAROLINE FOUREST A LA TÉLÉVISION EN DIRECT RAPPORTE LE TÉMOIGNAGE DIRECT D'UNE FEMME SE TROUVANT NEZ A NEZ AVEC UN MEMBRE DU COMMANDO VENU TUER A CHARLIE HEBDO : UN DES DES DEUX TERRORISTE AVAIS DE GRAND YEUX BLEUX . EU PLUS , LE NUMÉRO 2 DE LA SRPJ FRANÇAISE CHARGÉ DE L'ENQUETTE SUR L'ATTAQUE DE CHARLIE HEBDO " C'EST SUICIDÉ " DANS SON BUREAU ! SÛREMENT UN FRANÇAIS PATRIOTE QUI ALLAIT DIVULGUER LA VÉRITÉ OU BIEN A REFUSÉ DE MODIFIER LE RAPPORT D'ENQUÊTE. . LA FORCE OCULTE AU SEIN DE L'APPAREIL DE L'ÉTAT FRANÇAIS FAIT DES RAVAGES . BIENTOT LA GUERRE AU SEIN DES SERVICES FRANÇAIS , PATRIOTES CONTRE VENDU AU SIONISME ET USA . À. SUIVRE ... L'ATTAQUE CONTRE CHARLIE HEBDO SEMBLE N'AVOIR RIEN D'ISLAMISTES , MAIS BIEN OCCIDENTALE . COUP DUR POUR LES SIONISTES...

Par Cheikh Hamdane (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 20:26
M. Mouats
Avez vous su la vraie identité du médecin principal auteur de cet acte?

Par Anonyme (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 19:16
Tres bon article, j etais une voisine de Mr Senhadri à Kouba Garidi et sa fille fréquentait la même classe que ma fille à l école primaire, il a été le premier à être assassiné dans sa cage d escalier devant sa propre fille qu il emmenait à l école.
Nous avons vécu des moments très difficile et certains exilés ont vu dans l assassinat de ces journalistes un remaque de ce qu ils ont vecu .
Même si on compatit à l elan sincère du peuple français, on ne peut pas accepter la presence de Netanyahu ,le vrai terroriste, dans une manifestation contre le terrorisme. 

Par Mohamed El Maadi (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 19:07
Au moins un qui pense à ces frères algériens quand toute la presse algérienne pleure leur collègue de Charlie hebdo .Bravo monsieur je sais qu'au pays certain ne se ferons pas rouler dans la farine et seront lucide à chaque fois que la soupe médiatique leur sera servie.
Merci Messieurs pour la pensée profonde de nos compatriote algeriens qui eux n’émeuve personne au pays car ils ont "le malheur" de ne pas s'appeler Charlie et puis tant mieux car les charlots du gouvernement on n'en a assez pour pleurez encore un siècle . Je suis Algérien et croyez moi cela me suffit comme héritage et j'en suis très fière et je n'ai pas honte de le réclamer, car je refuse d'être l'indigène ou "le nègre de maisons" qui pleure son maître alors que celui-ci le traite avec mépris et dédains.

Par Realisme (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 17:37
Très beau texte,qui ne néglige rien de la vérité,ni de la réalité présente,une sorte de mise a l'heure de la pendule régissant la mémoire collective Algerienne..et une occasion de nous remémorer notre solitude face aux trés nombreux crimes commis contre le peuple Algerien,et son elite intellectuelle,par le terrorisme barbare soutenu a l'epoque par ses victimes d'aujourd'hui..et qui comble de l'ironie et de la forfaiture,compte parmis les "amis" de coeur et de raison du pouvoir actuel...Qatar..arabie yahoudite..france..ect...Non je ne suis pas charlie....je suis Tahar djaout avec la famille qui avance...Merci pour ce rappel Mr Aziz Mouats
Par Anonyme (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 16:29
Beau texte ,merci de nous rappeler nos morts ,surtout les enfants de sidi ali ,les imagese transmises par la télé à l'époque me hantent toujours

Par Cheikh Hamdane (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 15:44
Hélas, Cet occident tue la personne et marche derrière son corbillard. Ce drame Parisien était commandité et exécuté par le Mossad. beaucoup ne peuvent pas comprendre la nouvelle stratégie sioniste synchronisée avec la CIA et quatre Services de renseignement occidentaux.
Si l'occident nous emmerde (hachakoum) avec nos morts martyrs, c'est que nos dirigeants et gouvernements ont montré leur faiblesse... Attention, des juifs d'Algérie en Algérie commencent à se remuer. Vous les connaissiez à travers leurs écrits et commentaires, ils se sont dévoilé eux même.. Ils portent des noms arabes, ils vivent parmi les Algériens, et très rares sont ceux qui connaissaient leur véritable confession et identité.
Les juifs ne se sont jamais entretués entre eux, au contraire, ils sont très solidaires. Ce n'est pas le cas des arabes infiltré par l'entité sioniste. Nos doyens de la S.M des années soixante dix peuvent contribuer et sortir de leur mutisme et éclairer l'opinion publique algérien qui la plus part ne croit pas à la thèse du Mossad, même des journaux Algériens soient que leurs patrons savent la vérité et ne dise pas! et c'est grave çà entre dans hypocrisie mensongère, soient qu'ils ne sont pas des professionnels et ne s’intéressaient qu'à la PUBLICITÉ! Autrement tous les indices qui confirmaient l'acte du Mossad sont présents à commencer par le sinistre Netenyahu qui l'or d'une réunion a menacé la France d’attentats!!! en plus les méthodes employés d'assassinats sont du Mossad surtout la balle qui a achevé le policier Ahmed Merabet, c'est le même tir que pratiquaient les tueurs du Mossad durant les années soixante dix et quatre vingt.
La pièce d'identité abandonnée dans la voiture Citroën dans un le véhicule Citroën, dans un lieu choisi au préalable de la densité du public, ressemble au passeport trouvé intacte du présumé pilote (Atta) qui est accusé par les américains d'avoir pénétré dans la première tour du centre commercial le 11 septembre. Alors que le pilote (s'il y avait un pilote) a été complétement carbonisé.
Encore ce jour du 11 aucune présence de juif n'a été signalée dans les deux tours et dans la zone elle même.
C'est Ahmed Colibaly qui est la pièce maitresse dans le drame, il a git directement contre l'antenne du Mossad à Paris, maquillée en magasin Cacher.....

Par Abou Stroff (non vérifié) | 12. janvier 2015 - 14:09
aucun commentaire à part celui de dire merci à A. Mouats de nous rappeler certains "hauts faits d'armes" dans lesquels le vermine islamiste, alliée objective et subjective du sionisme, est impliquée.


Dans le chaudron de Sidi Lakhdar

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Au quatrième jour du soulèvement de la population de Sidi Lakhdar, la manifestation qui se voulait pacifique a dégénéré en affrontement entre les manifestants et les forces de l’ordre. La matinée, j’étais occupé à donner 2 cours sur la cryoconservation. A 11 heures, lorsque je quitte mes étudiants, je reçois 2 appels, l’un du correspondant d’En Nahar et l’autre de celui d’El Khabar. Qui souhaitaient que je les accompagne- séparément !- à Sidi Lakhdar où des échauffourées ont éclatées entre la population et les forces de l’ordre. Déjà, la rumeur parle de 2 morts, un citoyen et un policier. Là l’affaire devient grave et malgré une prégnante fatigue, je décide de prendre le correspondant d’El Khabar et d’aller voir ce qui se passe. J’informe la rédaction d’El Watan…qui ne dit rien…
A 14h55 nous sommes à l’entrée du village. Nos premières barricades sont là à l’entrée. Séquences photos lorsqu’un citoyen nous interpelle…il voulait sans doute s’assurer de notre identité. Je lui réplique que nous savons ce que nous devons faire, lui me dit qu’il craint que nous soyons mal accueillis car les manifestants sont à bout de nerf et que ça risque de mal tourner pour nous. Moins de 100 m plus loin, un jeune prend déjà à partie mon collègue, je range mon appareil photo et j’attends la suite. Les nerfs sont à fleur de peau, ils ne veulent plus de journalistes, tous des menteurs qui ne montrent pas notre détresse et qui ne relayent pas nos demandes…tout y passe jusqu’à l’accusation de corruption quoi fuse sans ménagements. Ils accusent nommément notre collègue d’En Nahar de les avoir trompé…de ne pas avoir diffusé les images filmées l’avant-veille et d’avoir été soudoyé, rien que ça ! Puis un jeune au regard décidé, le visage complètement recouvert de suie, tient à faire une déclaration. J’actionne la manette, demande aux présents de le laisser parler et il entame un discours parfaitement rodé… deux leader veulent nous accompagner à l’épicentre de la manifestation…sur tout le trajet – 800 mètres-  les rues sont jonchées d’obstacles et de cailloux.

 Selon des témoignages concordants, bien avant le lever du jour, des éléments de la brigade antiémeutes seraient intervenus pour déloger les habitants qui campaient devant le portail de la daïra. Très vite, les bras de fer est engagé. Mais c’est vers le milieu de la matinée que les forces de l’ordre ont chargé les manifestants dont le nombre grandissait à vue d’œil. Aux tirs des grenades lacrymogènes, répondaient les coups de feu de carabine 12 mm. Des balles à blanc qui entraineront une certaine confusion chez les manifestants, dont certains craignaient un usage de balles réelles. Les douilles retrouvées sur place par nos soins infirment cette version. Toutefois, peu avant midi, alors que les affrontements atteignaient leur apogée, on signale une dizaine de blessés, dont trois graves. Des parents signalent l’éborgnage d’une jeune manifestant, tandis qu’un autre aurait été amputé de la jambe. Selon plusieurs témoins, il aurait été écrasé par un véhicule des forces de l’ordre. Alors que des milliers de manifestants de tous âges continuaient d’affluer vers le lieu des affrontements, les forces de l’ordre parviendront à interpeller 25 manifestants. 

Le siège de la daïra qui fait face au commissariat de police est très vite investi par les manifestants qui brulent deux véhicules de services et qui saccagent sans ménagement les locaux administratifs. Un autre groupe s’attaque alors au logement du chef de daïra qui a réussi à évacuer sa famille comme par miracle. Cette dernière était restée enfermée durant les trois premiers jours de l’émeute. Partout, on note des amoncellements de documents administratifs, de mobiliers et de matelas et autres coussins et couvertures. A l’intérieur, alors que nous montons les escaliers pour parvenir à l’appartement d’astreinte du chef de daïra, nous croisons des manifestants déambulant dans un désordre et emportant qui une couverture, qui une chaise capitonnée, qui un bibelot qu’un jeune manifestant brandis comme un trophée. Alors que de la fumée empeste l’atmosphère, qui devient très vite irrespirable, d’autres manifestants investissent les lieux, la plupart porte un bandeau qui cache leur visages.

Il voulait en faire un douar, nous en avons fait un désert !
 Nombreux sont ceux qui arborent des bouteilles de vinaigre, sensé amoindrir les effets des grenades lacrymogènes dont des centaines de douilles jonchent le sol. Sur la grande rue qui mène à la daïra, des manifestants décidés sont assis ostentatoirement à quelques mètres des brigades anti émeutes. D’autres ont installés en pleine rue les fauteuils de la salle d’attente, barrant ainsi la rue. La nuit qui s’annonce ne présage rien de bon. Car manifestement, le dialogue auquel n’ont cessé d’appeler les manifestants, dont les portes paroles clament haut et fort que leurs protesta était pacifique, s’éloigne chaque instant. Tous parlent d’une provocation de la part des forces de l’ordre. Tous maintiennent leur revendication principale qui est le  départ du chef de daïra et la constitution d’une commission d’enquête ministérielle. Sur le chemin du retour, nous croisons pas moins de 12 véhicules des forces anti émeutes ramenées depuis Sidi Bel Abbès afin de prêter main forte à celle déjà sur place. La nuit risque d’être très agitée dans cette coquette cité balnéaire, dont les rues sont jonchées de pavés et de pierres ramenées par tracteurs depuis la campagne voisine. A chaque anfractuosité, derrière chaque mur, des manifestants scrutent le moindre de mes gestes, mon collègue Madani d’El Khabar s’est noyé dans la foule. Avec mon guide, qui pour une fois ne s’appelle pas « Nathalie » je fais le tour de l’immense bâtisse de la daïra. Dans les couloirs, je croise des jeunes et des adultes emportant tout ce qui peut l’être. Ils m’accueillent souvent avec des cris de victoire et n’existent même plus à braver la caméra comme si le fait d’être en groupe leur offrait une garantie. Leur butin de guerre dont ils sont le plus fiers sont incontestablement les deux carcasses de voiture dont seul le méatl a résister à la furie des flammes. 

Sur les murs, des climatiseurs dégagent une fumée noire. Dans le salon du chef, plus d’une dizaine de jeunes se servent avec une réelle délectation. Tous parlent de victoire. L’épaisse fumée des lambris qui brulent me prend à la gorge. Mon guide n’a de cesse de répéter à ses compagnons de ne rien craindre et de me laisser tout filmer. Pourtant, dehors, face au commissariat qu’une double haie de policiers anti émeute protège, un homme, la quarantaine me demande de montrer mon badge. Moment d’une très forte tension, car je ne porte de badge de presse que durant les visites présidentielles. Je réplique que n’étant pas une autorité, il n’a pas à me demander le badge. Je suis une autorité me réplique –t-il avec assurance. Oui  mais tu n’as pas de drapeaux lui dis-je ! Si j’ai un drapeau et il me montre l’emblème encore accroché au mat de la daïra ! Je lui dis que nous avons le même drapeau mais que j’écris en Français et que lui ne lis que l’Arabe ! Il éclate de rire et me laisse partir. J’ai eu très chaud. Le mot de la fin : un homme d’un âge certains s’approche de moi, il veut parler et se lance dans un long réquisitoire contre le chef de daïra puis en guise de conclusion il dit ceci : « lui voulait en faire un douar…nous en avons fait un désert !


Des champigons sympa, ça existe!

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Champignons amicaux – Comment ils pourraient aider les producteurs d’orge à nourrir la planète sans produits chimiques
Source: EurekAlert.org (9 février 2015)
Auteur: s/o  
L’orge est la quatrième culture céréalière la plus importante au monde. Elle peut pousser dans des conditions environnementales relativement mauvaises. C’est une source vitale de nourriture et de revenu pour de nombreux agriculteurs à travers le monde. Elle est aussi sujette à de nombreuses maladies, avec les producteurs qui se servent d’un barrage constamment changeant, fait de cocktails de produits chimiques et de pesticides, pour garder une longueur d’avance. Or, des botanistes de Trinity College Dublin, en Irlande, ont découvert que des champignons naturels favorables aux plantes pourraient empêcher la propagation de maladies qui ravagent les cultures, voire contribuer à la survie des plantes dans des conditions environnementales difficiles. Les endophytes fongiques utilisées par l’équipe semblent avoir une relation symbiotique avec l’orge. « Ces liens symbiotiques sont donc une véritable question de vie ou de mort pour les plantes, ainsi que pour de nombreux agriculteurs qui dépendent de ces cultures », déclare Brian Murphy, l’auteur principal de l’article publié dans la revue BioControl. L’équipe cherche comment inoculer les cultures de façon préférentielle, étant donné que les chances d’une union entre l’orge et les champignons naturels sont faibles. Trevor Hodkinson, professeur agrégé de Botanique, ajoute : « Le défi majeur pour l’agriculture est d’accroître les rendements des cultures tout en progressant vers des systèmes agricoles plus durables. Ces endophytes fongiques racinaires naturels offrent un potentiel énorme en termes de réduction de la dépendance de l’agriculture à l’égard d’intrants chimiques nocifs pour l’environnement. Nous cherchons à renforcer la recherche dans ce domaine et à commercialiser la technologie »

Horreur contre paix intérieure

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Face à l’horreur, face aux massacres sans discernement, face à la folie islamiste intégriste soutenue, encouragée financée et téléguidée par des « pays amis » comme l’Arabie Saoudite et le Qatar, il y a naturellement la désolation, la tristesse et la compassion à l’égard du peuple français, meurtris dans sa chair…il y a aussi cette révolte qui sourde à l’encontre de ces interventions contradictoires sur des terrains de guerre dans laquelle la France s’est laissée entrainer, parfois par pur mercantilisme politique, par soucis de surenchère et souvent par suivisme…sinon, comment expliquer ces liens, ces embrassades, ces accolades, à l’ombre de contrats juteux et d’accointances hasardeuses avec ceux qui nourrissent et alimentent l’hydre islamiste ?
Combattre le terrorisme islamiste c’est attaquer ses origines, ses prolongements et ses soubassements…ses embranchements idéologiques et ses ramifications autant en France qu’en Afrique et au Moyen Orient. Comment ne pas se poser la question du choix de la France et du peuple français comme cible privilégiée ? Qu’a fait la France pour mériter ce statut sanglant et couteux ? Que peut et que doit faire la France pour se mettre à l’abri de ce bellicisme mortifère grandissant?
Par respect au deuil qui frappe des milliers de familles, de toutes confessions et de toutes couleurs, les couleurs du peuple de France, il n’est pas indiqué de faire le moindre procès…cependant, il y a des pistes que l’on ne peut évacuer et qui méritent toutes les attentions de la part des dirigeants actuels de la France. La première est celle de l’humilité, ça consiste à cesser d’afficher cette arrogance à l’égard d’un phénomène profond  qui traverse la société depuis au moins deux siècles, celui du rapport à l’Islam et aux Musulmans. Il y a aussi ce rééquilibrage vis-à-vis de la question Israélo Palestinienne, question qu’il faudra inéluctablement détacher du complexe de la déportation et de la Shoah qui plombent la société française depuis Vichy et ses lois stupides et scélérates.Enfin, quel qu'en soit les intérêts économiques immédiats, il n'est pas sain de continuer à commercer avec des dictatures dont les implications dans l'entretien de la nébuleuse islamiste radicale sont connus de tous...la paix et la sécurité des français, dont un grand nombre est à la fois notre ami, notre cousin et notre frère, n'a pas de prix...donc de grâce messieurs les décideurs, rejoignez vite le camp du bon sens, la paix intérieure est ce prix...

De Peshawar à Nekmaria

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 Après une semaine bien chargée et très mal récompensée…mais c’est le métier qui le veux…pourtant, je n’ai pas l’impression d’avoir démérité…mais c’est aussi ça la nature humaine, frasque et déconcertante…donc j’allais vers un longue matinée…à ne rien faire…puis j’appelle Senouci Ouddan qui ne s’y attendait pas le moins du monde…c’est la moindre des choses que de faire de belles surprises aux amis, surtout les plus rares et les plus chers parce que les plus fidèles…j’avais réellement besoin de ressourcement après quelques anicroches…auxquelles je me croyais bien naïvement indignes…que faire contre la nature humaine, contre les inimitiés, les arguties, les jalousies et la légèreté…comme je ne suis pas habitués aux louanges, je m’étais fais à l’idée que je pouvais prétendre non pas à une immunité mais au moins à un peu d’indulgence…en attendant un bon procès…rien de tout ça, en guise de cerise on a fait mon procès et prononcé un injuste verdict…le tout par contumace…vous pouvez me croire, même sous ma carapace de capricorne qui en a avalé des couleuvres, ça fait très mal d’être mal jugé et d’être condamné sans aucune forme de recours…
C’est dans cet état d’esprit très chancelant que j’appelle Senouci qui n’attendait que ça ! Lui aussi avais hésité à m’appeler, de peur que mon agenda ne lui offre aucune chance…Il m’apprends que notre ami commun Hadj Mohamed Tahar voulait visiter la grotte de Nekmaria avec Ikbal, venu du lointain Pakistan…en passant par l’Andalousie…je retrouve le sourire et la joie qui l’anime…nous voilà sur la route du Dahra…le ciel qui a eut la très bonne idée de s’habiller en turquoise est resplendissant. Un léger vent d’Ouest, à peine perceptible pousse une houle d’un blanc écarlate vers les rivages ocres et vert pistache de Chaïbia…Après la foret de Chouachi que des blessures noires défigurent de temps à autre, nous abordons la descente vers Sidi Ali que nous contournons par le sud en direction de Naïmia…une bourgade bien fertile où coulent plusieurs sources, ce qui lui donne une fertilité étonnante à plus de 300 mètres d’altitude. Puis les ravines se font plus abruptes et plus profondes. Ici l’érosion est maitresse des lieux. Avec une pluviométrie généreuse et des sols marneux à l’extrême, seuls les rares affleurements rocheux résistent à la nature.
Ça donne ces sillons de dinosaures que seul le ruissellement de l’eau de pluie cisèle sans compter. A ma droite, assis sur la banquette arrière – et oui il m’arrive aussi de ne pas conduire- Ikbal avale ces paysages qui lui rappelle Peshawar, son pays natal. Ce qui me donne l’occasion, en lui montrant les écoles et les fermes éventrées durant la décennie rouge, de lui dire cette autre similitude du salafisme destructeur qui a endeuillé tant de familles. A quelques encablures de la grotte de Ghar El Frachih, je lui fais un bref rappel de la résistance des populations et tribus du Dahra durant l’invasion coloniale française. Je parle du traité de Tanger, qui fit suite à la débâcle marocaine de l’oued Isly et qui obligea l’Emir Abdelkader à mettre en sourdine le Djihad ; ce qui incité alors le jeune Bou Maza à soulever le Dahra…L’armée d’occupation qui croyait avoir définitivement maté la résistance populaire fera le choix des massacres généralisées, commettant pas moins de 4 enfumades sur les tribus du Dahra.
Grande émotion à l’intérieur de la grotte où dorment de leur profond sommeil éternel, plus de 1500 Ouled Riah – en réalité, sur les 1500 enfumés, 600 ont été retirés de la grotte puis ensevelis dans une fosse commune, par des soldats du Makhzen. Hadj Tahar est le dernier à sortir, il a tenu à réciter la « Fatiha » en toute discrétion. Face à la caméra, il dira que « ce sont les morts qui nous enseignent notre histoire et nous continuons à apprendre d’eux »…retour à travers le sentier de Dadès qui rejoint la RN11 en haut de Oued Romane, non loin du cimetière de Ouled Baroudi. Après nous être arrêté pour une pause déjeuner à Sidi Lakhdar en compagnie de Hamoudi Mohamed et de Miloud Kadi, nous reprenons le chemin de Mostaganem…presque réconciliés avec nous même et avec notre Histoire…

L'Autre Ami Brésilien de Salima

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Vous êtes géniale Salima, oui GÉNIALE...depuis que je vous connais, vous m'avez ouvert une véritable boite de Pandore...j'étais en train de réécouter notre premier enregistrement...et je tombe sur ce nom "Arraes" que vous citez en compagnie de feu Ssi Belhadj, arrivant le 16 juin 1965...à Alger...tout juste 3 jours avant le "renversement révolutionnaire"...je vais sur la toile et je tape ce nom...je reçois une longue série d'article en Portuguais...que je fais traduire par Google...et un seul article en français, celui de Nacer Mehal...qui fait une longue et très belle oraison funèbre à Miguel Arraes...je reprend son article que je mets sur mon mur spécial intitulé "Portraits Patriotiques"...et m'empresse de l'ajouter à mon dossier sur vous et Ssi Belhadj...voilà 2 jours, je vais assister aux funérailles de Ikhlass, la fille de mon ami Mohamed Bahloul...et je retrouve, venu spécialement d'Alger, Nacer Mehal...notre valeureux journaliste de l'APS, qui fut longtemps chef du bureau de Washington, après celui de Dakar, amis de Senghor, d'Amilcar Cabral, de Sékou Touré, de Mandela, de Cheikh Anta Diop...une grosse mémoire de l'Algérie révolutionnaire...et je le remercie d'avoir éclairé ma lanterne tout en lui annonçant que j'avais publié son article...en gardant bien entendu le nom de son auteur...déontologie oblige...Nacer a été aussi ministre de Bouteflika...il connait bien les arcanes de la république algérienne...puisqu'il était l'un des chefs de file de la diplomatie parallèle...je vous envoie ce papier et vous demande de dire quelques mots sur cette fabuleuse affaire que vous etes la seule à connaitre dans ses moindres détails, vous pensez bien qu'elle figurera en bonne place dans l'ouvrage que je vous consacre, car elle est symptomatique de vos engagements vous et votre défunt Moudjahid et époux, feu Ssi Belhadj...celui à qui je dois tout...

Voici le document rédigé par Nacer Mehal, en hommage à cet opposant Brésilien qui a été sauvé des mains de ses tortionnaires par l'ambassadeur d'Algérie à Rio de Janeiro...
 
Miguel Arraes, opposant brésilien au régime dictatorial, vécut à Alger de 1965 à 1979. Il retourna dans son pays au bénéficie de l'amnistie et continua son combat à la tête du Parti socialiste brésilien. Il est mort au mois d'août 2005.
Dans les tourments qui furent ceux du Brésil, ceux aussi des années 1960-1970, où le romantisme révolutionnaire guidait les consciences du Tiers-Monde et les « damnés de la terre », selon Frantz Fanon, dans ce tumulte où la dignité tenait lieu de rang absolu, Miguel apportait sa touche, sa réflexion et sa profondeur d'analyse. Loin d'être un excité, il fournissait dans les discussions, ô combien multiples, la voie de la raison et le poids de l'expérience. Sa sensibilité aux problèmes du monde, aux affres du sous-développement, son combat pour les valeurs de la démocratie ont fait de lui dans « Alger des idées et du combat libérateur », cette « Mecque des révolutionnaires », selon Amilcar CabraI, l'homme dont on écoutait religieusement les conseils ou les avis avec cette voie rocailleuse et cette cigarette pendante qui faisait son atypisme dans le bruit des débats. Miguel avait aussi cette pudeur et cette humilité qui impressionnaient ses amis. Il ne s'est jamais départi de ces qualités-là qui faisaient de lui le militant soucieux que venaient visiter tous les leaders de la lutte anticolonialiste de passage à Alger, principalement ceux des ex-colonies portugaises.Mais Miguel au-delà de ce devoir militant n'avait de cesse que de travailler pour le retour du Brésil dans la normalité démocratique. Dans ses veines, dans l'exil difficile, même s'il fut amical et affectif, la passion du Brésil circulait chaque jour et chaque minute. Il se voulait à l'écoute de son peuple, anxieux parfois, mais déterminé toujours. Il diffusait la grandeur. Le recevant à Alger le 1er Novembre 1984 au 30e anniversaire de la révolution algérienne et où il était l'invité d'honneur, Miguel ne s'est pas départi de ses espérances et du combat pour un monde meilleur. Il adorait les échanges fructueux ; il discutait durant ce séjour et longuement avec maître Vergès, l'infatigable avocat des causes justes ; avec également le professeur Cheikh Anta Diop, opposant sénégalais à l'époque et mondialement connu dans l'anthropologie pour sa découverte du « Carbone 14 ». Tout tournait sur le monde de demain, sur les inégalités, sur les souffrances et sur la décolonisation. Avec ce credo que l'on ne peut détruire et qui s'inspirait de la fameuse phrase du « Che », du Guevara de la lutte anti-impérialiste : « On peut tout nous reprocher sauf de notre obligation d'être aux côtés des opprimés. » Brièvement conçu, cet hommage se veut modeste contribution au « devoir du souvenir » à l'égard de Miguel, l'homme dont le cœur était dessiné à l'image du tracé des frontières du Brésil, un homme qui fut soutenu dans ce dur combat par une femme d'exception, son angélique épouse qui mérite toute la reconnaissance de la terre pour son rôle, sa discrétion et son aura. Tous les deux ont laissé ici à Alger un panthéon d'estime, de reconnaissance et d'amitié. Gloire à toi, Miguel, les justes ne meurent jamais.
Nacer Mehal

Jean Amrouche raconte Camus

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 Mis à part le titre, cet article est écrit par Brahim Zeddour...que je remercie et félicite...il vaut largement le détour...surtout après les derniers renoncements de Sansal et de Kamel Daoud...pas surprenants pour le premier puisqu'il avait indiqué la direction dès l'enfermement de Yasser Arafat dans sa résidence blockhaus de la Mouqata3a -le 9 juillet 2002- puisqu'à l'époque, à l'initiative de Mohamed Bahloul, nous avions créé le "Comité El Qods" en solidarité avec le leader palestinien...et nous avions sollicité des signatures, dont celle de Boualem Sansal...qui nous fera poireauter pendant des jours...au prétexte qu'il voulait lire dans ses moindres recoins notre projet de déclaration...une déclaration qu'il ne signera JAMAIS...à lui, à Kamel et à quelques autres qui se reconnaitront sans peine, je dédie cette contribution de l'Ami Zeddour...oui elle vaut le détour...surtout en ces instants de lourdes incertitudes...

Par Brahim Zeddour
Les voleurs de feu
Faisant suite à une visite à Mazouna au lendemain de l’indépendance, Jacques Berque eut cette réflexion lourde de sens quant à la permanence linguistique et culturelle en Algérie : «On sait l’attachement des peuples arabes à leur ‘patrimoine’ ou turâth. On sait aussi l’ambiguïté qui mêle cet attachement au sentiment des ruptures et des renouveaux. Qui sait si, replacée dans son milieu vivant, la lecture d’un texte comme celui-là [Il s’agit de nawāzil Mazouna, un recueil de jurisprudences composé à la fin du XVè siècle par Yahia ben Moussa El-Maghili] – et la bibliothèque maghrébine en contient des centaines et des milliers – ne va pas nous aider à proposer de ce patrimoine, au-delà de ses valeurs documentaires évidemment chères à l’historien social, une définition plus stimulante : le patrimoine culturel, en définitive, n’est peut-être que le passé parlant au présent de son avenir…»
Ce qui nous amène à poser, dans toute sa gravité, la place de l’intellectuel dans la société algérienne. «Mais pourquoi la vérité engendre-t-elle la haine?». Cette réflexion du poète carthaginois d’expression latine Térence, exprime à elle seule l’âpre destin dans lequel est maintenu l’intellectuel algérien. C’est ce qui répond partiellement à la question de savoir comment en sommes-nous arrivés là.

Ibn Khaldoun, un intellectuel d’envergure mondiale

L’Algérie a eu des intellectuels d’envergure mondiale. Des travaux et des biographies de ces génies algériens, il ressort que leurs existences ont été plus passionnantes que leurs œuvres.
Le plus représentatif reste indiscutablement Ibn Khaldoun. Après une tumultueuse et riche carrière politique qui l’a mené à exercer de hautes fonctions dans les trois dynasties du Maghreb (Hafside de Tunis, Zianide de Tlemcen et Mérinide de Fès) et du royaume de Grenade, il décida de se retirer définitivement des affaires et se consacrer exclusivement à la science. Il fut frappé par ses contemporains qui ont mystérieusement désactivé les fonctions du progrès et se sont laissés glisser sur la pente qui mène de la décadence à la dépendance.
Pour rendre intelligible ce phénomène, Ibn Khaldoun a été amené à créer deux disciplines scientifiques : la philosophie de l’histoire et la sociologie, dont il explique l’objet : «Vue de l’intérieur, l’histoire a un autre sens. Elle consiste à méditer, à s’efforcer d’accéder à la vérité, à expliquer avec finesse les causes et les origines des faits, à connaître à fond le pourquoi et le comment des événements. L’histoire prend donc racine dans la philosophie, dont elle doit être comptée comme une de ses branches».
Mais tiraillé sans cesse par les dynasties maghrébines et comble de paradoxe, il choisit un lieu insolite pour rédiger sa monumentale Muqqadima : les grottes de Taghazout, citadelle des Ouled Arif, la noblesse des tribus hilaliennes des Ouled Souid. Ces bédouins guerriers ont joué un rôle dévastateur dans les guerres entre les dynasties post almohadiennes, ils prêtaient main forte à telle ou telle dynastie au gré de leurs intérêts, tantôt aux Mérinides, tantôt aux Zianides, tantôt aux Hafsides. Ils sont même allés pactiser avec les Espagnols d’Oran.
Las de toutes ces vicissitudes, Ibn Khaldoun décide de s’installer au Caire pour profiter d’un contexte à la mesure de son génie. Sa famille le rejoint et le bateau qu’elle a emprunté se fracasse sur les récifs au large d’Alexandrie. Ainsi, Ibn Khaldoun a dû passer le restant de sa vie avec les épreuves les plus douloureuses de l’existence humaine, l’exil et le deuil, amplifiées par une troisième, celle du mépris et de l’indifférence de ses concitoyens.
Avec la colonisation, le sort des intellectuels algériens s’est davantage aggravé. Ils se sont efforcés à constituer les stimulateurs de la mémoire et de la conscience contre les simulateurs-dissimulateurs parmi les intellectuels de service et les informateurs indigènes.
C’est à Jean El-Mouhoub Amrouche que revient le mérite d’avoir donné la plus exacte image de l’intellectuel algérien sous l’occupation coloniale, «un voleur de feu» qui «cherche un débouché sur la mer libre de la culture humaine. […] Faire de la culture française la justification de la colonisation elle-même, c’est une imposture et une indignité. On sait avec quelle précautionneuse parcimonie la culture française a été dispensée, et quels obstacles les maîtres coloniaux ont dressé devant elle».
Jean Amrouche considère que les intellectuels algériens ont pour vocation d’être «d’éternels méditants, d’explorateurs du passé et d’interrogateurs de l’avenir» et ne peuvent «être à la fois les serviteurs de l’esprit et des maitres de l’heure». Sentant déjà la méfiance du pouvoir algérien à l’égard des intellectuels, il conclut : «Notre place, pour notre amère satisfaction, est toujours un peu à l’écart».

Un parcours atypique

Le parcours de Amrouche est atypique et exemplaire. Il eut un temps pour tout, un temps où «la France [était] l’esprit de [son] âme» et un temps où «l’Algérie [est devenue] l’âme de [son] esprit» ; un temps de la gloire littéraire et un temps de l’engagement dans le combat libérateur. Dès qu’il a entendu le cri de la patrie, il a compris le message et a répondu à l’appel.
Il se heurta à l’establishment, incarné par Albert Camus. D’abord au lendemain des massacres de mai 1945, où il pose clairement la question «Les Algériens veulent-ils ou ne veulent-ils pas rester français?» dans un article que le journal Combat (dirigé par Camus) refusa de publier. Un deuxième et décisif heurt eut lieu après le déclenchement de la guerre de Libération. Il livre le fond de sa pensée dans une lettre à Jules Roy, le 6 août 1955 : «J’ai lu deux articles sur l’Algérie qu’il [Camus] a donnés à L’Express. Il y a de justes remarques. Mais quant aux solutions qu’il préconise, je n’y crois pas. Le mal est beaucoup plus profond à mon avis. Il n’y a pas d’accord possible entre autochtones et Français d’Algérie. Il serait très long de l’exposer ici, un volume y suffirait à peine. En un mot, je ne crois plus à l’Algérie française. Les hommes de mon espèce sont des monstres, des erreurs de l’histoire. Il y aura un peuple algérien parlant arabe, alimentant sa pensée, ses songes, aux sources de l’Islam, ou il n’y aura rien».
C’est alors qu’il retrouve Ferhat Abbas, qu’il avait rencontré en mars 1946 et organisa, pour le compte du GPRA, les premiers contacts avec les autorités françaises qui devaient aboutir laborieusement aux négociations d’Evian.
Jean Amrouche conteste les thèses de Germaine Tillion développées dans son livre «L’Algérie en 1957» où elle écarte totalement l’idée d’une culpabilité française dans le drame algérien, allant jusqu’à expliquer doctement que sans les colons, la misère des Algériens aurait été encore pire. Elle aggrave son cas en concluant que l’indépendance mènerait l’Algérie à la misère. Révolté par cette inconséquence et ces errements, il commence par rappeler : «Tout se passe comme si elle avait voulu démontrer que l’indépendance doit être refusée à l’Algérie, non point seulement parce que les Français d’Algérie s’y opposent, mais dans l’intérêt des Arabes et des Berbères qu’elles précipiterait dans une misère sans nom et sans remède».
Il n’hésite pas à dénoncer le paternalisme français et son langage duplexe : «Pourquoi n’est-elle pas qualifiée pour parler au nom des Algériens? Parce qu’elle ne parvient pas à sortir de sa perspective psychologique qui est celle d’une Française patriote et qui, à l’occasion de cette guerre sacrée où non seulement les intérêts et le prestige, mais l’âme et l’honneur de sa patrie sont compromis, demeure soucieuse de mettre hors d’atteinte le visage de sa patrie».
Avec sa pensée et son action, Jean Amrouche a su porter loin et fort la voix de l’Algérie combattante. Il a réussi à exprimer en langage universel la justesse de ce combat en tant que protestation de la conscience collective du peuple algérien contre l’injustice.
L’écrivain français François Mauriac dira de lui : «Il aura été une victime rejetée par tous». Amrouche fut rejeté par les Français et ignoré des Français, pour son engagement pour l’indépendance de l’Algérie. En 1959, le Premier ministre Michel Debré mit fin à ses fonctions exercées à la radio française depuis 1948 comme responsable d’une émission littéraire. L’aile radicale de la francophonie algérienne, toute honte bue, n’a pas hésité à se rallier à cette position, marquant sa préférence à Albert Camus qu’elle célèbre régulièrement comme grand écrivain mais aussi, comble du ridicule, comme écrivain algérien. Dans sa logique de prétendre à un certificat de bonne conduite à l’égard de l’ancienne puissance coloniale, ce courant feint d’ignorer la mise au point du docteur Ahmed Taleb el Ibrahimi : «Camus a été infidèle aux humiliés, Camus a manqué de courage et de lucidité à l’heure des choix décisifs. Les Algériens étaient en droit d’espérer mieux d’un prix Nobel. Le titre de ‘Camus l’Algérien’, Camus ne l’a pas mérité. Il restera donc pour nous un grand écrivain ou plutôt un grand styliste mais un étranger».

Un ordre spirituel, culturel, esthétique, social

Auparavant, Mohamed Bencheneb accomplît une œuvre colossale. Il fut frappé par l’entreprise de sape du colonialisme qui visait une modification des données démographiques, sociologiques et culturelles de l’Algérie. Il remarqua avec inquiétude que le visible cessait progressivement de porter l’invisible. C’est alors qu’il voua sa vie à la prospection de cet invisible, avec l’appui d’un savoir académique et encyclopédique. Il le restitua dans ses œuvres en faisant parler la langue parlée. Il nous fait découvrir tout ce que le génie algérien a exprimé dans ses traditions écrites et orales, et tout ce que le colonialisme n’a pas réussi à détruire : un ordre spirituel, culturel, esthétique, social. Tout un savoir-être et un savoir-faire.
Mohamed Bencheneb réussit à faire rentrer la culture algérienne dans cette université ultra française d’Alger. Ses travaux ont beaucoup contribué à endiguer les errements de l’anthropologie coloniale qui a été orientée au service de la conquête militaire de l’Algérie.
Mais c’est au quotidien que Mohamed Bencheneb a le plus marqué sa société et son temps. Au-delà de son génie et de son académisme, il n’a cessé à aucun moment de mettre en valeur les liens d’appartenance et les liens d’attachement que les Algériens devraient en toute conscience entretenir à l’égard de leur identité et de leur culture. C’est par ces liens entre un individu et l’essence à laquelle il appartient, et uniquement par ces liens, qu’on pourra prétendre à un rayonnement de  sa culture, à s’émanciper et à s’affranchir.
Après avoir tout donné, Mohamed Bencheneb meurt d’épuisement à l’âge de soixante ans le 5 février 1929, à l’image de l’abeille. Et il avait encore à donner. Goethe aurait pu lancer sa fameuse formule : «Si mon âme et mon esprit ont tant à donner et que mon corps refuse, alors la nature a le devoir de me donner un autre corps!».
A l’occasion du quarantième jour de son décès, une grande cérémonie d’hommage fut organisée au cimetière de Sidi Abderrahmane où il a été enterré. Beaucoup d’intellectuels algériens étaient présents pour évoquer non seulement l’œuvre prodigieuse de Mohamed Bencheneb, mais aussi son honnêteté intellectuelle et sa rigueur morale.
Dans une émouvante allocution, digne de figurer parmi les merveilles de la littérature mondiale, Cheikh Bachir el Ibrahimi ne trouve pas les mots pour se consoler ni pour consoler les autres sur la perte de ce génie et sur le vide insondable qu’il laisse derrière lui. Il ne manque pas de mettre en garde les Algériens contre la tentation de l’oubli de l’œuvre de Bencheneb. Car déjà en son temps, il n’a pas été convenablement connu et reconnu comme il l’a été ailleurs en Orient et en Occident. Le vénérable Cheikh explique qu’il n’est jamais trop tard de faire son mea culpa,  et si on reconnait la défaillance dont on s’est rendu coupable en ayant condamné à l’oubli l’œuvre de Mohamed Bencheneb, que les larmes versées soient celles de la repentance et de la réparation. Ce cri d’alarme ne fut malheureusement jamais écouté.
Il serait hautement souhaitable d’envisager de décerner à Mohamed Bencheneb à titre posthume la distinction de l’Unesco de «Trésor humain vivant». Il a été un précurseur dans la réhabilitation du patrimoine immatériel et dans l’action stratégique de transmission du savoir ancestral.

Des considérations hautement stratégiques

Malek Bennabi, d’abord en tant que penseur, reprit l’œuvre d’Ibn Khaldoun. Il continua l’examen pathologique et élabora un modèle architectonique de dynamique sociale en rapport avec la nouvelle perspective historique où la société algérienne, à l’instar de son macrocosme afro-asiatique, s’est remise en route de la dépendance à la renaissance. Cet effort de globalisation n’a pas seulement une utilité analytique, il relève de considérations hautement stratégiques. En effet, à l’heure de la globalisation et des groupements régionaux, seul un mouvement d’ensemble peut avoir du sens et de l’effet.
Ainsi apparait pour Malek Bennabi l’issue de sortie de la société khaldounienne pour retrouver le sens de son histoire : élargir le champ de vision des perspectives de développement. Ce qu’il désigne par les «grands phénomènes de transfert des civilisations à l’échelle de la planète : il s’agit du déplacement du centre de gravité islamique de la Méditerranée à l’Asie». Et de conclure : «Ce passage à une phase asiatique implique pour lui [le musulman] des conséquences psychologiques, culturelles, morales, sociales et politiques qui commanderont son devenir et son avenir, et tout d’abord dans la formation de la volonté collective».


Un nouvel ordre mondial

Les évènements lui donnent raison. A Oufa, capitale du Bachkortostan, une république de la fédération de Russie, est né un nouvel ordre mondial conçu pour préserver les pays membres des crises et des conflits. Le 8 juillet 2015, Vladimir Poutine convoque un sommet historique qui réunit les BRICS, l’OCS et l’UEEA. Des plans d’action ont été définis pour la décennie à venir.
L’intégration de ces trois institutions offre un cadre sans égal de coopération économique, financière, militaire, sécuritaire, énergétique, scientifique et culturelle, dans une logique de prospérité et de développement partagés.
La déclaration d’Oufa pose le principe du respect des choix des pays membres en matière politique, économique et socioculturelle compte tenu de l’expérience historique et des particularités nationales de chaque Etat. De même que sera favorisé le dialogue interétatique pour promouvoir la paix et le progrès et respecter la souveraineté nationale et l’unité territoriale des Etats membres.
Seul le dialogue interculturel permet de trouver des solutions adaptées à la situation conflictuelle qui caractérise le monde d’aujourd’hui. Vladimir Yakunin, président du Forum public mondial «Dialogue des civilisations» insiste sur les vertus de ce dialogue en tant que valeur fondatrice du nouvel ordre. Il note en outre : «Dans un monde axé sur le consumérisme, les individus sont élevés avec le seul souci de satisfaire leurs besoins personnels. Cette attitude est au détriment des valeurs culturelles à la base des diverses civilisations. Si nous ne nous efforçons pas de contrôler cette tendance, nous risquons de perdre les principes et les standards moraux de la société».

Malgré le boycott des médias occidentaux, les observateurs n’ont pas manqué de relever plus qu’un évènement, un avènement. C’est là une réponse adaptée aux exigences des pays africains, latino-américains et eurasiatiques d’opérer des transformations du système des relations internationales. Oufa est située à 1.519 km de Moscou. Son choix n’est pas fortuit, il exprime le désir des organisateurs de ne pas laisser les pays musulmans se faire distancer par ce processus et les extirper du système de guerre totale qu’ils subissent depuis la fin de la seconde guerre mondiale. C’est comme pour rappeler que les pays musulmans ne peuvent être entrainés que par une renaissance asiatique et que le nouvel ordre se fera avec eux ou ne se fera pas. Ce constat est vérifiable par le modèle de Bennabi : «Le concept de vocation enveloppe ces deux aspects : les conditions d’un mouvement et sa finalisation par la collectivité humaine qui se trouve placée dans ces conditions».

C’est l’occasion de rappeler qu’en définitive, l’œuvre capitale de Malek Bennabi a été son étude sur L’Afro-asiatisme, où il était question du rapprochement de l’Afrique et de l’Asie. Ce rapprochement, esquissé lors de la conférence de Bandoeng, procède d’un paradigme qu’on pourrait désigner dans les circonstances présentes par «Ex Oriente lux», où seule la formulation est latine.

Les axes d’orientation d’une rénovation pédagogique

Malek Bennabi a été également un grand éducateur. Dans la pure tradition de Platon, il a su redonner le primat à la parole sur l’écrit et la préférence à l’enseignement populaire par  rapport au cours magistral dans la transmission des idées et des valeurs. Il laisse de précieuses indications sur ce qui aurait pu constituer les axes d’orientation d’une rénovation pédagogique de notre système d’éducation et de formation. On pourrait citer pour la circonstance :
  • opter pour un enseignement didactique, éthique et esthétique
  • inculquer l’esprit critique et le goût de l’innovation.
  • développer les filières technologiques et la formation d’ingénieurs
Mais Malek Bennabi ne fut pas écouté, ni même compris. De zélés activistes de la mouvance socialo-communiste s’employèrent à le diaboliser auprès d’un pouvoir qui considérait déjà l’avis autorisé comme une contre-indication. Il a tenu à conserver jusqu’au bout son esprit libre et indépendant, attitude qu’il a chèrement payée. Comme il se décrit lui-même, «cet homme-là, il fallait coûte que coûte en venir à bout par tous les moyens puisque l’argent, les honneurs, la situation n’ont pas de prise sur lui».


En guise de conclusion

Désabusée des méthodes sans solutions, la jeunesse algérienne crie son désarroi et cherche désespérément les voies et moyens à libérer ses énergies et inventer volontairement l’ordre politique, social, culturel et économique compatible avec ses aspirations. La jeunesse est le baromètre qui donne la mesure de la vitalité d’une société à faire rimer alternance et alternative. Ce qui a fait dire à Georges Bernanos : «C’est la fièvre de la jeunesse qui maintient le reste du monde à la température normale. Quand la jeunesse se refroidit, le reste du monde claque des dents». Aussi, malheur au régime qui réprime les ardeurs de sa jeunesse.
Pour toutes ces considérations, la situation semble explosive. Elle rappelle étrangement cette scène surréaliste du film catastrophe Terreur sur le Britanic réalisé par Richard Lester. Une équipe de démineurs est parachutée en pleine mer sur le paquebot le Britanic pour désamorcer la bombe placée par des demandeurs de rançon. En même temps, la police parvient à mettre la main sur le cerveau de l’opération, qui n’est en définitive que l’ancien responsable du chef de l’équipe des démineurs. S’engage alors un entretien téléphonique entre eux sur la manière de désamorcer la bombe. Il s’agit de couper l’un des deux fils, le bleu ou le rouge. Il lui indique la mauvaise solution : «Coupe le bleu». Mais le chef démineur décide en fin de compte de sectionner le fil rouge et la bombe est désamorcée.
Il en est de même pour le peuple algérien, qui ne fait plus confiance à ses élites politiques et intellectuelles et refuse de sectionner le fil bleu. Il préfère rester sourd et aveugle aux cris du corbeau des ces élites ambitieuses, tentées par le pire. Il se réfugie dans son infra politique, qui reste au demeurant insondable et inaccessible aux analyses et aux statistiques. Il reste dans l’attente du retour des voleurs de feu qui lui indiqueront, par leur lumière directrice, les voies et moyens à neutraliser le syndrome anomique et à réactiver les fonctions du progrès.
Nous sommes dans le domaine des nécessités impérieuses. La résorption de la crise génère d’immenses besoins en expertise que le système ne peut nullement satisfaire. Il nous faut donc dépasser l’ordre actuel avec ses choix politiques réduits aux pétrodollars et aux intrigues de palais. Les intellectuels nous ont légué les clefs de résorption de la crise : les liens d’attachement et le rapport à l’universel, l’examen pathologique et la dynamique sociale, c’est-à-dire Mohamed Bencheneb et Jean El Mouhoub Amrouche, Abderrahmane Ibn Khaldoun et Malek Bennabi.
Présentement, il reste à craindre que ne se réalise, tel un oracle, la parabole du philosophe danois, Soren Kierkegaard, pour qui «le paradoxe suprême de toute pensée, c’est la tentative de découvrir quelque chose que la pensée ne peut penser». A méditer : «O magnanimité rare, rare dans notre temps, où un homme sur deux est une autorité, (…) cependant que toutes ces différences et cette pléthore d’autorité ne trouvent de médiation que dans cette folie générale et un commune naufragium [naufrage commun est facile à supporter] ; car aucun homme n’a jamais été une autorité et n’a jamais, en tant qu’autorité, fait du bien à un autre ; avec une autre méthode, cela réussit mieux ; en effet, un fou qui va son chemin, cela ne rate jamais qu’il entraîne beaucoup d’autres avec lui».
Brahim Zeddour


La jeunesse est le baromètre qui donne la mesure de la vitalité d’une société à faire rimer alternance et alternative. Ce qui a fait dire à Georges Bernanos : «C'est la fièvre de la jeunesse qui maintient le reste du monde à la température normale. Quand la jeunesse se refroidit, le reste du monde claque des dents». Aussi, malheur au régime qui réprime les ardeurs de sa jeunesse.

lien: http://www.impact24.info/le-syndrome-anomique-derniere-partie/

La dernière pichenette d'Aït Ahmed

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Albert Camus, ou la prière de l’Absent

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La vie d’Albert Camus est jalonnée par six évènements majeurs : la mort au combat de son père en 1914, ses reportages sur la misère en Kabylie en 1939, les massacres du 8 mai 45, l’insurrection nationaliste du 20 août 55, l’échec de son appel à la trêve civile du 22 janvier 56 et la remise 2 ans plus tard, du prix Nobel le 10 décembre 57. Il est incontestable que son premier revers c’est son absence du front, le jour où la répression des populations civiles du Nord Constantinois creusera un fossé de sang entre les communautés. Ce jour, sa présence nous aurait peut être épargné tant de haines et tant de peines. Alors que ses amis le réclamaient en vain, il préféra prolonger ses vacances. Sans doute incapable d’aller à contre sens de sa communauté, trop orgueilleux ou trop lucide, il décidera de rejoindre les rangs des partisans de la responsabilité collective. Savait-il qu’en s’abstenant de crier à l’injustice, il venait d’opter pour la résignation finale ? 

En occultant les massacres du Nord Constantinois et ses 12.000 morts d’août 1955 -dans son ouvrage “L’arme secrète du FLN, Comment de Gaulle a perdu la guerre Algérie, Matthew Connelly, se référant à un entretien entre Guy Calvet, représentant de Soustelle à Paris , et un diplomate américain en poste dans la capitale française, rapporte le chiffre de 20.000 victimes indigènes- (1),  Camus s’alignait derrière le déchaînement des ultras contre les populations indigènes! Son drame c’est de s’être mis en vacances au moment où son pays commettait l’horrible tuerie qu’il redoutait depuis 10 ans! Lui, l’intellectuel, le visionnaire, le révolté aura préféré détourner son regard lors du dernier acte ! Celui qui prépare le dénouement final ! Difficile de venir par la suite prêcher la trêve alors que les cadavres se comptaient déjà par milliers ! Pris en tenailles entre ses convictions et sa fratrie, il préféra rester au milieu du gué, alors que les deux camps redoublaient de férocité. Près de 55 ans après ces tragiques instants, on s’aperçoit que Camus avait déjà tout prévu, dans une vie antérieure ! 
Si bien qu’à l’heure des mitraillettes, il était déjà plongé dans un profond dépit ! Fermement convaincu qu’il n’y avait plus de place pour ce rêve Algérien qu’il chérissait par-dessus tout. Camus l’orphelin qui perdait son père dès sa tendre enfance, n’aura d’autres voies que de reporter toute son affection sur sa mère. Pourtant l’orphelin qu’il fut, n’aura jamais la moindre condescendance pour les milliers d’enfants arabes, rendus orphelins par l’imprescriptible répression de l’été 55, qui endeuilla « ad vitam aeternam » les populations autochtones du Nord Constantinois. 
Le pourfendeur de la misère en Kabylie, n’émettra pas la moindre protestation, ni ne formulera la moindre désapprobation, lorsque les massacres d’Arabes, comme au temps de la conquête, redevenaient la règle. Aujourd’hui encore, enfants, petits enfants et arrières petits enfants de ces victimes désespèrent de donner une sépulture à leurs ancêtres. 
Au moment où en France on envisage de transférer Camus au Panthéon, ne serait-il pas juste de songer à des retrouvailles avec cette terre meurtrie où il pourra prétendre à un paisible repos. Car en relisant ses contributions, on se rend compte du grand humaniste qu’il fut, on y découvre également une profonde et subtile aptitude à la réconciliation. 

Le cinquantenaire de la mort d’Albert Camus n’aura pas dérogé à la règle qui veut que cet auteur ne cesse de questionner sur son œuvre singulière. Cependant, toutes ces contributions ont un point commun, elles ne parlent que d’Albert Camus et de son pays natal, lui dirait « mon seul et unique pays, l’Algérie ». Des textes qui ne sont pas parvenus à dissocier l’auteur de son œuvre et l’œuvre de son pays, pourtant combien d’auteurs auront vainement tenté de disséquer cette page houleuse, trouble, tragique et douloureuse de notre histoire ? Pour ceux ayant été au cœur de cette terrible guerre qui fera tant de mal à l’auteur du mythe de Sisyphe, ils ne peuvent se passer de la lecture de la plupart des contributions parues en France et en Algérie. Personnellement, cette lecture m’aura amené à me questionner sur la véritable place de Camus non pas dans la littérature universelle – le Nobel attribué en pleine guerre d’Algérie se suffit à lui-même, mais dans le paysage actuel et futur de ce qui se dessine entre la France d’aujourd’hui et l’Algérie de demain. Avec le recul nécessaire, j’avoue qu’il est toujours prudent de parler de Camus avec gravité. Tout en gardant à l’esprit la réserve qui s’impose pour tout compatriote, car le moins que l’on puisse dire est qu’il n’est pas aisé de parler de Camus, encore moins de son œuvre, surtout lorsqu’on est né ici, de famille indigène ; que l’on aura subi de plein fouet les affres d’une guerre injuste et que l’on aura été pétri dans l’adoration de ce romancier hors pairs ; non pas durant la colonisation, mais ô comble du paradoxe, bien plus tard, dans l’Algérie Algérienne !C’est pourquoi, il n’est pas facile pour moi de faire la part des choses, entre les beaux textes de Camus, que des instituteurs inspirés m’auront fait aimer, et l’action de Camus dans sa vie tourmentée par « les évènements d’Algérie » dont il ne parviendra pas à modifier ni la trajectoire ni d’en atténuer les souffrances. A son corps défendant, mais avec plus ou moins d’ardeur, selon que les victimes appartenaient à sa communauté ou à celle de la population musulmane. Pour faire la part des choses et trancher dans le vif, on s’aperçoit que nous ne sommes  pas outillés pour un tel exercice. Certainement à cause de cette histoire commune, sur cette terre commune ; mais aussi à cause des blessures qui tardent à cicatriser, voire pour certaines, qui ne cicatriseront jamais. Surtout que les protagonistes ne sont presque plus là, et que l’histoire comporte beaucoup de zones d’ombres que même un visionnaire comme Camus n’aura pas su éclairer de son génie.

Une algériannité disputée

Pour mieux comprendre les enjeux, il serait tentant d’en modifier la donne. Alors imaginons que Camus soit né au Maroc ! Et resituons son œuvre en pensant comme un citoyen de sa majesté ! Imaginons l’Etranger dans les rues de Tanger ! Avec Meursault trainant son cadavre dans une plage de l’Atlantique ! Ni le roman ni le romancier n’auraient eut le retentissement qui fut et qui demeure le leur ! Convenons-en ! Imaginons « La peste » dans les rues poussiéreuses d’Agadir ou de Fès, en lieu et place d’Oran. Imaginons « Noces » et Tipaza et son somptueux site remplacés par les ruines romaines de Volubilis. Sans le Mont Chénoua, majestueux et rebelle, sans la Méditerranée et son ciel d’azur ! Autant imaginer Camus sans l’Algérie et vice versa. On va vite se rendre compte que l’affaire est beaucoup plus complexe qu’il n’y parait ! Ceci m’amène à dire deux évidences, la première est que Camus et l’Algérie sont indissociables l’un de l’autre, ils forment un couple en perpétuel déchirement. C'est-à-dire un couple où rien n’est banal, où rien n’est commun, où rien n’est parfait, où rien n’est définitivement acquis, mais où la recherche de la perfection tient du sacerdoce !La seconde est que l’Algérie française n’est pas un protectorat ; la forte population d’un million de pieds noirs contre 10 millions d’autochtones est un cas unique dans l’histoire de la colonisation. Entre ces deux évidences, il y a la métropole et ses liens complexes et contraignants avec sa colonie. Cette excroissance qui ne parviendra jamais à s’assumer totalement, car dès le départ, elle sera une partie de la France, sans l’être réellement!

Périlleuse méprise

En cet automne 54, alors que les vendanges n’ont jamais été aussi abondantes, Paris était aussi gagné par l’insouciance, surtout que les rares indigènes qui s’y rendaient étaient majoritairement triés sur le volet, quand ils ne servaient pas d’attraction dans ces funestes zoo d’humains; l’éclat de la ville lumière ajoutant à leur ébahissement! Les grondements sourds des campagnes d’Algérie n’avaient aucun écho dans les palais de la république. Une semaine avant l’insurrection, François Mitterrand, après une longue visite, en ministre de l’intérieur, était reparti avec la conviction que tout n’allait pas pour le mieux dans cette Algérie Française. Si bien que le matin du 1ernovembre, alors qu’une trentaine d’attentats venaient de secouer la léthargie ambiante, que les premiers cadavres venaient alimenter la macabre comptabilité du gouverneur Léonard, plutôt affairé avec les milliers de prisonniers interpellés dans leur sommeil, on ne retiendra que les propos, en total décalage avec la réalité du terrain,  de François Mitterrand. Qui parla déjà de la répression «nécessaire et impitoyable des troubles» puis déclarait dès le 7 novembre que «L’Algérie c’est la France et la France ne reconnaîtra pas chez elle d’autre autorité que la sienne ». Il ajoutera une couche, le 20 novembre, répétant invariablement que « les trois départements d’Algérie sont des territoires français ». Une parfaite illustration de cette suffisance toute 4ème république, qui fait des convictions une réalité. La messe était dite. Camus lui-même est pris de court, probablement obnubilé par les avatars de ses amis communistes, eux-mêmes trop occupés par l’écriture des pages les plus sombres du totalitarisme soviétique. Il n’aura rien décelé dans le destin tragique qui se profilait pour son pays. Trop attaché aux pulsions communautaires, il se laissera aisément convaincre par la désinvolture de la rue Algéroise et son mépris de tout ce qui peut rappeler le sort peu enviable fait aux masses indigènes. Toujours aussi critique vis-à-vis de la métropole, il sera bien seul à déceler chez le ministre de l’intérieur, les prémices d’une périlleuse méprise. A l’endroit de François Mitterrand, il dira sans détours que « l’Algérie n’est pas la France comme on s’obstine à le dire avec une superbe ignorance ». Pendant que Paris mobilisait la troupe pour mater la rébellion naissante, en Algérie l’ordre colonial s’engageait dans une indicible répression de tout ce qui ressemblait à un Arabe. Car dès le début de la guerre, Camus savait que celle-ci allait être effroyable. Il la redoutait depuis les massacres de Sétif et de Guelma, en mai 45. Oui, Camus ancienne pupille de la nation, savait combien ce pays ne pouvait pas supporter d’autres tueries, d’autres massacres. Pour lui, ceux de mai 45 devraient être les derniers ! Lorsque 10 années plus tard, toute la région du Nord Constantinois, non loin de chez lui, allait se soulever contre toutes les misères et toutes les souffrances, sa première réaction fut de se tenir la tête entre les mains. Et de détourner le regard.

Moins de 100 jours de Dièn-Bièn-Phu

Dès les premiers crépitements des téléscripteurs dans les rédactions parisiennes, Camus n’en croira pas ses yeux. Il se doutait bien que le terrible scénario de mai 45, avec sa répression à grande échelle allait se répéter à travers douars et mechta d’Algérie. Il savait les moindres ressorts de ce pays fragilisés, il redoutait que la cupidité des parlementaires allait s’allier à la stupidité des militaires, trop pressés d’en découdre depuis l’insoutenable défaite de Dièn-Bièn-Phu ; dont les blessures n’avaient pas encore cicatrisées. Le seraient-elles un jour ? Rien n’est moins sûr. L’histoire oublie souvent qu’entre la débâcle de Dièn-Bièn-Phu et la Toussaint rouge, il s’était écoulé à peine 94 jours! Pour l’Armée Française, pour les états-majors parisiens, pour la 4ème république, la moindre occasion pour laver l’affront subis face à Giap et ses soldats en guenilles, ils ne se feront pas prier pour s’y engouffrer! Une autre occasion se présentera à eux, moins de 10 mois après la Toussaint. Le nombre de morts : 35 dont des femmes et des enfants, le lieu : un village minier, l’impact très fort sur les colons : Philippeville étant la ville où la proportion de pieds noirs est la plus forte de toute l’Algérie coloniale, le jour : second anniversaire de la déportation du roi du Maroc, Mohamed V, et enfin la présence du « commandant O » de sinistre mémoire, feront de cette insurrection un formidable tremplin pour tous les va-t-en guerre et les revanchards !

Une répression au centuple.

Alors que chacun tentait de se convaincre de la justesse de ses choix, Ziroud Youcef, le responsable FLN/ALN du Nord Constantinois, un simple forgeron devenu chef rebelle, venait de mettre au point une stratégie qui allait faire basculer définitivement l’Algérie dans la guerre. Ce furent les attaques à presque mains nues du 20 aout 55 de plusieurs agglomérations, qui firent 71 victimes parmi la population européenne. Immédiatement suivies par les massacres à grande échelle des populations autochtones, notamment dans la région de Skikda-Philippeville! C’est là qu’aurait du se produire ma rencontre avec Albert Camus! Mais pendant que les miens achevaient leurs illusions dans une monstrueuse fosse commune, Camus était en vacances ! Lui, l’unique voix pied noir qui pouvait faire cesser la répression, appeler à la retenue, actionner la justice, il n’était pas au rendez-vous ! Il sera bien destinataire d’un courrier d’un ami socialiste algérien, Aziz Kessous, un proche de Ferhat Abbès, qui l’implorait de s’impliquer pour éviter que le fossé entre les communautés ne devienne un abime ; mais Camus ne viendra pas. Pourtant la répression qui se voulait exemplaire, se fera féroce et disproportionnée. Une récurrente disproportion qui interpellera l’historien Marc Ferro (2), -dans son livre réquisitoire «Le livre noir du colonialisme»-, ahuris et révolté par ce rapport de 1 contre 100 qui jalonnera la présence française depuis la conquête. Force est de constater que ces tueries étaient exécutées sous la bénédiction des autorités civiles et militaires. Selon Sylvie Thénault (3), «le 23 aout, en effet, le général Lorillot, commandant l’ensemble de l’Algérie« prescrit » au général commandant la division de Constantine « de donner ordre aux cadres et troupes de conduire avec rigueur les opérations ».Pierre Mendès France qui fut président du Conseil, de juin 1954 à février 1955, soutient avec vigueur la répression, appelant à une « riposte sévère mais non aveuglément brutale ni inutilement sanglante » ! Il sera bien servi, l’horreur d’El Alia sera démultipliée trente deux agglomérations. Sans que Camus n’ait esquissé le moindre geste de réprobation, ni le moindre regret.

Un prétexte d’écolier

Aziz Kessous le suppliait de dire son déchirement, mais aussi son attachement, pas seulement à ses frères de sang, mais à tous les habitants de l’Algérie. La réponse de Camus (4) sera sans grande illusion. D’emblée, s’excusant auprès de son ami, il dira avoir trouvé ses lettres à son retour de vacances et qu’il craignait que son approbation ne vienne tard (…) depuis le 20 aout, je suis prêt à désespérer! On sent de suite qu’il feint d’être pris de court. Le prétexte des vacances ne peut vraiment pas tenir la route quand on sait l’étendue de la répression et l’intensité de l’électrochoc! Au demeurant, ni la presse internationale, ni la classe politique ne resteront sans réactions. Pendant ce temps, Albert Camus prolongeait ses vacances ! Sa lettre ne sera publiée par Kessous que le 1er octobre 55, soit 40 jours après ces évènements qui creuseront à jamais un fossé entre les deux communautés.Pourtant, un riche colon bienveillant, Roger Balestrieri, notre voisin du Béni Mélek, n’avait pas droit aux vacances, surtout à quelques jours des vendanges. Sa solidarité, il la manifestera dès que notre douar fut abandonné en flammes et en larmes par la troupe à Aussaresses. Le 24 aout 1955, c’est lui qui, accompagné de Boukhmis et de Zine, deux ouvriers indigènes, vint apporter à plus de 70 femmes et enfants parqués sous les oliviers, de l’eau et du pain.Et leur offrir un gite dans une ancienne mansarde abandonnée, qu’ils devraient rejoindre à la tombée de la nuit ! Pour ne pas lui attirer les rancœurs de ses compatriotes, voire leurs représailles. Dans la colonne qui s’ébranla au crépuscule du 24 aout, on comptait une vingtaine de veuves et près de 50 orphelins ! Emportant les rares sacs de semoule retirés des débris de nos maisons. Ce premier couscous réparateur, il avait un drôle de goût. Il sentait très fortement le pétrole ou l’un de ses dérivés ! Ma première rencontre avec le progrès Français : cet arrière gout de napalm ! Si au moins Camus était venu nous voir chez Roger, dans cette ferme délabrée qui domine le golfe de Stora, où la paille nous servira longtemps de litière, il aurait certainement partagé ce couscous si particulier avec nous ! Il aurait surtout retrouvé, en pire, la misère et le dénuement qu’il décrivit 16 ans plus tôt en Kabylie. Avec en plus la détresse d’épouses éplorées, d’enfants affamés, de jeunes filles terrorisées ; avec comme seul compagnon notre chien « Soubba » miraculeusement échappé de la furie des soldats qui n’avait épargné ni poules ni lapins ! Quant à nos vaches et chèvres, elles seront également embarquées pour aller améliorer l’ordinaire des officiers français. C’était aussi ça la fameuse clause de « responsabilité collective », même nos bestiaux seront sacrifiés. Le principe de la responsabilité collective ayant été signifié officiellement par le général Cherrière dans une circulaire du 14 mai 1955 ; le document restera secret jusqu’à sa révélation par Yves Courrière dans «La guerre d’Algérie» publié 14 ans plus tard (5). Car pendant que 32 douars grillaient sous le feu et le glaive de la France coloniale, que la chasse à l’Arabe battait son plein, et que les victimes débordaient des fosses communes creusées à la hâte, Camus était en train de bronzer sur une plage du Péloponnèse. Notons qu’il avait encore un zeste de lucidité, mais vraiment un zeste ; pendant que Paris, encore une fois, décidera de faire l’exact contraire du bon sens, Camus se fera à la fois sentencieux et un bout pessimiste.Dans ses « Chroniques algériennes », parlant de l’Absente, il eut sans doute les mots les plus justes, les plus forts mais également les plus désespérants : « les solutions qu’on pouvait envisager avant le 20 aout sont déjà dépassées» (6). Mais c’est lorsqu’il parle de Paris que son texte devient un concentré de lucidité et de désespoir: Beaucoup de monde au palais Bourbon, une seule absente : l’Algérie. Très critique à l’égard des parlementaires « qui peinent à se prononcer sur un ordre du jour », et du « gouvernement farouchement déterminé à ne rien définir »,ajoutant amèrement, presque défaitiste : « la France elle continue, mais derrière elle, l’Algérie meurt ». On se rend compte combien seul le destin de la colonie lui tenait à cœur. Dans l’amère réalité, c’est le peuple algérien qui souffre, mais pour Camus, seul le sort de la colonie le préoccupait. Car c’est bien de son Algérie coloniale qu’il s’agit. C’est probablement à cause de la prégnance de la revendication nationaliste, surtout que la rébellion marque des points tant à l’intérieur qu’à l’international que l’écrivain consentira enfin à parler à l’adversaire. Au point où l’on peut se demander s’il ne s’agit pas d’une simple ruse de guerre ! Et la guerre est bien réelle eut égard à la nature des moyens utilisés et à l’ampleur de la mobilisation. Alors que la violence fait rage, on ne peut lui reprocher d’avoir été visionnaire. 

Un éclaireur isolé

Nous sommes encore en 1955 et les prolongements des sanglants évènements de Skikda-Philippeville ne sont pas près de s’estomper. Pour Camus, « l’ordre du jour pour l’Algérie c’est le sang » ! « Aux bavardages – des parlementaires- répond le hurlement solitaire des égorgés, au maniement du dictionnaire celui des armes » (5). Résolument, la France entrait en guerre ! Même le Montcalm un redoutable destroyer se présentera en rade de Philippeville ! C’est dire si la situation était prise au sérieux par les états-majors parisiens.Dans ses premiers écrits, on sent chez Camus cette révolte sourde, vis-à-vis de la métropole mais également, mais bien plus tard, vis-à-vis des pieds noirs. A ces derniers il dira combien « les procès haineux ne changent rien à la réalité qui nous étreint. Qu’ils le veuillent ou pas ils sont devant un choix entre lapolitique de reconquête et les réformes. La première signifie la guerre et la répression généralisée, la seconde serait une démission » ! Pour Camus il s’agissait « d’une erreur mortelle » ; pour l’Algérie Française s’entend ! On sait que dès le début, Gisèle Halimi fera appel à lui pour intercéder envers les accusés du procès d’El Halia, c’est pourquoi il parlera des procès de la haine. Il enchaîna de suite sentencieusement : « pour la France, il est une forme suprême de démission, qui s’appelle l’injustice ». Pour l’auteur des « Justes », on sent déjà le renoncement et le repli face aux excès des siens. Le mot est lâché, et c’est à partir de cet instant que Camus empruntera cette voie très ténue qui le mènera droit vers la solitude et l’enfermement de celui qui savait ; mieux que les autres, avant les autres, contre les autres ! Il poursuivra son réquisitoire avec détermination et clarté : « En Algérie, cette démission (de la France) a précédé la révolte arabe et explique sa naissance si elle ne justifie ses excès. Déjà en 1955, il faisait preuve de discernement, mais déjà il était bien seul.Car de leurs cotés, les tortionnaires de la république persistaient dans leur criminel entêtement. Après les morts d’El Alia, la répression aveugle tant redoutée se déchainera. Outre le sanguinaire Aussaresses, qui tuera de sang froid et en conscience, des centaines de victimes innocentes, il y eut, samedi 20 aout, à El Alia, dès 15 heures un mitraillage du village par deux avions ! De suite les gros moyens et surtout l’absence de discernement ! L’information sera soigneusement gardée jusqu’au procès en appel des 44 prévenus et c’est le président du tribunal militaire en personne qui évoquera les faits dès l’entame du procès de Constantine ! En 1958 !Gisèle Halimi, qui défendait aux cotés de Léo Matarasso les 44 accusés indigènes du procès d’El Alia parle dans son livre (Le lait de l’oranger)  de révélation ; soulignant qu’à l’époque ce mitraillage aérien avait été minimisé (7). On le comprend, car il ne fallait surtout pas parler de répression aveugle et sans discernement. On voulait bien massacrer pour l’exemple, mais en taisant les moyens disproportionnés et en minimisant les impacts et le nombre des victimes.

Repousser le mur de la haine

On comprend alors pourquoi, durant l’automne 55 et l’hiver 56, Camus s’appliquera à asséner certaines vérités qu’il prendra soin d’enrober dans un discours feutré. Destiné à une élite. Ses nombreuses interventions qui paraitront entre octobre 55 et janvier 56, seront toutes des appels à la retenue et à la nécessaire concertation.Devenu aphone, malgré des efforts certains et soutenus, mais trop isolé y compris dans sa propre communauté, Camus prendra le chemin de l’exil et de la résignation. Emportant dans ses valise cette blessure qui ne cicatrisera jamais : celle de l’inconsolable orphelin qu’il fut. Curieux statut que celui de l’orphelin ! Pour un non moins curieux pays ! Car à cette époque, l’Algérie, plus particulièrement la région de Philippeville, se détachait très loin dans le palmarès du nombre d’orphelins. Camus n’ignore pas combien ce statut peu recommandable, provoque chez celui qui en hérite un profond sentiment d’injustice, presque de l’asservissement. Lui sait que dans toutes les langues du monde, le mot orphelin n’a ni synonyme ni antonyme. On parle d’orphelinat, un lieu où seront parqués les orphelins. Comme si le fait d’être orphelin ne se suffisait pas, la république de Bonaparte inventa le concept de pupille de la nation ; qui ne s’applique qu’à ceux dont les parents mourraient à la guerre. Certains farceurs y ajouteront « de père et de mère ». La totale quoi! Mais dans L’Algérie coloniale ils seront des « enfants nécessiteux ». Un euphémisme pour ne pas trop s’impliquer et surtout pour cacher sa responsabilité pleine et entière. Le père ayant été tué par la guerre, ni la 4ème, ni la 5ème république ne voudra intégrer les milliers d’orphelins indigènes aux pupilles de la nation.Pourtant, ils en avaient tous les attributs ; fils de «citoyens français à part entière», -le mot n’est pas de trop dans la bouche du général de Gaulle-, ils pouvaient objectivement prétendre à la soupe. Après l’indépendance, fillettes et garçons deviendront « enfants de chouhadas ». Aujourd’hui, après la guerre et les privations postindépendance, ils continuent de déranger. Y compris en haut lieu. Là où paradent les heureux compagnons de nos martyrs. Sans le sacrifice desquels l’indépendance n’aurait été qu’un simulacre.Même s’ils ont l’âge de la guerre d’Algérie, ces orphelins grisonnants n’en sont pas moins démunis. Car le problème avec l’orphelinat est qu’on sait quand il commence mais on ne sait jamais quand il finit. D’où peut être cette propension chez nos concitoyens -qui n’ont jamais connu ce statut exécrable-, à mépriser jusqu’à la notion de « fils de martyr ». Il faudrait peut être qu’ils se calment, car la dette vis-à-vis de la nation, elle est loin d’être derrière nous.Mieux, elle est à venir ; et le restera pour longtemps. Pour ceux qui l’auraient oublié, il y a déjà 48 ans que la guerre est finie, sans que le statut des ces parias ne soit définitivement clarifié. C’est cette amnésie qui continuera de tarauder la mémoire de l’Algérie et de la France, car ce n’est pas en occultant ce problème qu’on parviendra à le résoudre. Parce qu’entre ces orphelins et la France, il y a les charniers qu’à aucun moment Albert Camus n’osera dénoncer. Pourtant ces par les charniers que tout a commencé. Tout comme Albert Camus, l’orphelin n’a qu’un seul défaut, il n’est pas amnésique. Ça, même la médecine qui vient d’inventer les maladies orphelines, n’y pourra rien.

Un orphelin à Stockholm


Chez Camus, on a tendance à l’oublier, ce statut imposé à lui dès la tendre enfance, il ne parviendra jamais à s’en détacher. D’ailleurs la célèbre altercation de Stockholm avec un étudiant Algérien est symptomatique à plus d’un titre ! Encore une fois, si Albert Camus n’était pas orphelin, il aurait certainement choisi une autre métaphore. Il est évident qu’à la conférence de Stockholm, lorsqu’il dira préférer sa mère à la justice, Albert Camus ne pouvait se départir de son statut d’orphelin. Sa mère risquait tous les jours sa vie dans le trolleybus algérois.Ayant quitté Alger depuis longtemps, son seul lien charnel avec le pays c’était sa pauvre mère. Qui risquait d’être broyée dans un attentat, alors que la bataille d’Alger faisait rage ! Et que les couffins des uns répondaient aux chars des autres !Du coup l’analogie entre sa mère et la justice n’aurait aucun sens si son père était encore de ce monde. Car pour un orphelin, la mère ne compte pas double, non, elle est unique ! Donc forcément présente partout et en toutes circonstances !Pour l’unique survivant de la famille, la maman est le bien le plus précieux que l’on se doit de prémunir de tout, surtout de l’injustice ! Mais également de la justice!C’est là que l’on comprend pourquoi Albert Camus ne pouvait être ni Marocain, ni Tunisien d’ailleurs ! Car s’il l’avait été, il n’aurait aucun souci à se faire, Tanger et Tunis étaient bien joyeuses lorsqu’Alger s’enveloppait tous les soirs d’un nouveau linceul! A l’image de tous le pays, plongé dès le 20 aout 55 en un immense champ de bataille à armes inégales.En page 14 de ses « Chroniques algériennes » (5), on peut déceler une explication : « quand sa propre famille est en péril immédiat de mort, on peut vouloir la rendre plus généreuse et plus juste, on doit même continuer à le faire (…) sans manquer à la solidarité qu’on lui doit dans ce danger mortel (…) pour qu’elle retrouve la chance d’être juste ». Ainsi, plus de trois ans après le sanglant mois d’aout 55, Camus s’adjuge « le droit, et le devoir de dire que la lutte armée et la répression ont pris de notre coté, des aspects inacceptables. Les représailles contre les populations civileset les pratiques de la torture sont des crimes dont nous sommes tous solidaires. Que ces faits aient pu se produire parmi nous, c’est une humiliation à quoi il faut désormais faire face ». Que n’avait-il pas tenu ce discours au moment des faits, lorsque les passions étaient déchainées, les ratonades légalisées, encensées, généralisées? Ce silence inexplicable de l’Eté 55, fut sans doute son premier renoncement, sa plus grande déconvenue et son ultime défaite! Il reconnu de suite l’échec des rares libéraux dont il se réclamera plus tard, mais n’osera pas l’affirmer de peur de heurter ceux de sa communauté qui appelaient au crime. Pourtant chez les indigènes, il y avait deux groupes : ceux, très rares qui avaient décidés de prendre les armes pour mettre un terme à l’injustice, et les autres, la grande majorité, qui observaient incrédules, indécis presque défaitistes comme la plupart de leurs coreligionnaires.Claire Mauss-Copeaux qui continue de travailler sur le sujet nous apprend « que la municipalité -de Philippeville- fit détruire la plupart des bidonvilles où s’abritaient les Arabes les plus misérables », et qu’elle installera ces « familles, quelques matériaux et quelques hardes à huit kilomètres de là, aux Carrières romaines. Est-ce une simple coïncidence si les troupes recrutées au dernier moment par les fellaghas provenaient… de ces villages et des Carrières romaines ?», se demande l’historienne! (8).C’est dire qu’entre 11 heures et midi, tous les insurgés qui déferleront sur la ville, combien même ils scandaient les mêmes slogans, n’étaient pas sur la même longueur d’onde. C’est la répression aveugle, sans discernement, injuste, disproportionnée et démesurée qui fera basculer la population indigène dans les bras des insurgés conduits par le FLN!Depuis ces sanglantes journées d’aout 55, au lieu de nous appliquer sans discernement la loi du talion au centuple, il eut fallu que la justice prenne les choses en main! Paris et ses relais en décideront autrement, face à la furie de la population pieds noirs, aucune institution républicaine ne tentera d’activer la légalité et le droit.
Rencontré en 2007, sur les lieux du drame, à El Alia, un acteur qui assumera avoir égorgé une fillette et sa maman, soutiendra qu’une fois rassasiée – après s’être goinfré de sardines frites, préparées pour le déjeuner par la maitresse de maison qu’il venait d’égorger, lui et ses compagnons se retireront dans la montagne qui surplombe la mine de pyrite. Le fait de le retrouver 52 ans après, n’est il pas la preuve irréfutable que les assaillants avaient tous pris le large? Gisèle Halimi soulignera ne pas avoir admis que les accusés d’El Alia qu’elle venait défendre, aient été, sans exception, interpellés sur leur lieu de travail habituel, aux cotés des survivants de la tuerie de la veille ! Au moment du procès, elle s’abritera derrière cette incongruité pour se convaincre de l’innocence de ses clients. C’est dire combien, sous la pression, y compris de Paris, il fallait à tout prix fabriquer des coupables. Si bien qu’au cours du premier procès, le médecin légiste, le nommé Travail, avouera avoir bâclé son expertise et mélangé ses fiches.  Ce qui obligea le tribunal militaire à ordonner quatre exhumations s’avèreront catastrophiques et sans appel pour l’accusation.Pour la grande majorité des pieds noirs et des militaires, nous n’avions aucun droit à la justice ! Comme en mai 45, comme en novembre 54, la justice abdiquera sous la pression des ultras et l’injonction des responsables civils et militaires.
Dans son édition du 22 août 1955, le magazine The Times parle de « 12 000 Algériens massacrés par l’armée, la police et les colons organisés en gangs ». Le grand journal londonien qui avait ses entrées, -la France étant alors membre de l’Alliance Atlantique-annonçait froidement 12.000 victimes ! Toutes civiles, toutes désarmées, toutes innocentes! De son coté, Edward Behr, correspondant de Newsweek à Paris laissera un témoignage sans nuances : « APhilippeville, les pieds-noirs ‘’des comités de vigilance’’ assassinèrent sommairement des musulmans, les ensevelirent secrètement, tandis que des civiles armés tenaient à distance les correspondants trop curieux... ».Et là, il faudra rappeler à Camus que nous étions bien sous la 4ème république, avec son gouvernement, son ministre de la guerre et son ministre de la justice ! L’honneur de la France aurait été préservé si les lois de la république et ses institutions avaient été activées. Il n’en fut rien et là le dérapage était inévitable, Ziroud Youcef, le vieux militant nationaliste qui venait de succéder à Didouche Mourad, avait eut raison ! Son bain de sang, qui allait propulser la population dans les rangs du FLN, il l’avait!
Pendant que dans les charniers des milliers de corps s’amoncelaient, Camus optera pour un interminable silence! Certains lui reprocheront de s’être aligné sur les cris de haine de sa communauté! Sa lucidité d’orphelin, l’incitait curieusement à la retenue. Peut être parce qu’il se savait minoritaire, incompris, isolé et parfois méprisé par les siens! Il savait que souvent, dans son Algérie des colons, il était préférable de ne pas avoir raison! Surtout pas contre la foule surchauffée, pas contre sa propre communauté. Grave instant d’égarement, pour un homme seul, pour un homme déchiré entre un humanisme de bon aloi et une tribu décidée et convaincue de sa puissance et de son droit. Celui qui aura prévalu depuis la conquête du pays. Surtout de sa supériorité raciale.

Relaxés, innocentés mais coupables !

Dès le départ, il avait été piégé par les décisions de Soustelle et d’Aussaresses, les relais d’un pouvoir parisien finissant. Il faut relire le procès d’El Alia, dans l’excellent livre de Gisèle Halimi (Le lait de l’oranger) pour comprendre l’énorme décalage entre quelques français lucides et courageux et la grande majorité des colons. Rencontré en 1988 à Echirolles, mon ami Roger Balestrieri qui assistait au procès me parlera de sa stupeur face à la haine qu’il lisait sur les yeux de ses compatriotes. Tous savaient que le fermier hébergeait les rescapés de notre mechta, tous le haïssait pour ce qu’ils considéraient comme une trahison. J’avais conscience de déranger, mais je ne pouvais me débiner, donc je me suis rendu au procès avec la peur au ventre, me racontera-t-il alors.Toujours est-il qu’après 14 condamnations à mort, la jeune avocate obtiendra, la relaxe pour 12 prévenus et les deux condamnés à mort en appel seront graciés par de Gaulle, revenu aux commandes grâce aux convulsions de la 4ème république. Pourtant, ces innocents, parce qu’Arabes, donc forcément coupables aux yeux de la population pied noire, ils devaient payer.Combien sommes nous à savoir qu’aucun des prévenus de ce procès, qui venaient d’être relaxés ou graciés, aucun ne survivra jusqu’à la fin de la guerre? Ce n’est pas un scoop ; c’est dans le livre de Gisèle Halimi (6). 
Comme quoi, il n’y avait qu’une seule justice, celle là même qu’Albert Camus relèguera après sa mère, juste après la remise du prix Nobel! Comment peut-on accepter que les hommes puissent s’arroger le droit de se faire justice, et à fortiori les états! C’est là une dérive qu’on ne peut accepter de la patrie des droits de l’homme, devenue la France coloniale! Qui mieux que ses meilleurs enfants, les plus intelligents, les plus influents, pouvaient le lui rappeler? Certainement pas nous, les indigènes! Mais ceux qui osèrent aller à contre sens furent trop peu nombreux. Albert Camus en faisait-il partie? A un certains moment, loin des clameurs et des vociférations, avant les massacres de Philippeville, certainement! Mais dans la réalité de tous les jours, notamment après le 20 aout, au moment où la responsabilité collective se répandait dans la région, son silence ne s’explique pas. Il avait pourtant un très bon prétexte : la démission fracassante des élus musulmans a l’assemblée algérienne, ce que Camus ne pouvait ignorer. 
C’était le 25 septembre, ils seront 61, dont un seul élu français du premier collège à dénoncer la « répression aveugle », condamnant la politique de « responsabilité collective » menée par les autorités françaises tout en rejetant la politique d’intégration et soulignant que « la majorité écrasante de la population soutenait l’idée de l’Algérie nationale... ». Ils seront rejoints par Jacques Chevallier, maire libéral d’Alger et ancien ministre qui publiera dans l’édition du 5 octobre du quotidien le Monde, une diatribe contre les évènements du Nord-Constantinois qui rendaient la politique d’intégration «comme pratiquement inapplicable». Toutes ces réactions inédites et d’une gravité extrême, ne trouveront plus aucune grâce aux yeux de Camus. Il ne rentrera au pays que le 18 janvier 56. Pour y rencontrer ses amis, dont Ferhat Abbas ; mais aussi pour proposer une trêve. 
Le dimanche 22 janvier 1957 vers 17 heures, alors qu’il rentrait dans la salle où se tenait la rencontre, il est accueilli par une foule hostile qui scandait « Ca-mus ta gueule, Ca-mus à mort ». C’était « les enragés parmi lesquels un certain Joseph Rizza »qu’Emmanuel Roblès présente comme étant «l’un des tueurs de l’OAS qui participera à l’assassinat le 15 mars 1962 des six Inspecteurs des Centres sociaux éducatifs parmi lesquels Mouloud Feraoun, l’écrivain de langue française le plus connu à cette époque et ami de Camus ». (9)Manifestement, ce n’était pas à la mode, d’être aux cotés de « ces Arabes égorgeurs de femmes et d’enfants » ; donc on fera semblant de ne pas savoir. Pourtant les crimes sont bien là, les criminels aussi, ils réclameront même des promotions !

Sur les traces de Cavaignac, de St Arnaud et de Pélissier

Fallait-il se taire durant si longtemps, face à autant de dérives ? Les massacres qui auront jalonné la colonisation ne sont un secret pour personne, le prince de la Moscowa, le 11 juillet 1845, 22 jours après les enfumades des Ouled Ryah dans la grotte de Oued El Frachih, par les hordes du colonel Pélissier, ne se privera pas d’interpeller le gouvernement sur ces terribles évènements  en des termes sans équivoques : « Messieurs, un journal qui se publie en Algérie, l’Akhbar, contient le récit d’un fait inouï dans notre histoire militaire. Un colonel français se serait rendu coupable d’un acte de cruauté inexplicable, inqualifiable, à l’égard de malheureux arabes prisonniers. Je viens demander au gouvernement français de s’expliquer sur cefait.Il est de l’honneur de l’armée comme il est de la dignité du Gouvernement que de pareils faits soient démentis ou désavoués hautement. » Il sera bien seul! Combien de crimes, combien de charniers, combien d’injustices faites à ce peuple ? Dans un assourdissant silence! Malheureusement, ce ne sont pas les douars et mechta du Maroc qui en furent le théâtre, mais nos villages du Dahra, de Béni Mélek, de Kabylie et d’ailleurs. Durant 132 ans ! Un penseur de la trempe de Camus, qui n’aura rien remarqué, ça passe mal! Il faudra attendre la publication de ses « Chroniques algériennes », en avril 58 pour retrouver cette lucidité qui le caractérisa lors de son reportage sur la misère de Kabylie. Ses sentences sont implacables pour la France mais aussi pour sa communauté : « s’il y a vingt ans ma voix avait été mieux entendue, il y aurait peut être moins de sang présentement. Le malheur est que les évènements m’ont donné raison ». 
Cependant, dans langage enrobé il ajuste en priorité la rébellion : « Mais pour être utile, autant qu’équitable, nous devons condamner avec la même force le terrorisme appliqué par le FLN aux civils français comme, d’ailleurs, et dans une proportion plus grande, aux civils arabes », l’allusion à Mélouza est patente. Pour les crimes coloniaux, ceux du Nord Constantinois ou de la bataille d’Alger, il faudra faire preuve de patience et d’acuité. Parlant de la torture généralisée il ose enfin le moralisateur : « celle-ci a peut être permis de retrouver 30 bombes, au prix d’un certain honneur, mais elle a suscité du coup cinquante terroristes nouveaux… qui feront mourir plus d’innocents… ». 
Lorsqu’il aborde le problème de la répression, il en appelle aux autorités, sans jamais donner la moindre impression de réprobation personnelle : « le devoir du gouvernement n’est pas de supprimer les protestations même intéressées, contre les excès criminels de la répression ; il est de supprimer ces excès et de les condamner publiquement, pour éviter que chaque citoyen se sente responsable personnellement des exploits de quelques-uns et donc contraint de les dénoncer ou de les assumer ». Mince alors, encore un peu et il en voudrait aux victimes de s’être trouvées sur le chemin des criminels, au mauvais moment et au mauvais endroit. On est à mille lieux du désaveu cinglant de nombreux intellectuels et hommes d’église qui n’auront aucun état d’âme à dénoncer avec fermeté les excès répressifs commis par la France. Parmi eux on citera JP Sartre, qui dès l’automne 55, dans un entretien publié par La République Algérienne de Ferhat Abbès apporte une caution sans faille au comité d’action des intellectuels contre la guerre d’Algérie. Sans doute que l’engagement de son ami Francis Janson y est pour beaucoup dans cet engagement précoce. D’autres comme  Maillot, Mine, Scotto, Audin, Mandouze, Lavalette, Timsit, Perrin, Gauton, Yveton ou Alleg, payeront cher leur engagement aux cotés du FLN. 
Dans « Albert Camus ou l’inconscient colonial » Edward Saïd note que le philosophe aura participé « à entretenir l’illusion que la question coloniale algérienne pouvait être résolue sans donner l’indépendance au peuple algérien avec une nation algérienne indépendante ». Pour se convaincre de l’opposition tenace de Camus à l’indépendance de l’Algérie, il n’est que de relire cette déclaration parue en 1957 dans l’Express : Il faut considérer la revendication d’indépendance nationale algérienne en partie comme une des manifestations de ce nouvel impérialisme arabe dont l’Egypte, présumant de ses forces, prétend prendre la tête et que, pour le moment, la Russie utilise à des fins de stratégie anti-occidentale.

Camus l’étranger

Autre exemple significatif : Albert Camus, du terroir pourtant, a pris un prix Nobel de littérature, à une question sur sa position au sujet du drame algérien, déclare quant à lui : « Entre la justice et ma mère, je choisis ma mère. » A savoir la France. Clair, net et précis ! Et, bien qu’en ce temps-là, l’Algérie fut la France, il est devenu étranger à deux patries en même temps. On finit donc par se cogner la tête contre les murs devant autant de pensées sales. Car, il est pitoyable d’enregistrer que certains intellectuels aient rayonné par un silence aussi complice, du moins tellement propice, à la drôle mission de pacification et de civilisation ! Et dire que beaucoup de choses auraient pu avoir leur cours dévié dans le bon sens, si la probité intellectuelle avait été dans le camp idoine !Dans son élégante contribution au Monde diplomatique, Edward Saïd met en exergue la pensée impériale qui prévaudra chez Camus : « C’est vrai, Meursault tue un Arabe, mais cet Arabe n’est pas nommé et paraît sans histoire, et bien sûr sans père ni mère. Certes, ce sont aussi des Arabes qui meurent de la peste à Oran, mais ils ne sont pas nommés non plus, tandis que Rieux et Tarrou sont mis en avant. Et l’on doit lire les textes pour la richesse de ce qui s’y trouve, non pour ce qui en a été éventuellement exclu. Mais justement. Je voudrais souligner qu’on trouve dans les romans de Camus ce qu’on en croyait autrefois évacué : des allusions à cette conquête impériale spécifiquement française, commencée en 1830, poursuivie de son vivant, et qui se projette dans la composition de ses textes (8) » Il apparaît que malgré tous les efforts sémantiques qu’il n’aura cessé de déployer, Albert Camus aura de la peine à se départir de cette exécrable idée que l’Algérie n’est que le prolongement de la France. Et que le peuple pied noir doit se faire à l’idée que le temps des colonialismes est fini. Sentencieux il énonce un jugement qui se veut définitif, sans appel, et n’ouvrant droit à aucune forme de contestation : Il est dangereux en tout cas de lui demander (à la Nation, ndlr) de s’avouer seule coupable et de la vouer à une pénitence perpétuelle. Je crois en Algérie à une politique de réparation, non à une politique d’expiation ». On le voit, Camus est coincé entre d’un coté sa communauté et ses avatars, son attachement viscéral à l’Algérie Française dont il sait la fin proche. Et de l’autre à la nécessaire émancipation des masses musulmanes dont les ralliements au FLN s’affirment tous les jours davantage.Encore une fois, le jugement d’Edward Saïd se veut sans appel : « Pourtant, il n’a cessé d’exister une autre voie, plus difficile et stimulante : juger, puis refuser la mainmise territoriale et la souveraineté politique de la France, qui interdisaient de porter sur le nationalisme algérien un regard compréhensif. Dans ces conditions, il est clair que les limites de Camus étaient paralysantes, inacceptables. Comparés à la littérature de décolonisation de l’époque, française ou arabe - Germaine Tillion, Kateb Yacine, Frantz Fanon, Jean Genet -, ses récits ont une vitalité négative, où la tragique densité humaine de l’entre prise coloniale accomplit sa dernière grande clarification avant de sombrer. En émane un sentiment de gâchis et de tristesse que nous n’avons pas encore entièrement compris. Et dont nous ne sommes pas tout à fait remis ». (10) Ah s’il avait été Marocain ! Ça aurait arrangé bien du monde! Car en fin de compte, cette histoire fut un lamentable gâchis pour tous les habitants d’Algérie. 
Il eut fallu des milliers de Camus et des milliers de reportages pas seulement sur la misère en Kabylie entre les deux guerres, mais sur ces charniers d’Algérie où dorment entassées, sans linceuls, des milliers d’innocentes victimes. Dans une totale désinvolture métropolitaine, dans une totale impunité, dans une totale certitude. Car ni Camus, ni les siens, n’oseront une dénonciation, même pour la forme, d’autres s’y sont attelés avec constance, courage et lucidité! Ils méritent également d’être cités au Panthéon. Celui qui reste à ériger, car les victimes de la guerre d’Algérie, dont de nombreux Français de métropole, des juifs et des chrétiens, mais pas seulement, attendent une reconnaissance qui tarde à venir. Hommes et femmes continuent de partir dans un assourdissant fourvoiement chez ceux en charge de l’Histoire.

Un air de repentance 

Quant à Albert Camus, franchement et avec gravité, si ça ne dépendait que de moi, sa place serait en Algérie, car incontestablement, il est algérien à part entière, exagérément pied noir, mais assurément Algérien! Il reste surtout un orphelin qui s’est trompé de peuple, de ce peuple d’Algérie qui aura tant souffert des injustices subies! C’est pour Camus une mémorable méprise. Il faudra attendre le 4 juin 1958 pour qu’un haut dignitaire Français vienne enfin rappeler une évidence. C’est le général de Gaulle, devenu chef de l’Etat, qui après son célèbre « je vous ai compris » ajoutera que « désormais, dans ce pays, il n’y aura qu’une seule catégorie de citoyens, des Français à part entière, avec les mêmes droits et les mêmes devoirs »! C’était 128 ans après l’invasion de l’Algérie et déjà 4 ans après le début de la guerre d’indépendance!De Gaulle nous avait compris, mais c’était trop tard, il y eut 3 ans auparavant, les massacres de Philippeville. Des massacres de trop dans une longue, trop longue série. Des massacres toujours impunis, plus grave, même pas reconnus! Le seul bilan officiel parle invariablement de 1273 victimes indigènes. Et si on posait la question à Camus? On s’aperçoit que finalement, au fil du temps, à mesure que l’oppression se faisait plus tragique et plus sourde, lui avait pris le parti de s’en détacher. Comme atteint par une profonde lassitude. Comme si ses mises en gardes antérieures, toutes empreintes d’une rare lucidité, n’étaient plus d’actualité. C’est pourquoi, pour rester sobre et objectif, il serait fortement indiqué de relire calmement et en toute objectivité, ses contributions antérieures. Elles renseignent à la fois sur l’intelligence du personnage et justifient à postériori son isolement intérieur. On comprend qu’ayant fait l’amer constat d’avoir prêché dans le désert, pour aider ce peuple arrogant à ouvrir les yeux sur la condition infra humaine faite aux 9 millions d’Algériens, lui, Camus, le visionnaire se rangera à l’évidence que plus rien ne pouvait nous sauver du désastre. 
Vaincu par une formidable conspiration, il abdiquera sans gloire et sans espoir. Un insupportable dilemme chez Camus dont la mort prématurée ne serait qu’une divine délivrance d’un cauchemar auquel il était dit qu’il ne survivra pas. Après son silence gêné sur les représailles du Nord-Constantinois, on serait tenté de plier son procès. Mais à la lecture de ses nombreux textes, on peut légitimement se demander si lui, le grand romancier et le frêle humaniste pouvait s’en aller comme si de rien n’était, en laissant les bourreaux plastronner face aux veuves et aux orphelins. 
En fouillant dans ses Chroniques Algériennes, on peut y déceler une singulière attitude qui lui vaudrait de nos jours l’échafaud d’une grande partie de l’establishment parisien; à qui il avait déjà esquissé une réponse cinglante, toute en symbole, mais cinglante :« Faut il donc que ces Français laborieux, isolés dans leurs bleds … soient offerts au massacre pourexpier les immenses péchés de la France colonisatrice ? ».
Alors Camus serait-il enclin à la repentance ? On serait tenté de le croire. A ceux, fort nombreux dans mon pays qui lui reprochent depuis longtemps l’anonymat de l’Arabe de l’Etranger ou l’absence d’indigènes dans son œuvre, qu’ils brandissent comme une preuve irréfragable de l’indifférence de Camus envers le peuple algérien, je leur suggère d’y ajouter les 20.000 victimes expiatoires du Nord Constantinois (1) ! Vingt milles innocents, autant d’anonymes. Tués par l’impériale bêtise d’une France colonisatrice, revancharde, arrogante et sanguinaire. Pour l’auteur de « L’autre homme », ces victimes anonymes pouvaient parfaitement compter parmi «les innocents coupables», l’élégante définition dont il affublera lui-même «Les justes». Il n’osera pas! Pourtant, ces centaines de charniers resteront à jamais la preuve irréfutable de l’ultime « action civilisatrice » de la France colonialiste. Cependant, outre l’occultation officielle de l’étendue des massacres, les historiens buttent sur l’absence de témoignages et de documents de l’époque. 
Il aura fallu le travail remarquable de l’historienne Claire Mauss-Copeaux pour se faire une idée sur l’ampleur des représailles, mais également de la difficulté de leurs auteurs à les assumer dans toute leur horreur. C’est ainsi qu’elle donne un éclairage nouveau à cette tragédie en faisant parler des témoins directs. 
Le résultat est sans appel:« Au cours de nos rencontres, beaucoup reconnaissaient : « On ne vous dit pas tout. » Chacun, en effet, précise ce qu’il peut dire avant de buter et de s’arrêter sur le seuil de l’indicible, cette répression injuste et barbare dont ils ont été les acteurs. Dirigés par leurs chefs, ils ont raflé et massacré de nombreux innocents, en toute connaissance de cause »(7). Des aveux tardifs mais précieux, qui ne peuvent que nous conforter dans notre quête d’une reconnaissance officielle de ses crimes par la France. Après son très inattendu discours du Président Sarkozy à Constantine (2007) il est attendu de la France qu’elle fasse l’effort sur elle-même de reconnaître qu’elle s’est trompée de cibles. Sinon, comment conclure sans citer Camus ? À dessein, j’emprunterai un passage à «l’appel pour une trêve civile en Algérie » (in : Chroniques algériennes, 1939-1958, p.180) qui assurément, ne pourra que relancer le débat : « on ne peut pas nous demander d’applaudir à tous les nationalismes, sauf au français, d’absoudre tous les péchés, sauf ceux de la France» ! (4) 
Comment conclure sans rappeler que ni la langue française, ni aucune autre, n’auront su donner un synonyme au mot orphelin, comme s’il se suffisait à lui-même ! Même un grand écrivain comme Albert Camus n’y pourra rien! Pourtant, à travers l’histoire tumultueuse de notre pays, que de morts impunis et que d’orphelins inconsolables.Pour ceux qui continueront de l’aimer par delà les vicissitudes, c’est sur sa terre natale qu’il devrait s’installer, pour mieux narguer Paris! 
Mort sur une route métropolitaine, en janvier 1960, on ne peut que se demander le pourquoi de son enterrement en cette terre d’exil où il s’est toujours senti « L’étranger ». Camus est l’incarnation de 3 drames, celui de l’orphelin pendant la guerre, celui de la dérive pied noir et celui de la souffrance du peuple algérien dont il n’aura pas réussi à nier ni l’existence ni la justesse des revendications. Pour nous, il sera sans doute un souffre douleur utile, car il incarnera à jamais, mieux que mille combattants et bien plus que cent historiens, la longue souffrance des opprimés qu’il n’aura pas su défendre. Avec un peu de discernement, d’apaisement et de bon sens, il deviendra lui aussi un butin de guerre !

AZIZ MOUATS, MOSTAGANEM LE 17 AVRIL 2010
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Références Bibliographiques
(1) Matthew Connelly, 2012. L’arme secrète du FLN. Comment de Gaulle a perdu la guerre d’Algérie. Médi-Plus éds, Constantine, 2012, Page 118. Ref : 98, Boyd à Murphy, 22 septembre 1955, UNSA, RG 59, Central Decimal Files, 751S.00.


 (2) Marc Ferro, 2003. Le livre noir du colonialisme, édition Robert Laffont, pp. 843.

(3) Sylvie Thénault, 2005. Histoire de la guerre d’indépendance algérienne, éd. Flammarion, pages 47-52.

(4) Albert Camus, 1958. Chroniques algériennes, 1939-1958. Edition Gallimard, pp 125-130.

(5) Yves Courrière, 1968. La guerre d’Algérie, t. II, p. 38, collection » le livre de poche, édition Fayard, 1968. pp. 698.

(6) Albert Camus, 1958. Chroniques algériennes, 1939-1958. Édition Gallimard, pp 133-135.

(7) Gisèle Halimi, 2001. Le lait de l’oranger. Edition Gallimard.

(8) Claire Mauss-Copeaux, 2006. L’insurrectiondu Constantinois, 20août1955. voir site de la LDH Toulon. Lien : [LDH-Toulon]l'insurrection du Constantinois, 20 août 1955, par

(9) Emmanuel Roblès, 1995.Camus, frère de soleil, Seuil, Paris, 1995, pp.110-113.

(10) Edward Saïd, 2000. Albert Camus, ou l’inconscient colonial. Le Monde Diplomatique, avril 2000. 

Les Ouled Riah sont parmi nous

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 ...Nul n'est parfait...je n'ai aucune prétention, je suis un pur enfant du Nord Constantinois...personne ne m'a forcé à venir à Mostaganem...j'y suis venu pour faire des études et retourner dans mon terroir...mais les choses ne se sont pas passés ainsi...à la fin de mes études, alors que j'avais une nomination au Commissariat de mise en valeur du BouNamoussa - Annaba, là où j'ai effectué mon stage de fin d'études, c'est notre cher et regretté HADJ BENABDALLAH BENZAZA, alors Directeur Général de l'ITA qui a tout fait pour me garder auprès de lui en me disant " Bl'a Jeddek ghadi teg3oud tedroub El M3aya el Mes'ha"... 
…avec le temps, j'ai effectivement travaillé de ma main la terre de la famille BENZAZA...avec laquelle je me confonds volontiers... 
…j'ai ensuite connu le regretté Hadj MUSTAFA BENZAZA, l'ex ministre des télécom, celui qui ramena la fibre optique depuis le Japon et la téléphonie numérique de chez Ercikson, le Suédois...par la force des choses, étant très attiré par le milieu culturel, j'ai découvert très tôt le festival du théâtre amateur et j'ai même été ami avec MONSIEUR OULD ABDERRAHMANE KAKI que j'ai connu à la librairie Baraquet de feu Hadj BENSABER KARAKACHE dit Baby...je voudrais juste souligner qu’au départ de Hassan Benaouda de la présidence du Renouveau ( 1997)...lors d'une réunion au siège du Croissant Rouge, au dessus de la SONIPEC ex Bata, c'est Monsieur Djelloul BENDERDOUCHE Pharmacien, ami de FERHAT ABBES et ancien maire de Mostaganem qui m'a demandé de prendre la présidence du RENOUVEAU...proposition qui m'a fait un immense plaisir et que j'ai déclinée pour 2 raisons: -la première est que je ne pouvais pas faire de cumul puisque j'étais Directeur de l'ITA... - et la seconde, c'est que les affaires de la ville, surtout celles qui font appel à une bonne connaissance de la société, doivent être assumées par des ENFANTS DE LA VILLE...et pas des personnes venues d'ailleurs...mais ça c'est une autre culture...ceci étant dit...je me sens très bien à Mostaganem et jamais je ne l'ai trahis....tout le monde ne peut pas en dire autant...y compris parmi ses enfants… 
 
…j'ai été correspondant d'El Watan durant 14 ans...j'ai essayé de donner la plus attrayante image possible de la ville et de toute la wilaya...à travers mes écrits...je suis fier d'avoir sauvé le site de l'ITA pour lequel certains fils de Mostaganem se sont acharné afin de le transformer en centre commercial avec l'appui d'un ancien PAPW et "ancien Moudjahid"...si aujourd’hui plus de 8000 étudiants fréquentent assidument ce site en plein cœur de la Cité, c'est grâce à mon combat solitaire... …je suis heureux d’avoir écris 2 livres sur la culture et les gens de culture de Mostaganem…ce fut pour moi 10 années de labeur intense …mais quel bonheur ! puis, il y a eu cette rencontre avec le Dahra et ses résistances, ses souffrances, ses enfumades et ses richesses…grâce à Mostefa Abderrahmane qui m’u a emmené, c’est moi qui ai sauvé le site des Carrières de Sidi Ali, qui fut un centre de torture durant la guerre de libération nationale…grâce à Madani Beghil et Mostefa Abderrahmane, j’ai pris connaissance des terribles enfumades de Nekmaria…c’est moi seul qui ai pris l’engagement, le 14 juin 2007, devant mon fils Ali et le chauffeur de la commune de Nekmaria qui avait accepté de nous guider jusqu’à la grotte martyre….
 
...c’est moi qui ai interpellé le ministre des Moudjahidines M. Chérif Abbès lors de la commémoration du 19 mars 2012 au niveau du cimetière de Ouled Baroudi…et c’est ce jour là que le ministre a pris la décision de rendre un hommage national aux Ouled Riah…dans la foulée, lorsque M Seddiki Recteur de l’université m’a demandé de prendre en charge l’organisation d’un séminaire sur les Enfumades et les massacres coloniaux, j’ai tout de suite accepté et j’ai fais tout ce qu’il fallait faire pour que cette rencontre soit une réussite…ce jour du 20 juin 2012, lorsque j’ai vu confluer des citoyens de toutes parts, je n’étais pas peu fier de souligner à l’ouverture du séminaire que dans l’auditorium qui porte le nom de mon défunt ami et collègue Mohamed Benchehida que « les Ouled Ryah sont parmi nous »…
..tous le monde s’est alors tourné vers la douzaine de fiers descendants de cette valeureuse tribu venus spécialement de Nekmaria pour assister à cette rencontre… Pourtant, ce jour là, nous étions 3 personnes dans l’auditorium à savoir que les vrais et authentiques Ouled Riah, ceux qui furent enfumés dans la grotte le 19 juin 1845 étaient EFFECTIVEMENT parmi nous…
En effet, la veille du séminaire, grâce à l’entregent d’un enfant de Mostaganem – il est encore en activité, donc je ne dévoilerais pas son identité- une équipe de l’ENTV avait été envoyée depuis le siège d’Alger pour couvrir cet évènement…Il avait été convenu que ce soit un collègue, professeur au département de Français et fils de la région Dahra/Ouarsenis, qui guiderait l’équipe de l’ENTV jusqu’à la grotte… Retenu, mon collègue s’excusa auprès de M. Seddiki qui n’avait d’autre alternative que de me confier la mission…mission que je ne pouvais refuser malgré mes charges pour la simple et bonne raison que j’étais le seul à connaitre les lieux ! Je fis contre mauvaise fortune bon cœur et je me soumets à l’autorité de mon supérieur …j’appelle mes mais des Ouled Riah pour nous attendre sur le site…et nous partons sous un soleil de plomb. Arrivés au douar Ch’karnia, en plein cœur des Ouled Riah, mes amis étaient là avec de l’eau fraiche et des boissons chaudes….nous sortons la caméra et entamons les premières prises de vue…soudain, des enfants du douar viennent m’aborder : « 3ammi Aziz, El bareh D’khlana lel maghara ou sobna l’a3douma » (Tonton Aziz, hier nous sommes rentrés dans la grotte et nous avons trouvé des ossements »). Pendant un temps je suis resté KO debout…Alors que depuis la fin du 19ème siècle, depuis que le géographe Émile-Félix Gautiera visité les grottes en compagnie du petit fils du Khalifa de Nekmaria, personne n’y est rentré…je me tourne vers l’équipe de l’ENTV et leur explique que c’est une occasion HISTORIQUE…très vite nous nous dirigeons vers l’entrée de la grotte…à travers la falaise, car tout était à l’état naturel…seul un sentier très abrupt permet d’arriver au lit de l’oued El Frachih et de remonter ensuite vers la grotte dont le passage est hermétiquement fermé depuis très longtemps…
alors que je les invitais à nous suivre, l’équipe de l’ENTV refusa net de nous accompagner dans l’inconnu…pour ma part, je n’ai pas hésité le moindre instant, avec les trois enfants qui m’accompagnaient je demande où est le passage….qui est tellement étroit que j’ai du me mettre de biais pour passer….la suite tout le monde la connait, je remonte avec des ossements et du linge de corps retrouvé au fond de la grotte sous 20 à 30 cm de poussière et dans une totale obscurité…je vous passe les détails…une fois filmés par la caméra de l’ENTV et pris en photo par mes soins, les restes des martyrs ainsi que les effets remontées de la nécropole sont confiés à mes amis de Nekmaria…recouverts d’un drap propre et mis soigneusement dans une boite…ils seront parmi nous dans l’auditorium lorsque retenti Kassamen…voilà pourquoi je pouvais dire sans sourciller mais non sans une profonde émotion que « Les Ouled Ryah sont parmi nous »…alors, celui qui a eu cet honneur de remonter à la surface des restes de ses compatriotes morts au champ d’honneur…166 ans auparavant, ne doit s’attendre à aucune gratification , ni reconnaissance…car il a été comblé…pourtant, il venait de loin… 
Aziz Mouats Journaliste, Auteur, Université de Mostaganem...
 
 COMMENTAIRES
Benkritly Hadj BelkacemMerci Aziz pour tout ce que tu faits pour nous permettre de nous reaproprier notre histoire...j'étais témoin du séminaire tenu en 2012...c'est ce jour là que j'ai entendu parler des ouleds Riah et des ENFUMADES. . Et depuis 2012 que de chemin parcouru...Bon sang ne saurait mentir ! Dans tes veines court le sang de NOVEMBRE..mon frère. ..
Fadela Ben Benabdeloued
Fadela Ben Benabdeloued...Mr Aziz Mouats nous a permis de connaître jusqu'où pouvait aller le Patriotisme Profond d'une personne aimant son PAYS,...Rien ne l'obligeait à entreprendre ces investigations en ce qui concerne les Ouled Riah ou autre, si ce n'est son Amour pour so...Voir plus
M'hamed Khouidmi
M'hamed KhouidmiBravo si aziz pour ce travail.
Senouci Ouddan
Senouci OuddanJe ne saurai dire combien de fois j ai accompagné Aziz a GHAR FRACHIH, et c est toujours la même émotion, la même ferveur de relater les événements des ENFUMADES à ses nombreux amis et/ou invités. Je vous conseille mes amis à effectuer une visite vous ne le regretteriez pas.
Boualem Rais
Boualem RaisChacun son travail ...!...c'est pas fini ...
Djaâfar Bensalah
Djaâfar Bensalahdigne héritiers des oeuled rayah aziz
Mohammed Tahar
Mohammed TaharEsperrons que d'autres aurons a coeur de deterer d'autres ouelad riah a travers le pays et ils sont nombreux et repertoriés par ceux la meme qui ont commis ces atrocitès.
Alors a tous nos chercheurs le chantier est immense mais si valorisant.
Mohammed Beghdad
Mohammed BeghdadTrès émouvant mon cher Aziz.
Art Nej
Art NejÇa fait tomber des larmes...tu es un grand AZIZ!
Canalhistorique Rcd
Aziz Mouats
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Les chemins du patriotisme sont parsemés d’embûche

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Alors que je m’apprêtais à aller déposer une gerbe de fleurs à l’entrée de la grotte de Ghar El Frachih, à l’occasion du 171ème anniversaire des enfumades des Ouled Riah, je lis sur mon mur le message suivant émanant de Monsieur Ali Farid Belkadi…à qui j’avais posté la veille l’enregistrement de l’entretien de Brahim Senouci sur la radio BEUR FM…entretien dans le quel Brahim Senouci restitue avec la rigueur qui le caractérise, les péripéties ayant abouti à la découverte des cranes de nos valeureux combattants et dont il attribue nommément la paternité à Ali Farid Belkadi...je pensais très naturellement que cette histoire de préséance et de paternité n’avait plus de raison d’être, d’autant que l’essentiel était codifié parfaitement et de manière chronologique irréfutable par les médias et par les écrits…moi qui croyais très sincèrement que la controverse n’avait aucune raison d’être, voilà que Ali Farid Belkadi relance la diatribe en des termes insoutenables et totalement injustifiés et injustes…tout en me demandant de me tenir à l’écart… 
…c’est bien mal me connaitre et surtout douter de la solidité de mes liens, des mes amitiés et de ma capacité de discernement toute paysanne…je vous livre pour lecture les deux écrits échangés entre le Chercheur Primo Découvreur des cranes des combattants algériens du Musée de l’Homme de Paris et ma modeste personne signataire de la pétition et ami incorrigible de tous les patriotes et donc du plus valeureux d’entre nous…l’universitaire, chercheur, auteur et intellectuel Brahim Senouci…
 
Le Message de Ali Farid Belkadi
“J'ai écouté l'émission, ton ami est ignoble c'est le moins que l'on puisse écrire , je n'ai pas trouvé "par hasard" ces têtes du Muséum de Paris, selon ce fumiste j'aurai trouvé par hasard ces têtes, alors que j'ai remué ciel et terre, les autorités français, depuis Sarkozy, le président du MNHN , Guiraud, Froment, Mennecier. J'ai passé des mois à rechercher et à les retrouver ces restes mortuaires, j'ai les lettres du Museum, les ecvhanges de émals. Ceci les responsables Froment et Mennecier du MNHN peuvent en témoigner. L'historien Gilles Manceron que j'ai rencontré aussi, à l'époque aucun Algérien ne s'est jamais manifesté ni pour me soutenir, ni pour m'aider en quoi que ce soit. J'ai passé 3 années à écrire le livre, qui raconte aussi bien Zaatcha que la plupart sinon tous les cherifs et leurs insurrections. Je me souviens de Brahim Zitouni, simple signataire de ma pétition au mois de mai 2011, qui m'a écrit , à l'époque il s'informait de mes écrits. Voilà qu'il tente de récupérer totalement mes travaux en slalomant sur le siège Zaatcha. L'histoire n'est pas faite de bagout. Je lui propose un débat à ce fumiste, sur Beur-FM, puisqu'il veut se faire un nom. L'enregistrement dénote ce que tout le monde sait, c'est une basse saloperie ton pote mon ami. La Palestine qu'il prétend défendre est mal barrée avec un type pareil”.

La réponse de Aziz Mouats
“ Toujours aussi excessif, toujours aussi vindicatif...à mon avis tu fais un mauvais procès à Brahim Senouci...et tu l'accuses à tort...son souci premier était de continuer le travail que tu avais entamé...la pétition que tu as initiée n'ayant pas abouti...fallait-il en rester là? ou devrions-nous engager une autre pétition? Brahim Senouci et ses nombreux amis ont en décidés autrement...ICI PERSONNE ne cherche à s'attribuer tes travaux...travaux qui sont consacrés à travers les médias et dans les cercles d'initiés...je pense que Brahim a commis une seule erreur, celle de ne pas t'avoir demandé l'autorisation d'utiliser tes photos...en universitaire accomplis et cartésien, en humaniste convaincu, en chercheur éprouvé et en intellectuel droit dans ses bottes et fort de ses convictions, il continuera son action jusqu'au bout...et nous sommes des milliers à le soutenir et à le suivre aveuglément... Ton attitude est pour le moins sournoise...car ce que tu souhaites et exiges c'est qu'il t'attribue la paternité de "Sa Pétition"- devenue par la force des choses NOTRE Pétition- sous prétexte que la tienne - qui 'n'avait malheureusement pas aboutie, lui est antérieure...j'avoue que ta démarche m'a interloqué...d'abord parce qu'elle n'est en rien rationnelle et ensuite parce que tu emploies des termes qui n'ont pas leur place entre gens de si agréable compagnie...Quant à l'engagement de Mon Ami aux cotés du combat légitime des Palestiniens, je t'oriente vers les sionistes d’Israël et de France...ils te donneront la réponse la plus cinglante...comme je ne suis pas un affidé des noms d'oiseaux que tu utilises sans vergogne et à l'encontre d'un collègue et d'un ami irréprochable à tous points de vue...je te demande de revenir à de meilleurs sentiments et de retrouver la raison et le bon sens...puisque tu me demande de rester à l'écart, je te dis très froidement, que je défendrais mon ami jusqu'à ce que mort s'en suive...car le sang de ses parents et celui de ma famille se sont mêlés pour délivrer ce pays de l'asservissement colonialiste...il n'est pas question que le dépositaire malgré lui d'un tel lignage se taise lorsque son frère de sang et de justice se trouve injustement attaqué...fut-il par un universitaire de ton calibre...
...enfin, un ultime rappel, bien que je doute de son effet- il s'agit de faire revenir au pays des restes dont la symbolique du combat devrait nous inciter à la plus simple des humilités...celle de se taire lorsque la Nation se réconcilie avec son histoire et ses braves chouhada”... 
 
Mostaganem le 19 juin 2016,
171 ans après les enfumades de Ghar El Frachih, Nekmaria, Algérie

Commentaires

Ali Farid Belkadi
Ali Farid BelkadiTu fais partie de la horde mon ami. Noble d'origine par mes ancêtres je suis au dessus de la mêlée. Je suis redoutable dans le propos, mais le problème n'est pas avec toi, je ne me trompe jamais de cible. A propos de ta rengaine nationaliste, je te l'ai déjà dit : Enfant j'ai connu le Centre de Tri de Béni-Messous et la Villa Sesini. Ali Farid Belkadi
Aziz Mouats
Aziz Mouatsça n'est ni le moment ni le lieu pour faire étalage de ses lignages ou des ses convictions...il s'agit juste de se serrer les coudes et d'avancer sans blesser quiconque...tous le monde sait qui tu es et d'où tu viens...juste un petit chwya d'humilité..ça ne fera de mal à personne...et surtout respecter son prochain et son voisin sans haine et sans outrance...
Ali Farid Belkadi
Ali Farid BelkadiJe ne comprends pas, tu parles de : "sang de ses parents et celui de ma famille se sont mêlés pour délivrer ce pays de l'asservissement colonialiste" et tu me demandes de ne pas parler du sang des miens, du sang de mon lignage, mon ancêtre Roi d'Alger est mort Moudjahid , il a été décapité à Thénia en 1527, en voulant libérer Alger du joug des turcs, son mausolée détruit par le tremblement de terre de Boumerdés n'a jamais été reconstruit par les autorités. Il reste quelques pierres livrés à l'abandon et aux chacals, çà aussi c'est de l'histoire.
Aziz Mouats
Aziz MouatsLe sang de tous les Chouhada se déverse dans un seul fleuve...celui du patriotisme...c'était pour te signifier que nos liens sont très anciens et très puissants puisque tissés dans le sacrifice pour le combat libérateur...à ce titre, je t'invite à etre moins impulsif et surtout le moins insultant possible et si tu as des choses à faire valoir, recours à la justice et pas à l'invective et à l'insulte...ça me choque et ça fait très mal...te rends-tu compte du mal que tu fais? tout ça pour un simple égo...reviens à la raison...surtout que tu te dis descendant d'un lignage royal...
Hamoud Zitouni
Hamoud ZitouniQuand la cupidité se confond avec l'aveuglement cela génère l'outrance de la vanité et le langage odieux. Jamais l'histoire de notre pays n'a connu ce genre de tentative de hold-up aussi vile. Je retiens avec un certain amusement que la colère enfant gâté provoque un télescopage de noms. Je reste écœuré devant l'infamie et le langage ordurier bien révélateurs
Saci Belgat
Saci Belgatun pugilat de coqs du village-
Hafid Mouats
Hafid MouatsJ'invite M Aziz Mouats et M Ali Farid Belkadi à se calmer un peu et revenir à la sagesse. Vous êtes la bonne élite intellectuelle du pays, vous être patriotes pourquoi " des tirs amis", ou des tirs sur de bons alliés, puisque vous militez pour les bonnes causes et qui sont communes à vos convictions, comme par exemple le retour au pays de ces crânes, que les étudiants français utilisent pour leurs études. Ne pas nous décevoir chers amis, on a besoin de vos énergies, les temps futurs sont difficiles et on a besoin des éclairés pour nous guider. Pour les autres commentateurs , prière de ne pas compliquer les choses, Aziz et Farid sont mes modèles. Da3wa a3wacher comme disent nos sages, laissez l'orage passer chers respectables Messieurs.
Hafid Mouats
Hafid MouatsHamoudi Zitouni et Saci Belgat, bechouiya men fadlokom, nos enfants sont sur facebook aussi, ils ne doivent par prendre une autre image sur nous les adultes, laissons Farid et Aziz s'expliquer publiquement ou en privé, j'ai confiance en eux, ils vont trouver un terrain d'entente, car ce sont des gens biens.
Ali Farid Belkadi
Ali Farid BelkadiTu te trompes ya Saci Belgat,il s'agit d'une simple mise au point
Aziz Mouats
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Hamoud Zitouni
Hamoud ZitouniJe n'ai aucun problème avec Aziz. Il le sait très bien. Je n'ai fait que donner mon opinion sur une sorte de hold up éhonté de faits de notre histoire connus de puis très longtemps déjà qu'on ose en faire, odieusement, sans sourciller une "invention" propre. Il ne reste que le "dépôt légal" et le brevet sur les cadavres de personnages illustres de notre histoire !!!! Le patriotisme sincère de mon ami Aziz en particulier et celui des signataires de la pétition (que j'ai signé sans hésiter) en général fait l'objet d'une infâme récupération par un chasseur de titres usurpés ! Dans cette lancée, qui va s'approprier de la "trouvaille" ou la " découverte" ou_ pire encore_ "l'invention" des cendres d'Amirouche et El haouès, des ossements de Zoulikha OUDAI la Chercheloise, ceux du père de Aziz MOUATS et des centaines de milliers de martyrs de la cause nationale morts sans sépulture dans leur propre pays ou dans le lointain exil ? Non ce n'est pas un combat de coq comme le qualifie maladroitement mon ami Saci. Je le vois comme un combat de la dignité contre l'imposture. Et cela concerne tous les citoyens qui aiment leur pays et respectent ceux qui ont écrits les pages glorieuses de son Histoire.
Saci Belgat
Saci Belgatle combat de coq du village , tu n'as rien compris à mon propos , à moins que tu le déformes pour!!!!! - il s'agit de ce malheureux combat entre les 2 protagonistes, l'un qui revendique la paternité de la découverte , l'autre qui (maladroitement) engage une pétition en oubliant de signaler qu'une autre personne l'avait fait avant et qui s'envoient des noms d'oiseaux - sinon sur le reste je suis entièrement d'accord. Je ne fais que regretter ce malheureux pugilat qui ne passera pas inaperçu chez les geôliers des restes de martyrs. STP Hamoud, la prochaine fois essaie de faire attention dans tes commentaires- ça commence à déborder -
Hamoud Zitouni
Aziz Mouats
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Aziz Mouats
Aziz MouatsDésolé Saci, sois tu fais fausse route, sois tu n'as rien compris, soit tu fais exprès...sois c'est Ramadhan qui parle pour toi...je ne vois pas pourquoi et dans quel pays, quelqu'un qui monte une pétition devrait preter allégeance à toutes les autres pétitions...ç ressemble à un prêche du samedi...3an Abi Sofiane, 3an abi Houreyra, 3an El Boukhari, 3an Muslim...
Hamoud Zitouni
Hamoud ZitouniJe crois bien qu'il a les neurones bien brouillés notre amis commun.
Aziz Mouats
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Hafid Mouats
Hafid MouatsJe pense que rien n’empêche à d’autres personnes, d’autres associations ou autres organismes de prendre le train en marche pour une bonne cause , une pétition a été lancé en 2011, une autre en ce moment, peut être que c’est la bonne opportunité et tant mieux… si elle a été bien relancé et avait encore ramené du concret, l’essentiel est que les choses ont bougé dans le bon sens. Non... dans cette houleuse polémique que j'ai suivi depuis avant hier , je vois qu'il y a des dessous dans tout ça, je pense à des règlements de compte sur fond idéologique. Surtout de la part de ceux qui utilisent le langage de l’invective ( et il y en a dans cette polémique qui n'est pas sereine du tout), de la part des incendiers et de ceux qui remuent les plaies datant du 15é siècles, allons tout ça ce n'est pas du sérieux.
Aziz Mouats
Aziz MouatsBaraka Allah fika ya Oustedh Hafid Mouats...
Aziz Mouats
Votre réponse...

Hafid Mouats
Hafid MouatsVoici un commentaire plein de bon sens et de sagesse et qui va dans mon optique, de la part d'un internaute sur cette polémique qui ne devait pas avoir lieu normalement : "Regaiguia Rachid: "Il n’y a pas un seul algérien qui ne reconnait pas à Monsieur Ali Farid Belkadi le mérite d’avoir alerté en 2011 sur l'existence de restes mortuaires, des crânes secs pour la plupart, des premiers chouhadas, au Muséum national d’histoire naturelle de Paris et d’avoir lancé une pétition en ligne appelant les autorités algériennes à entreprendre auprès de l’Etat français, les démarches nécessaires» au rapatriement en Algérie de ces restes mortuaires.
Cela n’empêche personne d’entreprendre une initiative dans le même sens que la première ; Monsieur Ali Farid Belkadi n’a-t-il pas espérer « qu’un homme politique estimable ou quelque député exemplaire, cela existe, se manifesteront dignement, à titre officiel, afin que les morceaux du corps de ces héros nationaux authentiques soient rapatriés » ?
Tout un chacun ne doit que se réjouir : l’initiative de Monsieur Brahim Senouci à répondu bien à ce vœu et elle a fait bouger les choses : notre ministre des moudjahidine n’a-t-il pas affirmé : «L’Etat va rapatrier les restes de résistants algériens» ?"
Merci Monsieur Ali Farid Belkadi, merci Monsieur Brahim Senouci.
Aziz Mouats
Aline Lancel
Aline LancelParce qu'il aurait été le premier à alerter sur la présence des crânes de résistants algériens au muséeum de Paris, m.belkadi autoproclamé " découvreur " (sic) de ces restes, prétend avoir un regard sur toutes les actions qui tournent autour de "sa découverte". Il semble suggérer que cette cause (récupérer et rapatrier les restes de ces résistants) est son monopole, sa propriété et qu'il faudrait le citer comme on citerait un scientifique qui aurait mis au jour un grande découverte ou un penseur qui aurait développer une thèse révolutionnaire... En lisant son message ci-dessus, j'ai du mal à croire que ce monsieur est un chercheur. J'ai signé et fait circuler la pétition lancée par Brahim Senoussi sans me soucier de savoir qui le premier a lancé l'affaire, l'essentiel étant de faire bouger les institutions - ce que cette dernière pétition semble avoir atteint - en Algérie et en France pour rapatrier les restes de nos résistants. Et tant pis pour l'ego de m.belkadi
Hamoud Zitouni

Hamoud ZitouniVous avez bien résumé l'objet de cette polémique et ses non dits. Je viens de de constater que le gouvernement algérien ne semble pas insensible à cette affaire. Je vous en donne le lien : http://www.jeune-independant.net/Les-37-cranes-de...
L’affaire de la restitution des 37 crânes de résistants algériens du début de la colonisation française, dont les restes mortuaires (...)
jeune-independant.net

Un Kennedy à Nekmaria

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En cette belle et heureuse journée du 6 juillet, je lis sur mon mur un message de l’historien et homme de culture Hosni Kitouni Hosni...très interpellatif, quoi de plus normal pour un chercheur méticuleux et besogneux jusqu’à l’outrance...Comment rester insensible à ce texte d’une grande intelligence et d’une rare générosité? Du coup, le crayon se libère et entraine avec lui une mémoire presque délirante...par tant d’émotions...émotions nourries par les messages d’une précieuse fraternité que ceux délivrés coup sur coup par feu le Président Kennedy et sa fille Carole...à 52 ans d’intervalle...moulés dans la même argile de la spontanéité, de la générosité et de la profonde et sincère reconnaissance de nos luttes libératrices...alors, ces liens tissés dans la profondeur de nos histoires respectives ne peuvent en rester là...ici, une autre contribution et un autre rappel de notre besoin de mémoire...

Le message de Kitouni Hosni

Merci Si Aziz Mouats, de tenir haut levé l’emblème de nos sacrifices et de nos souffrances, de nos espérances aussi. Merci de rappeler à chaque fois qu'il est nécessaire que le martyr de nos pères, nos frères ne partira pas en vain.Nos enfants et les enfants de nos enfants en leur mémoire vive porteront, telle la braise en l'âtre, le feu sanglant de nos morts. Merci d'être présent , debout face à la racaille, aux oublieux, aux miséreux aux restes d'indigènes, aux indigents de la mémoire. Merci d'écrire, de parler, de tonner puisque tel est notre devoir ! Et Aid Moubarak !
 

L’accusé de réception de Aziz Mouats

Bonjour Oustedh Kitouni Hosni...saha aidkoum el moubarek...surtout que cette année, grâce à Dieu le tout puissant, les commémorations se sont entrechoquées...faisant coïncider les instants de méditations avec les moments de mémoire...cette mémoire qui nous bride et que nous portons en nous sans jamais geindre, sans jamais feindre, sans jamais faillir...oui cher Hosni nous sommes la partie vivante de notre histoire...et à chaque fois que l'on me fait le reproche, je demande le remède " fa Hell mine tabib?"...et là, du coup plus personne n'ose parler pour nous délivrer...lorsque par un incroyable concours de circonstances, le 19 juin 2001, je rentre dans la grotte de Ghar El Frachih...et pendant que ma sueur irriguait les parois calcinées de la grotte, qu'elle se noyait dans une épaisse couche de poussière, poussières d'argile et de gypse mais aussi et surtout poussières d'Hommes, de Femmes et d'Enfants....et alors que je tournais dans une épaisse obscurité, mon esprit s'était comme arrêté...car là, sous mes pieds et bientot dans mes mains, je recevais l'histoire dans toute sa tragédie...je me confondait avec ces restes humains que je croyais à jamais disparus...ce sont les Ouled Riah qui m'ont invités dans leur ossuaire, dans leur histoire, dans leur vie...je ne sais pas si beaucoup d'hommes ont été soumis à rituel, mais je sais combien il est très lourd à porter...j'ai alors pris conscience que c'est à travers moi que les Ouled Riah, cette tribu Martyre, rebelle et héroïque au-delà de tout entendement qu'elle a décidé de livrer encore bataille sans jamais faillir...c'est une mission ô combien honorable que d'avoir à porter cette tragédie à travers les 166 ans de silence soutenu...pour moi, le petit Berbère de la Kabylie Orientale, à 10 ans d'age, j'ai dû bien malgré moi ramasser les corps décharnés des frères Brahim et Rabah Khalfa, que les vautours et la hyène se disputaient alternativement...pour leur creuser avec mes bras d'écolier frêle et insouciant, un sillon, un simple sillon en guise de tombe...de voir ces deux grands gaillards, dont le plus âgé était marié à ma tante avec laquelle il avait déjà une bonne demi douzaine d'enfants se consumer au soleil et constater de très près comment leurs corps jadis si friands de vie se transformaient en une masse noire en l'espace d'une semaine - le passage vers nos terres étant alors réglementé et scrupuleusement observés en raison de l'interdiction ordonnée par l'armée d'occupation qui surveillait du haut de ses guérites tout mouvement suspect vers la mechta en ruine- puis c'est probablement au bout de 15 jours que nous avons ‘Cha¨ba Nouaria, née Rouana, épouse de feu Saïd Mouats, constaté que les corps étaient devenus la proie des rapaces et des charognards...ce fut pour moi un apprentissage à la fois douloureux et réparateur...mais enterrer des restes humains décharnés, faire le décompte des os n'est point une sinécure...pourtant s'il fallait bien que quelqu'un le fasse c'était moi...je me souviens toujours de cette odeur très caractéristique des cadavres d'humains...je l'ai côtoyée de si près, dans la plus profonde intimité...sans gants, sans linceul, et presque sans peur...j'avais à peine 10 ans...
C'est cette même sensation que j'ai ressentie 50 ans plus tard, dans le cimetière collectif des Ouled Riah...alors quoi dire ? sinon que c'est là mon destin...je le vis au jour le jour...avec bien entendu en mémoire cette colonne des 23 membres de ma famille enlevés par l'armée Français de répression et dont les corps ont très certainement subis le même sort que celui des Frères Khalfa et de celui de milliers de nos martyrs...nul n'échappe à son destin, et le mien est si particulier que j'ai appris très tôt à m'en accommoder...
...vois-tu mon cher Hosni, en ces jours d'allégresse feinte, il aura fallu que des amis, des frères en patriotisme, des compagnons des jours sombres et des nuits de gloire en viennent à me pousser dans mes derniers retranchements, au point de venir secouer ma mémoire pour lui faire cracher ses douleurs que l'on croyaient à jamais enfouies...rien n'est plus précieux que la mémoire, c'est pourquoi on ne peux la partager qu'avec ceux et celles qui en savent les servitudes et les vicissitudes...comme toi, comme mes cousins Allaoua Bendif ou Hafid Mouats...ou mes amis Brahim Senouci ou Senouci Ouddan avec qui je partage tant de douleurs et tant de tragédies...un jour, à Guerdjoum...sur les ruines de la ferme des Senouci...j'apprends que c'est dans cette terre isolée que le grand père et le grand oncle de Brahim Senouci et de Bachir, son frère ont été ensevelis vivants dans une "Matmora"...sans me contrôler, je me suis mis à hurler ma douleur...parce que ici aussi, dans ces belles contrées des Medjadja, à mi chemin entre Mascara et Sfisef, la France sanguinaire a commis l'irréparable...alors, avec mon stylo à deux sous, instinctivement, je me libère de cette angoisse et de cette douleur...écrire est pour moi la plus grande thérapie...je me soigne de cette douleur en racontant celle des autres...car ils sont bien plus valeureux que nous...eux sont allés au bout du sacrifice...lorsqu'on parle du nombre de victimes -hier encore Allaoua Bendif parlait de 15 millions d'Algériens morts du fait de l'occupation française de notre pays-, d'aucuns se plaisent à chicaner comme s'il s'agissait d'un simple exercice de comptabilité...il se trouve qu'à chaque fois ce sont nos morts dont il s'agit...je ne comprends pas pourquoi on se mettrait du jour au lendemain à nous laisser entrainer dans ce jeu macabre...il s'agit de nos morts, de notre martyre...et nous n'en tirons ni honte ni fierté...oui en parler, le plus longtemps possible, autant de fois que nécessaire et même plus en cas d'affinités, ça aide à comprendre et surtout à ne jamais oublier...que sur cette terre, un peuple a subit l'irréparable...lorsque j'ai visionné les messages adressés à 54 ans d'intervalle par John Fitzgerald Kennedy, alors Président des Etats-Unis et par sa fille Carole Bouvier-Kennedy, ambassadeur des USA à Tokyo, capitale de l'impérial Japon, je suis encore ému...et pour l'éternité...
Alors me reviens sans cesse la question: pourquoi donc ce pays dont la bravoure et les sacrifices sont cités en exemple, ne sait pas reconnaitre les siens et encore plus douloureux ne fait rien pour honorer ses amis...qui empercherait cette Nation que les Kennedy cite en exemple d'ériger une stèle sur le site des Ouled Riah comme le souhaite Salah Rahmani, l'ex SG du ministère des Moudjahidines, donc de la mémoire nationale...et d'y graver dans la pierre ou le marbre du Filfila ( Maison Blanche et Capitole) l'effigie du Président Kennedy, aux cotés de celles de l'Emir Abdelkader, de Mohammed Benabdallah dit Bu Maza, du Petit Omar, de Hassiba, de Djamila...qui? fa hell min tabib*? Aziz Mouats
*: Y’a-t-il un Toubib? traduire par “Y-a-t-il un remède?”
Mostaganem le 6 juillet 2016
Aziz Mouats

Ni repentance, ni guerre des mémoires

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 Cette prise de positions est à l'honneur de ceux qui l'ont signée, ce sont des Historiens, des Chercheurs et des universitaires connus pour leurs travaux méthodiques et sérieux et aussi pour leur probité intellectuelle...qu'ils en soient éternellement remerciés...car l'histoire ce sont souvent les criminels hélas qui la font, mais ce sont les intellectuels et les savants qui la rendent moins tragique...juste en témoignant...et en rapportant les faits dans toute leur cruauté...et la France coloniale a été très cruelle...il est bon, pour l'apaisement des consciences que des gestes de ce genre rappellent tout un chacun à son devoir de mémoire...Aziz Mouats

 

En mai 2011, l’archéologue et historien algérien Ali Farid Belkadi lançait une pétition « pour le rapatriement des restes mortuaires algériens conservés dans les musées français », en particulier les crânes de résistants algériens tués par le corps expéditionnaire français dans les années 1840 et 1850, qu’il venait de retrouver dans les réserves du Musée de l’homme à Paris.

Alors que cet appel était lancé un an après le vote, par le Parlement français, d’une loi exigeant la « restitution [à la Nouvelle-Zélande] de toutes les têtes maories détenues en France », il n’a eu malheureusement que très peu d’écho. En mai dernier, l’universitaire et écrivain algérien Brahim Senouci a lancé un nouvel appel pour que soient restituées les« têtes des résistants algériens détenues par le Musée de l’homme », afin que leur pays les honore, avec cette fois un écho nettement plus large.

Il nous a paru important de le relayer en rappelant la raison de la présence dans un musée parisien de ces restes mortuaires, à partir de l’histoire de l’un d’entre eux : le crâne du cheikh Bouziane, chef de la révolte de Zaâtcha en 1849, écrasée par une terrible répression, emblématique de la violence coloniale.

Un siège de quatre mois

En 1847, après la reddition d’Abd-el- Kader, les militaires français croient que c’en est fini des combats en Algérie après plus de dix ans d’une guerre de conquête d’une sauvagerie inouïe. Mais, alors que le danger était surtout à l’ouest, il réapparaît à l’est début 1849, dans le Sud-Constantinois, près de Biskra, où le cheikh Bouziane reprend le flambeau de la résistance. Après des affrontements, il se retranche dans l’« oasis » de Zaâtcha, une véritable cité fortifiée où, outre des combattants retranchés, vivent des centaines d’habitants, toutes générations confondues.



« Le cheikh Bouziane reprend le flambeau de la résistance. Après des affrontements, il se retranche dans l’« oasis » de Zaâtcha, une véritable cité fortifiée où, outre des combattants retranchés, vivent des centaines d’habitants, toutes générations confondues ».
Le 17 juillet 1849, les troupes françaises envoyées en hâte entament un siège, qui durera quatre mois. Après un premier assaut infructueux, l’état-major prend la mesure de la résistance et envoie une colonne de renfort de plus de 5 000 hommes, commandée par le général Émile Herbillon (1794-1866), commandant de la province de Constantine, suivie d’une autre, des zouaves dirigés par le colonel François Canrobert (1809-1895). Deux officiers supérieurs, plusieurs milliers d’hommes contre une localité du grand sud algérien, deux décennies après la prise d’Alger : la résistance algérienne était d’une ampleur et d’une efficacité exceptionnelles.
Le 26 novembre, les assiégeants, exaspérés par la longueur du siège, voyant beaucoup de leurs camarades mourir (des combats et du choléra), informés du sort que les quelques Français prisonniers avaient subi (tortures, décapitations, émasculations…), s’élancent à l’assaut de la ville. Chaque maison devient un fortin, chaque terrasse un lieu d’embuscade contre les assaillants. Après d’âpres combats, au cours desquels les Français subissent de lourdes pertes, le drapeau tricolore flotte sur le point culminant de l’oasis.
Deux ans plus tard, Charles Bourseul, un « ancien officier de l’armée d’Afrique » ayant participé à l’assaut, publiera son témoignage : « Les maisons, les terrasses sont partout envahies. Des feux de peloton couchent sur le sol tous les groupes d’Arabes que l’on rencontre. Tout ce qui reste debout dans ces groupes tombe immédiatement sous la baïonnette. Ce qui n’est pas atteint par le feu périt par le fer. Pas un seul des défenseurs de Zaâtcha ne cherche son salut dans la fuite, pas un seul n’implore la pitié du vainqueur, tous succombent les armes à la main, en vendant chèrement leur vie, et leurs bras ne cessent de combattre que lorsque la mort les a rendus immobiles. ». Il s’agissait là des combattants.

Destruction méthodique

Or, l’oasis abritait aussi des femmes, des vieillards, des enfants, des adolescents. La destruction de la ville fut totale, méthodique. Les maisons encore debout furent minées, toute la végétation arrachée. Les « indigènes » qui n’étaient pas ensevelis furent passés au fil de la baïonnette.
Dans son livre La Guerre et le gouvernement de l’Algérie, le journaliste Louis de Baudicour racontera en 1853 avoir vu les zouaves « se précipiter avec fureur sur les malheureuses créatures qui n’avaient pu fuir », puis s’acharner : « Ici un soldat amputait, en plaisantant, le sein d’une pauvre femme qui demandait comme une grâce d’être achevée, et expirait quelques instants après dans les souffrances ; là, un autre soldat prenait par les jambes un petit enfant et lui brisait la cervelle contre une muraille ; ailleurs, c’étaient d’autres scènes qu’un être dégradé peut seul comprendre et qu’une bouche honnête ne peut raconter. Des procédés aussi barbares n’étaient pas nécessaires, et il est très fâcheux que nos officiers ne soient pas plus maîtres en expédition de leurs troupes d’élite, qu’un chasseur ne l’est d’une meute de chiens courants quand elle arrive avant lui sur sa proie. »
D’après les estimations les plus basses, il y eut ce jour-là huit cents Algériens massacrés. Tous les habitants tués ? Non. Le général Herbillon se crut obligé de fournir cette précision : « Un aveugle et quelques femmes furent seuls épargnés ». Le pire est que la presse française d’alors reprit ce rapport cynique.

Fusillés puis décapités

Il y eut trois autres « épargnés »… provisoirement. Les Français voulurent capturer vivant – dans le but de faire un exemple – le chef de la résistance, le cheikh Bouziane. Au terme des combats, il fut fait prisonnier. Son fils, âgé de quinze ans, l’accompagna, ainsi que Si-Moussa, présenté comme un marabout. Que faire d’eux ? Ces « sauvages » n’eurent pas droit aux honneurs dus aux combattants.
Le général Herbillon ordonna qu’ils soient fusillés sur place, puis décapités. Leurs têtes, au bout de piques, furent emmenées jusqu’à Biskra et exposées sur la place du marché, afin d’augmenter l’effroi de la population. Un observateur, le docteur Ferdinand Quesnoy, qui accompagnait la colonne, dessina cette macabre mise en scène qu’il publia en 1888 dans un livre, témoignage promis à un certain avenir
Que devinrent les têtes détachées des corps des combattants algériens ? Qui a eu l’idée de les conserver, pratique alors courante ? Où le furent-elles et dans quelles conditions ? Quand a eu lieu leur sordide transfert en « métropole » ? Cela reste à établir, même si certaines sources indiquent la date de 1874, d’autres la décennie 1880. Il semble certaines d’elles aient été d’abord exposées à la Société d’anthropologie de Paris, puis transférées au Musée de l’homme. Elles y sont encore aujourd’hui.
Soutenir les appels de citoyens algériens à rapatrier ces dépouilles dans leur pays, pour leur donner une sépulture digne comme cela fut fait pour les rebelles maori ou les résistants kanak Ataï et ses compagnons (en 2014), ne revient aucunement pour nous à céderà un quelconque tropisme de « repentance » ou d’une supposée « guerre des mémoires », ce qui n’aurait strictement aucun sens. Il s’agit seulement de contribuerà sortir de l’oubli l’une des pages sombres de l’histoire de France, celles dont l’effacement participe aujourd’hui aux dérives xénophobes qui gangrènent la société française.

Les signataires:  

Pascal Blanchard historien ; 

Raphaëlle Branche, historienne ;  

Christiane Chaulet Achour, universitaire ;  

Didier Daeninckx, écrivain ;  

René Gallissot, historien ; 

François Gèze, éditeur ; 

Mohammed Harbi, historien ;  

Aïssa Kadri, sociologue ; 

Olivier Le Cour Grandmaison, universitaire ;

 Gilles Manceron, historien ;  

Gilbert Meynier, historien ;  

François Nadiras, Ligue des droits de l’homme ;  

Tramor Quemeneur, historien ;  

Malika Rahal, historienne ;  

Alain Ruscio, historien ; 

Benjamin Stora, historien ;  

Mohamed Tayeb Achour, universitaire.

En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/idees/article/2016/07/09/les-cranes-de-resistants-algeriens-n-ont-rien-a-faire-au-musee-de-l-homme_4966904_3232.html#pUVzOAvRjxXhityX.99

La Derdara et l'imposture

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 Pèlerinage estival sur les terres de l'Emir Abdelkader...passage obligé sous la Derdara, le frêne sous lequel l'Emir Abdelkader a reçu l’allégeance des tribus...le lieu ne manque pas de sobriété...cependant, j'y ai relevé quelques incongruités ...qui m'ont très fortement impacté...encore une fois, ce lieu chargé de notre mémoire collective et ô combien symbolique aura été livré à une stupide méprise...


Je rentre à l'instant de la Derdara...c'est le frêne sous lequel a été sacré l'Emir Abdelkader...il a pris un coup de vieux...c pas de sa faute...des petits génies " dans le sens étymologique indigène" se sont installés tout autour...on dirait une manif...avec des pancartes...signées...ça fait très bazar ...j'ai pas osé retenir des noms...si insignifiants, comme celui d'ancien président de la RADP qui fut chassé par ceux qui l'ont mis au pouvoir, ses postes d'Oujda...après un long séjour dans une sombre caserne, une fois remis à l'air libre il est passé...ce qu'il ne fit point durant sa dictature suprême- normal il n'avait pas bcp de temps avec les hammams qu'il gérait avec rigueur pour faire fondre la graisse à de vrais patriotes...il y avait aussi des anciens chef de la PN...dont un barbu ramené depuis le fringant Sersou par celui qui s'est présenté comme étant le redresseur révolutionnaire en chef...c'est dire si la révolution avait besoin de forgerons...la suite...avec les photos de ceux qui étaient en pèlerinage avec moi - Brahim Senouci et Senouci Ouddan- dans les quartiers premiers de l'Emir Abdelkader...dans cette fertile et verdoyante plaine de Ghriss, une Mitidja haut perchée, qui mériterait qu'on lui recharge sa nappe....y compris avec l'eau du Bouhanifia, du Fergoug envasé et pourquoi pas celle du MAO...



C'est, là où, avec ses fidèles, l'Emir Abdelkader O/Mahieddine entama la résistance contre la guerre de conquête de notre si beau et si chaud pays...une chose est sure, autour du vieux frêne , on a rien trouvé de mieux à faire que de laisser des apprentis dirigeants en mal de reconnaissance et surtout de légitimité se prêter à un curieux cérémonial: planter un frêne autour de la Derdara...et pourquoi donc? je me suis dis que peut être c'était en prévision d'une éventuelle Moubaya3a? et j'ai enfin compris pourquoi ce pays est si mal géré...à chacun sa Derdara, donc à chacun son allégeance...franchement je vais vous dire... 


Ce spectacle est pitoyable car il relève d'un mimétisme primaire et stupide...à défaut de faire mieux sinon autant que l'Emir pour unifier la Nation et construire un État, nos guignols du pouvoir, lui ont infligé ce sinistre scénario...mais rassurons-nous, leurs arbres ridicules, tous flanqués du nom de son planteur...n'ont ni la simplicité ni la majesté de celui de l'Emir...alors que ce dernier s'est couvert d'une carapace en forme de mosaïque, tressée avec élégance par sa propre écorce...et que son tronc porte de multiples blessures qui feraient bondir le peintre Mohammed Khadda, l'adorateur de l'olivier, et pendant que l'original s'est pris au jeu du sculpteur en donnant de l'épaisseur à sa base...les frênes de la nomenklatura, pressés les uns contre les autres...s'étirent vers le ciel dans une minceur insipide...comme s'ils cherchaient juste à grandir vite et à faire de l'ombre au frêne Premier...morale de l'histoire, il est vain de chercher à taquiner l'histoire...elle se venge toujours de ses imposteurs...





La mort du dernier Samouraï

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Me voilà, encore une fois, témoin ébranlé par la mort subite d’un ami. Encore une fois, surpris par la faucheuse, je me soumets à cette insoutenable épreuve. Oui, la douleur est si intense en ce qu’elle ne vous laisse aucune échappatoire. Voilà une année, Mabrouk était parti sans prévenir. Comme chaque été. Puis, à la rentrée, nous le retrouvions fidèle au poste. Certes, nous savions qu’il était atteint d’un terrible cancer. Et nous avions fait confiance à son moral d’acier. Didi avait cette qualité rare de ne jamais s’avouer vaincu. Il était de la race des lutteurs. Jamais il n’a cédé sur les principes. Enseignant méticuleux et appliqué, il ne faisait jamais les choses à moitié. Toujours droit dans ses bottes, il ne ménageait aucun effort. Il était tellement rigoureux qu’il lui arrivait très souvent de nous indisposer. Quand il avait raison, il n’était pas aisé de lui demander de changer d’attitude. Il lui arrivait, dans un jury de fin d’études, de passer des jours et des nuits à refaire tous les calculs, à triturer toutes les formules et à discuter tous les résultats. Sa présence dans un jury était pour nous les zootechniciens un gage de sérieux, de rigueur et d’honnêteté. Il était sans doute l’un des plus exigeants enseignants que j’ai eu à connaitre. Et cette exigence, il se l’appliquait d’abord à lui-même. Combien de fois, nous lui avions recommandé de compiler ses nombreux et originaux travaux en une thèse ? Combien de fois, il nous répondait qu’il ne soutiendrait jamais une thèse au rabais. Pourtant, pour l’avoir côtoyé durant 38 ans, et ayant participé avec lui à la constitution d’une équipe de recherche, et ce bien avant l’arrivé des premiers programmes de recherches sectoriels, je sais combien ses travaux sur l’alimentation animale ont été nombreux, originaux et utiles. C’est lui qui, le premier, s’est appliqué à mener des expériences sur la substitution de l’orge locale au maïs d’importation dans les régimes alimentaires du poulet. Ses travaux restent frappés du sceau de la rigueur et de la clarté. Les résultats rapportés durant plus de 3 décennies, constituent une contribution majeure à une alimentation du poulet. Pourtant, son niveau d’exigence était tel, qu’il trouvera toujours une parade pour ne pas soutenir son doctorat. Voilà une année, nous avions encore une fois abordé cette question avec lui. Puis, sans crier gare, Didi s’en est allé retrouver les siens. Comme le film de Shohei Imamura (Narayama Bushiko, Japon, 1983), dès qu’ils approchent les 70 ans, les vieillards sont conduits en haut de la montagne Nara Yama et abandonnés aux vautours. Oui, incontestablement,  Didi, mû par une force intérieure et un réel dépassement de soi, ne peut ne pas rappeler la philosophie bouddhiste, avec un gout très prononcé de la notion du sacrifice, avec quelque part un penchant dissimulé pour la culture Samouraï. C’est pourquoi, même dans les ultimes instants, alors que le mal le rongeait intérieurement, Didi est resté stoïque. Sa vie a été une succession d'efforts, de sacrifices et de dévouements. Il n’a jamais cessé de se comporter comme l’escaladeur de montagne. S’appuyant sur de remarquables aptitudes il n’a à aucun moment dévié de ce chemin de sacrifice et d’embuches qu’il appréciait par-dessus tout. Car c’est dans la besogne soutenue qu’il s’accomplissait. C’est certainement pour ça que sa vie s’est achevée dans une abnégation totale et dans une immense fierté. Sans calcul et sans recours. Repose en paix mon cher Didi. Tu nous manqueras à tous. Surtout à ceux et celles qui t’ont toujours admiré pour tes postures et pour ta droiture. 

 





 


Cent pour 100 Algériennes...100 % Belabbésiennes

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Un vernissage avec de vrais amoureux de l'art et du savoir vivre....dans la galerie Nouara, en plein centre de Sidi Bel Abbès...et à la Kheïma...chez Zahera et Said Bouhamdan...qui nous ont reçus royalement...et for généreusement...avec leurs coeurs...avec leurs fruits...avec leurs fleurs...avec leurs cascades..avec leurs animalerie..avec leur immense jardin...dans des lieux somptueux...qui n'attendent que votre visite...c'est à 8 km de Sidi Bel Abbès...et c'est en allant vers Telagh...à votre droite...c'est un endroit merveilleux...avec des gens merveilleux...et des regards enchanteurs...oui c'était juste après le vernissage de la sublime exposition de Abdelkader Belkhorissat...l'homme qui fait parler les femmes uniquement à travers le regard...un regard qui dégage que de la fierté...oui, les femmes de Belkhorissat sont Algériennes...pas à 20%, pas à 80%...non, elles sont à 100% fières...
et elles le disent avec seulement un regard..wa L'fahem yaf'hem...elles sont tout simplement sublimes à 100%...et elles vous disent " surtout reste à ta place!"...pas bouge!...elles ont plein de choses à dire...mais elles ne parlent pas...elles disent... et pas de bonnes aventures...non, les femmes de Belkhorissatdisent la vie, la rudesse de la vie...le courage de vivre dans un monde où on tend à les considérer des moins que quelque chose...alors, d'un seul coup d'oeil, elles répliquent, chacune à sa manière, souvent seule, mais parfois en doublette, voire en groupe...et elles ont un message de femme...besogneuses...appliquées, travailleuses...courbées...et droites à la fois...et ces femmes, à travers l'oeuvre de Belkhorissat...disent leurs souffrances assumées...dans un même élan, dans un meme geste, dans un même combat...il faut absolument passer les voir, les observer longuement..et plus d'une fois...car elles ont en des choses à dire...et puis, pourquoi le taire? ces femmes sont belles...elles inspirent un grand respect...pour leur beauté..qui ne perle qu'à travers ce regard oblique...celui d'un certain dédain...pas pour elles...non! ça serait trop facile! elles ont du dédain pour ces moins qu'hommes qui osent encore les toiser...comme si elles commettaient un crime de lèse majesté...par le simple fait de s'afficher...avec aplomb...et certitude...juste pour dire qu'elles ont droit à la vie...qu'elles sont la vie...les femmes de Abdelkader Belkhorissat sont nos filles, nos sœurs, nos mères...et nos invitées...pas toutes, il n'y en a pour l'instant que pour les Sahraouies...du Rio de Oro...
parce que ce sont les plus anciennes réfugiées...parce que les Nigériennes, les Maliennes, les Burkinabées, les Sénégalaises...ne font pas encore partie du paysage de Abdelkader Belkhorissat...pourtant, elles ne sont ni moins belles, ni moins fières, ni moins dédaigneuses...non celles là ne vont pas tarder à venir s'incruster dans les peintures de Abdelkader Belkhorissat...car elles manquent terriblement à son exposition...et à notre bonheur...c'est à la galerie Nouara que l'on doit à Mohamed Tayebi...le responsable de la culture à Sidi Bel Abbès...car c'est grâce à lui que la galerie Nouara a vu le jour...faut-il le remercier?...je pense que c'est tellement rare une galerie d'art qu'il faut lui en donner crédit...surtout que c'est dans la province que ça se passe...sans tambours ni trompettes...mais avec de si douces et si fraiches femmes peintes avec délectation et grande passion par Abdelkader Belkhorissat...une exposition qui vaut le déplacement...j'y retournerais sans faute...car j'ai encore beaucoup de choses à apprendre sur les femmes de Belkhorissat...et de Sidi Bel Abbès...Ces femmes pour qui tout s'enflamme...elles pourraient très bien s'appeler Amina...Farida...Soraya...Fouzya...Nabahette...Salima...Amel...Kenza...Djamila...Nabiha...Nacéra...Kheira...Yamina...Kahia...Zina...












Edith a fait le choix du Dahra

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Une Parisienne dort désormais tranquillement aux cotés de son époux...dans ce cimetière rocailleux...sur la route qui mène à Nekmaria. 
En effet, Edith Rabahi-Talamon, la maman de Dali Rebahili...a été enterrée avant hier en cette terre algérienne qu'elle chérissait par dessus tout...dans ses ultimes recommandations, elle avait dit à son fils: si je meurs en France tu m'enterreras aux cotés de ma maman...si je meurs en Algérie, c'est aux cotés de ton papa que je veux reposer...Le destin aura voulu qu'Edith, la Parisienne, s'éteigne dignement à l’hôpital de Sidi Ali où elle avait reçu tous les soins possibles...en respect de sa volonté, son fils entame alors les procédures d'inhumation auprès de la maire de Khadra...déjà, à son décès, ses amis et ses proches avaient fait le nécessaire pour lui trouver une place auprès de la tombe de son mari...mais c'était sans compter avec les frasques de la nature...en apparence, le voeux de la défunte allait poser problème, puisque de place aux cotés de son mari, il n'y en avait pas...mais seulement en apparence...alors dans la tête de son fils unique, c'est un peu le volcan qui se met à chauffer...mais une fois sur place, le groupe de volontaires note la présence d'un gros buisson...à proximité de la tombe...de quoi ouvrir une tombe..à condition de se débarrasser du généreux buisson...

Un cousin se chargea d’expédier le gros buisson en quelques coups de pioche bien ajusté. Très vite la place se fera nette…il est déjà minuit et demain ça sera les funérailles…mais une fois le buisson enlevé, les premiers coups de pioche s’avèreront inopérants. Une grosse roche venait s’interposer…il fallait recourir à des moyens plus lourds…et il est déjà 2 heures du matin…amis dans le Dahra, le sommeil n’empêche pas la besogne. Dali se souvint alors qu’un voisin éloigné disposait d’un marteau piqueur de dernière génération…quelqu’un se dévoua pour aller le chercher…à son retour, on avait déjà ramena un petit groupe électrogène…très vite, grâce à la technologie et la solidarité sans failles…peu avant l’Adhan du Fedjr, la tombe d’Edith était prête…à accueillir sa prestigieuse locataire…mais c’était sans compter sur les stupides entraves de l’administration locale…Oui, il se trouva un scribouillard pour refuser l’inhumation, sous prétexte que la défunte n’était pas musulmane…Heureusement que l’administration recèle encore des personnes lucides pour la servir dignement…finalement le permis d’inhumer est délivré dans les délais…au grand soulagement de toute la population de la région. ..qui n’a pas oublié que la défunte s’était fondue dans cette région avec cœur et raison…
D’autant que son mari qui bénéficiait d’un prestige qui aura largement débordé les frontières de la région du Dahra, puisque c’est Boumediene en personne qui aurait insisté auprès de lui afin  qu’il occupe le poste de président de l’APW de Mostaganem…c’était du temps de Senoussaoui, Wali et de Belkacem Abdellaoui, alors commissaire du part unique…enfin, lorsqu’en cet après midi du 26 septembre, l’appel à la prière du 3asr se fera entendre…à deux pas de la route de Nekmaria, une foule compacte s’aligna pour faire la prière…puis, le cercueil recouvert de l’étendard vert arrive porté de fiers et vigoureux bras…ceux-là même qui durant la nuit noire avaient creusé la tombe…il est placé vers la montagne qui surplombe la mer, là où l’horizon se mélange aux brumes automnales…la même foule, avec le même engouement et dans un silence impeccable s’aligna en plusieurs rangées derrière l’Imam pour la prière de la Janaza…puis…dans un ordre martial, cercueil en tête, les habitants de cette partie du Dahra se mirent en longue file pour accompagner la défunte vers sa dernière demeure…Arrivée voilà 55 ans, la jeune Parisienne qui a bourlingué à travers les cinq continents, aura trouvé la paix intérieure dans cette fertile et hospitalière terre du Dahra…cette terre où elle repose désormais pour toujours…aux cotés de son époux et au milieu de cette population rurale qui l’aura définitivement adoptée…Oui le Dahra se mérite…assurément…Repose en paix Edith…ton fils, tes petits fils, leurs voisins, leurs amis…veillent sur toi…mais ça, tu n’en as jamais douté…




L'avoine gouverne à l'écurie

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Cinglante et presque sanglante analyse de Abed Charef...je ne décèle personnellement plus aucun lien entre l'ALN et l'ANP...En confiant le sort de l'Algérie à Bouteflika Abdelaziz et à ses frères..l'ANP a fait le choix de trop...car à l'origine, Abdelaziz Bouteflika avait un vieux et douloureux litige avec l'ANP et ses démembrements sécuritaires et James-bondiens...à la mort de Boumediène, restait Kasdi Merbah, comme dernier patriote - même si par moment il a usé de méthodes si peu recommandables-, lui avait une certaine idée de l'Algérie...Une fois Merbah éliminé, que restait-il de patriotisme au sein de l'ANP?...Mouloud Hamrouche, le remplaçant de Kasid Merbah à la chefferie du gouvernement?...et alors? Lui même sera balayé par une coalition entre justement des militaires janviéristes en devenir et la nébuleuse islamiste agglomérée autour des dirigeants si peu éclairés du FIS...dans ce magma mortel, le résurrection de Bouteflika paraissait être la panacée...d'abord pour lui même et ensuite pour ceux qui l'ont appelé à leur secours...pour un seul mandat? Oui ce fut apparemment le deal...puisque c'est une grande partie de l'ANP - du moins sont chef d'état major- qui ont poussé Benflis au devant de la scène...à partir du perron de l'Elysée!!! et ils ont crus longuement que ça suffirait pour renvoyer Bouteflika vers son exil persique...pauvres ignares...qui ont fait montre d'un angélisme enfantin...redoutable manipulateur, il fera faire à l'ANP un revirement spectaculaire, renvoyant Benflis et ceux qui l'avaient soutenu et encouragé dans les cordes raides de l'histoire...le pauvre général Lamari finira ses jours dans un coin perdu du Sahara...après avoir subi tant d'humiliations...sans qu'aucun de ses collègues ne sachent lever le moindre petit doigt pour au moins réclamer la moindre indulgence...Où est l'ALN dans tout ça?...mis à part Lakhdar Bouregaa et Abdelaziz Bouteflika…qui, chacun dans son style, arrive encore à entretenir cet esprit fait à la fois de ruses et de coups bas…alors, ne parlez pas d'incapacité lorsque l'on observe la scène, on se rend compte que même très affaiblis- ce qui reste à prouver, un invalide ancien moudjahid est en train de damer le pion à des généraux...si peu inspirés...sinon comment expliquer ce ballet de hauts gradés entre une retraite sans cesse remisée et un retour en grâce en sursis...et bien chancelant?...curieux pays en effet que cette Algérie...qui peine à sortir de sa torpeur post indépendance et dont la gouvernance est entre les mains d'un seul homme...et de son clan...comme quoi, le plus fort n'est jamais celui qu'on croit...et ces képis qui n'en finissent pas de tournoyer dans tous les directions...sans cap et sans repères...il faut se rendre à l'évidence, Abdelaziz Bouteflika, en faisant le choix de reprendre en main le pouvoir, avait entre ses seules mains, toutes les cartes...y compris celles qui mènent à tous les états majors...et c'est là que réside sa force...et sa pérennité...Oui, Abed Charef a raison: inutile de se bercer d'illusions et de lectures, l'Algérie a été été cédée à Abdelaziz Bouteflika par ceux qui croyaient en détenir les rênes...ils avaient tout faux...c'est ce qui permet avec une grande aisance de changer souvent d'attelages...tous les chevaux savent qui détient l'avoine...et qui détient l'avoine gouverne l'écurie...


Voici l'article publié par Abed Charef:


Le départ de Saâdani ne met pas fin au 4ème mandat
par Abed Charef
Saâdani contre Ould Abbas. On n'est pas dans le combat du bien contre le mal, le combat du vide contre l'inutile

Le clan A, celui du Président Abdelaziz Bouteflika, est inquiet de la montée en puissance du clan B, celui parrainé par le général Gaïd Salah. En prévision d'une bataille inévitable, à l'approche de la présidentielle de 2019, le clan A cherche des alliances pour se renforcer. Il réussit à rétablir les ponts avec le clan C, celui du général Toufik Mediène, écarté des affaires il y a un an.
Dans ce monde, il n'y a pas place pour les sentiments, ni pour les considérations morales. Les alliances ne valent que le temps qu'elles sont nécessaires. Seuls les intérêts comptent. Ce qui amène, tout naturellement, le général Mediène, qui veut préserver les intérêts des siens, à répondre favorablement aux sollicitations du clan A. Il est prêt reprendre du service, à mettre ses réseaux au service du Président Bouteflika. Il en serait d'autant plus ravi que cette hypothèse lui permettrait d'atteindre deux grands objectifs : d'abord, se remettre en selle, et ensuite, avoir la possibilité d'en découdre avec celui qui lui a volé ses pouvoirs, le général Gaïd Salah.
Ça tombe bien : le clan Bouteflika veut précisément se débarrasser du clan Gaïd Salah, devenu trop puissant. Ce qu'on appelle, désormais, « le groupe de Annaba » est menaçant. Il a acquis trop de positions et prétend dicter ses choix pour 2019. Gaïd Salah, lui-même, ou un autre candidat, peut importe.
Un homme exclu est dangereux
Autre avantage de l'opération : pour le Président Bouteflika, le général Mediène est out. Il n'est plus en mesure de constituer une alternative. Par contre, s'il est réinjecté dans les circuits, comme ce fut le cas pour Gaïd Salah, il y a une décennie, il peut s'avérer très précieux : Gaïd Salah, à l'antichambre de la retraite en 2004, a succédé au puissant chef d'état-major Mohamed Lamari, pour jouer un rôle essentiel dans l'impossible quatrième mandat. Ce qui montre que les missions les plus périlleuses doivent être confiées aux hommes qui ont frôlé l'exclusion définitive. Comme Toufik Mediène.
Voilà donc le deal conclu entre le clan A et le clan C, pour faire face au clan B. En contrepartie, le général Mediène a demandé, comme gage de bonne volonté, le départ de Amar Saadani, l'homme qui s'est montré le pus virulent contre le général Mediène. Celui-ci s'est contenté de dire, publiquement, qu'il envisageait d'attaquer Saâdani en justice. Le message est arrivé à son destinataire, et la réponse a été extrêmement rapide.
Par ricochet à toutes ces combines, est née la désignation de M. Djamel Ould Abbas, à la tête du FLN. Et celui-ci a de l'avenir : non seulement, il fait bien ce qu'on lui demande de faire, mais il sait anticiper, aller au-devant du souhait de ses amis et parrains. Avec lui, il n'est pas nécessaire d'insister : dès sa première déclaration, il a ouvert la porte d'un cinquième mandat, au profit du Président Abdelaziz Bouteflika.
Changer de logiciel
Cinquième mandat : le mot est lâché. Toutes ces manœuvres, nous dit-on, sont dictées par cette échéance du cinquième mandat. Saâdani, Ould Abbas, Mediène, tout convergence vers cette échéance. Mais avant de dire quoi que ce soit sur le sujet, reprenons depuis le début, pour poser le problème autrement : faut-il continuer à essayer d'analyser ce qui se passe dans le pays, à travers ces guerres absurdes entre clans? Faut-il réellement faire l'effort de comprendre ce que font ces clans, de décortiquer leur démarche et leurs objectifs ? L'Algérie a-t-elle besoin de rester dans cette configuration absurde où Bouteflika se sert de Toufik Mediène pour éliminer Gaïd Salah après avoir utilisé Gaïd Salah pour mettre Mediène hors course ? Est-il nécessaire pour un pays comme l'Algérie de créer, puis de se défaire d'une créature comme Amar Saâdani, pour assurer le développement du pays, élargir son rayonnement, et garantir le bonheur et le bien-être de ses habitants ? Que représente l'avènement, à la tête du FLN, d'un homme aussi docile que Djamel Ould Abbès, à l'échelle de l'histoire? Que va ajouter à la gloire de l'Algérie le fait d'avoir comme président un homme dans l'incapacité de faire un discours, ni d'aller dans un quelconque forum international défendre les intérêts de son pays?
Symbole de l'échec
Bien sûr, les prochaines semaines seront remplies de bruissements et de rumeurs. Djamel Ould Abbès aura-t-il le feu vert pour réhabiliter Abdelaziz Belkhadem ? Celui-ci acceptera-t-il de rempiler, au risque de se retrouver de nouveau à la marge quand on n'aura plus besoin de lui ? Abdelkrim Abada et Abderrahmane Belayat se contenteront-ils de strapontins, pourvu que le parti ne retombe pas entre les mains de Belkhadem, ou bien auront-ils plus d'ambition, pour se placer en vue de 2019 ? Un FLN aussi faible est-il condamné à condamner les supplétifs, face à un RND aussi discipliné qu'une formation militaire, ce qui ouvre de grandes possibilités à M. Ahmed Ouyahia?
Toutes ces questions vont de nouveau se poser de manière récurrente, dans les mois qui viennent. Elles mobiliseront les analystes, et absorberont beaucoup d'énergie. Pour rien. Elles ne sont, absolument, d'aucune utilité pour le pays. Le fait même de les poser signifie que le pays n'avance pas. Elles sont le signe de l'échec. Comme Saâdani. Comme Bouteflika. Comme le 4ème mandat.


Le festival entre larmes et cris

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Des larmes de Benabdelhalim aux cris de Halim


Le demi-siècle qui vient d’accomplir le festival de théâtre amateur de Mostaganem se devait d’etre un instant de rétrospection, d’introspection mais aussi de perspectives. Vendredi 14 et samedi 15 juillet, concomitamment avec le lancement hésitant de la cérémonie d’ouverture de cette 50èmeédition, ont été consacrés à la tenue d’un symposium. Confiée à de jeunes amateurs, son organisation a été quelque peu chaotique. Mais seulement au début. Les absences de quelques invités, les interférences des gardiens du temple, les inconstances des certains participants et la grande fougue des nombreux présents, a tout de même permis de sortir de cette fournaise intellectuelle, sans trop de dégâts. Les vœux de nombreux anciens, partagés sans aucune équivoque par Med Nouari, le commissaire de la république pour cette manifestation, ont aidé à la confection d’une plateforme à minima. Cependant, là n’est pas l’essentiel ! Comme il fallait s’y attendre, l’indéboulonnable débat entre le théâtre amateur et le professionnel, la pratique théâtrale et les liens supposés ou espérés avec la sphère universitaire, le recours à l’autofinancement ou le maintien du système des subventions, si contraignant et aussi si pratique -s’agissant de la principale épée de Damoclès- n’ont pas été oubliés. Pourtant, l’essentiel n’est pas là ! En effet, le hasard faisant toujours les choses à sa manière, ce symposium a vu la participation de quelques invités inattendus. Egyptiens et Marocains ne se sont privés pour intervenir et déclamer quelques vérités qui ont tenus en haleine une partie des présents. Car à ce niveau, il faut savoir décrypter les messages sibyllins de nos frères arabes du Machrek et du Maghrib. Heureusement que Libyens et Tunisiens n’étaient pas de la fête. Toujours est-il que ces interventions ont le mérite de la sincérité. Ils nous ont dit que nous les Algériens, nous avions la plus ancienne manifestation culturelle de la région. Çà, on le savait déjà ! Ils nous ont aussi dit que nous n’en avions pas grande conscience. Lorsque le jeune et dynamique Abdelguerfi nous étalera avec chiffres à l’appui- puisés dans sa thèse consacrée au festival Gnaoua d’Essaouira- il mettra le couteau dans la profondeur de la plaie. 

Kaki et Alloula en exécuteurs testamentaires

En peu de mots, ce jeune homme spécialiste des manifestations culturelles nous a dit toutes nos tares et toutes nos lacunes. Le festival d’Essaouira produit de l’argent, beaucoup d’argent, en millions d’euros…sans aucune subvention. La petite ville marocaine a même été obligé d’ouvrir, le temps de son festival de 3 jours, un aérodrome qui reçoit du monde entier des vols charters ! Aucun clin d’œil coquin à la ville de Mostaganem, trop empêtrée avec son Mostaland et son chantier poussiéreux et poussif, trop poussif du tramway nommé désir. La journée du samedi a été d’une rare densité. Car, dans la salle, alors que personne ne savait qu’il était parmi nous, -et pour cause moi-même dans mon intervention je lui avais souhaité un prompt rétablissement- il y avait Ali Aïssaoui ! Journaliste, réalisateur, producteur, amateur de théâtre et grand ami du festival ! Mais aussi homme d’une grande culture et d’une plus grande humilité. Le jeune universitaire venu de la perle Tlemcen, ne le connaissant pas, a failli provoquer un incident malencontreux…alors qu’il s’apprêtait à clore la séance du matin, je lui ai soufflé à l’oreille afin qu’il donne la parole à Ali Aïssaoui. Il a très bien fait de m’écouter ! Debout, sans micro et sans filet, Ali Aïssaoui nous annonce que lors de la séance de l’après midi, il allait présenter un documentaire où Djillali Benabdelhalim délivrait son testament. En effet, pendant une dizaine de minute -alors que le film d’une durée de 52 minutes sera offert au festival, à l’occasion de ce cinquantenaire, le réalisateur, qui fut proche collaborateur de mon ami Hosni Kitouni, une belle référence que cet homme de culture et historien passionné…et passionnant !- nous délivra des images d’une rare beauté. Et des entretiens menés avec déférence avec certains acteurs de premiers plans comme Mekki Bensaïd, Benmokaddem, Ghali Elaakeb, Bouziane Benachour, et le monumentale – pas seulement par la taille !- Ssi Djilali Benabdelhalim…avec à ses cotés, excusez du peu…Abdelkader Alloula et sa majesté « Kaki »…qui l’écoutaient religieusement…grillant continuellement une cigarette…mais tellement concentrés sur les mots que chacun savaient comme étant à la fois prémonitoires et…testamentaires. Cherchant ses mots, les ajustant comme un bon cantonnier, Ssi Djilali manifestement très atteint demande alors à ce que l’on prenne soins du festival…son festival, l’œuvre de sa vie…de toute sa vie…se sachant arrivé au bout du rouleau, il dira, la gorge nouée combien il fallait tout faire pour maintenir en vie l’esprit du festival amateur…puis, hésitant, cherchant un mot de réconfort qui ne viendra pas…il fond en larmes ! Et toute la salle, comme pétrifiée, se laisse envahir par une grande émotion…et un sentiment de responsabilité…et de culpabilité. Sommes-nous capables de respecter le vœu ultime de Mustafa Benabdelhalim ? Avons-nous trahis son testament ?  
La réponse viendra de la bouche de Halim Zéddam…et de Raïs Boualem. Ce dernier, assis à ma gauche, est resté scotché pendant toute la projection. Puis, cachant difficilement son émotion, il me chuchotera avec conviction, tout en montrant la photo que Ssi Djillali qui nous faisait face «  c’est pour lui que je suis encore là » !

La génération sacrifiée

Invité donc à parler des perspectives et de la feuille de route post cinquantième, Halim Zeddam, avec des mots d’une rare sincérité et d’une inébranlable conviction, fera un feed-back qu’il qualifiera lui-même de nécessaire. Sans forcer le trait, il reprochera à l’ensemble des intervenants d’avoir essentiellement axé leurs discours sur la première période du festival. Occultant par là celle de la décennie noire,  égrenant les martyrs ayant versé leur sang pour avoir maintenu la pratique théâtrale en vie malgré la déferlante intégriste. C’est nous, dira-t-l avec force, les cinquantenaires qui avons lutté, chacun dans son coin pour que le théâtre ne soit pas assassiné. C’est nous qui avons bravé la déferlante intégriste au prix de notre sang ! C’est nous, la seconde génération qui avons maintenu le festival à flots, traversant au prix de tous les risques toute l’Algérie pour venir nous produire à Mostaganem. Sans rien renier des apports et contributions de nos ainés, nous avons aussi assurés notre part d’histoire, alors, je ne comprends pas ce silence, je ne comprends pas cette amnésie.
A plusieurs reprises, enlevant puis remettant ses lunettes, signes d’une grande effervescence intérieure, Halim fera un procès en règle de cette mise en sourdine des acteurs de la décennie 90. Entrecoupant son discours de longs moments de silence, il égrènera les noms de ses camarades. Sid Ahmed Kara, l’un des fers de lance de cette génération, parvenait à peine à retenir sa colère…et son émotion. Il prendra lui aussi la parole pour abonder dans le même sens, soulignant combien lui et ses compagnons n’ont manqué n’i d’audace, ni de témérité, ni d’insolence. Pertinence ne serait pas de trop. Car, c’est dans cette période trouble que moi-même j’avais accueilli le festival à l’ex ITA…avec en sublime récompense une grande affluence du public mostaganémois, avec jeunes filles, femmes et enfants. Ceci pour abonder dans le même sens que Halim qui en appellera à « rendre le festival à la population de Mostaganem » et à le réintégrer dans la cité qui l’a vu naitre, qui l’adopté, choyé et aimé. 

Le Temps de l'Audace

Ces larmes de ssi Djilali, ces cris de Halim et d’Abdelkrim Ghribi, ces appels répétés pour une nouvelle gouvernance, ces jeunes qui en veulent, sont les prémices d’un sursaut que le symposium se doit de concrétiser. Il est bon se passer le témoin, mais il serait encore plus valeureux de l’arracher par la force…pas la force brutale, ni celle de certains trainards qui n’ont pas compris qu’il ya le feu en la demeure. Non la force dont il s’agit est celle émanant du constat sans détours que le festival n’est pas l’apanage des « gens de Mostaganem ». Sans ne veux rien dire, mais c’est vital…Certe, il y les larmes de Ssi Djilali, mais il y a aussi le cri – en anglais le cri signifie aussi larme ! de Halim, de Sid Ahmed, de Boualem, de Abdelguerfi…de Watteau…du Prolet Kult…et de tant d’autres…Oui la matrice du festival c’est la ville de Mostaganem…mais sa nourrice c’est toute l’Algérie…alors, encore un effort…retour à une association ? Création d’une fédération des troupes amateurs ? Mise en place d’un conseil artistico-scientifique NATIONAL ? Après les larmes, les cris et les incantations, ne voilà-t-il pas venu le temps de l’audace ? Et cette déclaration à minima du symposium de « Mosta50’th » ne mérite-t-elle pas de porter le paraphe de l’ensemble des participants à son élaboration? C’est aussi ça l’écriture de l’histoire ! Ou alors faudrait-il que dans 50 ans, nos arrières petits enfants en viennent à se demander qui était là lors de sa vagissante naissance ? Non les larmes de Ssi El Djillali méritent plus de considérations…Merci à Ali Aïssaoui pour cette fabuleuse offrande…et merci à toi Halim Zeddam pour ce cris incandescent qui brulera longtemps nos méninges.
Mostaganem le 15 juillet 2017
Aziz Mouats

La presse, cœur du Festival de Mostaganem

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La presse, cœur du Festival de Mostaganem

Par : Aziz Mouats

En cette 50èmeédition, si le Commissariat du festival de théâtre amateur de Mostaganem voulait publier toutes les contributions journalistiques depuis la première édition, il pourrait disposer au bas de mot de 5 milles pages de journal. Soit un livre de pas moins de 20 milles pages[1]. Ces chiffres sont tout à fait probables, ce qui donne une petite idée du travail accompli par les journalistes à travers une couverture assidue du festival. Pourtant, la relation à la presse n’a jamais été un fleuve tranquille. Il est possible de séquencer cette cohabitation en étapes. Celle du commencement, avec les plumes les plus brillantes, dont certaines de renommée mondiale. La seconde, sous l’emprise du FLN et de l’UNJA, qui verra l’arrivée du journaliste militant. Puis celle l’incertitude d’avant et d’après octobre 88 avec l’intrusion de la presse privée. Enfin, la période de la décadence qui coïncidera avec l’apparition de l’internet. A chaque période, ses plumes, ses lignes éditoriales, ses contingences, ses connivences et ses dérives. Après cette 50èmeédition, quelle communication pour le festival ?

De la «Com» de haute voltige
Le premier vrai coup de génie de Si Djilali reste incontestablement celui du choix de la période de déroulement du festival. S’il est vrai que la première édition coïncidait avec l’ouverture de la quinzaine commerciale de la ville[2], il est permis de penser que si cette période n’était pas propice à la venue de nombreux journalistes en mal d’activités du fait de la vacuité de la scène politique, Si Djilali aurait certainement opté pour cette période estivale.
 S’il y a bien un journaliste dont la perspicacité n’a jamais été démentie, c’est bien Kémal  Bendimered. En plus d’être l’une des mémoires vivantes du festival du théâtre amateur, l’incontournable Kémal Bendimered, c’est sans doute celui qui aura à sa manière imprimé un véritable label au festival. A l’instar de ses pairs de la presse de l’époque, il donnera le meilleur de lui-même pour faire de cette manifestation singulière, un lieu où convergeront sans discontinuité tous ceux qui avaient la culture en partage. Avec Hamid Bouchakji d’El Moudjahid, Abdelkader Djemaï de La République, Hamdane Belouassouassi le chef du bureau APS, ils seront comme ces pionniers, ouverts à toutes les initiatives. Cette période a vu également l’apparition d’autres jeunes et parfois brillant journalistes et autres correspondants. On peut citer A. Bousserouel, Benbaghdad, Brahim Hadj Slimane. On a même croisé Paul Balta quiétait le correspondant de l’illustre quotidien français « Le Monde » à Alger. A ce titre, il était devenu l’un des proches confidents du président Houari Boumediene qu’il côtoya durant tout son règne. Il y avait aussi un certain Kosseï Salah Derouiche, un Syro-Palestinien, proche des milieux de gauche et d’Abderrahim Bouabid[3],
Très vite, ces gens de plume vont prendre l’attitude du parrain. Qui n’est pas celle du père. Cette promiscuité, contrairement à ce qui se passera plus tard, n’était suspecte de rien. Autant, cette première génération était professionnelle, malgré une jeunesse et un savoir faire hésitant, autant son engagement pour le festival était sans bavures,  sincère, profond et totalement désintéressé. Chacun de son coté, comme s’ils s’étaient donné le mot, cherchait à faire son métier d’information et de critique ; sans jamais verser dans l’excès. Cette attitude était la règle et elle sera respectée par la seconde génération, celle que l’on peut désigner par le terme galvaudé de « fournée de l’UNJA » avec son organe central l’Unité[4]. Contrairement à ce qu’on pourrait croire, cette seconde génération de journalistes ne manquera ni de talent, ni de discernement. Il y a là Kamel Alouani, Arezki Metref et tant d’autres plumes toutes aussi érudites, toutes aussi sincères, toutes aussi engagées, toutes aussi incontournables. C’est grâce à leurs écrits que ce formidable mouvement culturel continue de propager ses vibrations dont se nourrissent les générations successives des jeunes acteurs amateurs. Celles qui, par vagues ininterrompues, n’hésiteront pas à faire du festival de Mostaganem, un passage obligé. Mieux, un lieu de ressourcements multiples. Qui, très souvent devenait un lieu de consécrations pour nombre d’entre eux.
C’est autant grâce à l’image qu’aux écrits journalistiques que ce festival de tous les défis se fera connaitre et surtout reconnaitre. Non seulement dans les moindres recoins de l’Algérie, mais bien au-delà de nos frontières. Car combien même à ce jour, les écrits journalistiques n’auront pas eut droit à la moindre manifestation d’un début de reconnaissance, il est indéniable que ce sont les centaines d’articles parus dans la presse nationale, essentiellement de langue française, qui auront frontalement participé à la notoriété de cette union-libre de Mostaganem avec le quatrième art. Ca n’est point usurpé de rappeler le rôle joué par les photographes professionnels et amateurs[5]dans la visibilité de cette manifestation.
Mais contrairement à ce qu’on pourrait croire, la relation n’aura pas été aisée entre les troupes participantes, les artistes, les organisateurs et la presse. Dont les envoyés spéciaux auront fait montre d’une grande objectivité, d’une réelle liberté de ton et surtout d’un grand engagement auprès du festival. Un engagement sans lequel, cette manifestation n’aura jamais survécue aux impérities, aux entorses, aux injonctions et aux manipulations de tous ordres. Car, on le sait, depuis la première édition, ni les manœuvres de déstabilisation ni les tentatives de délocalisation ou de domination n’auront manquées.
Le temps aidant, on peut aisément faire la part des choses entre un journalisme de complaisance et un journalisme rigoureux, critique et intelligent. Dans ce cadre également, il n’est pas possible de nier que Mostaganem fut une très bonne école. Celle d’un journalisme intransigeant, courageux, engagé, implacable et profondément patriotique en ce sens que pour lui, seul l’intérêt général primait. Ce n’est pas sans raison que les seules reliques que chaque festivalier gardera jalousement dans un placard, sont ces coupures de journaux de l’époque. Que les festivaliers s’arrachaient dans les kiosques et les quelques rares librairies de la ville
Au fil des éditions, la couverture médiatique se fera de plus en plus dense, de plus en plus diverse et de plus en plus professionnelle. Du moins durant les quinze, voire les vingt premières années[6]. Car bien avant l’avènement de la presse privée, les écrits de qualité se feront moins prégnants. Une nouvelle génération venait de prendre le relais, dans des conditions très particulières.
Alors qu’il ne subsiste que peu de texte de la première édition, il n’en sera plus de même pour les suivantes. Mais c’est incontestablement à partir de la 3èmeédition, celle d’aout 1969, que les écrits journalistiques se feront plus nombreux et plus incisifs. Ce constat n’est pas uniquement dû à la qualité des spectacles ni à la prestation des jeunes acteurs qui feront vibrer les planches, au grand bonheur d’un public exigeant, chauvin, insatiable et parfois insolent. Il s’explique surtout par la présence chez les gens de la presse, de nombreux talents en herbe qui n’attendaient que ce challenge pour exploser. Ce festival n’est qu’une insolence naturelle chez une jeunesse en quête de repères et de nouvelles sources de motivation. C’était çà l’ambiance bon enfant qu’offrait Mostaganem à un pays qui se cherchait une voie spécifique vers une nouvelle forme d’émancipation.
Des écrits qui resteront dans la mémoire collective. Comme des écrits d’une grande pugnacité. Il suffit de relire des papiers de l’époque pour se rendre compte de l’étendue de la palette culturelle des journalistes de ce temps là. Pourtant, durant ces années d’insouciances et de luttes, l’exubérante et généreuse toile du « Net » n’existait pas. Un réel paradoxe, alors que de nos jours, toutes les pièces du patrimoine universel sont disponibles sur la toile mondiale, on se complait à décrire l’ambiance autour du festival au lieu d’aller à la critique. Mais pour cela, il faut avoir des outils que seule la curiosité culturelle peut offrir à celui qui se soucie de la perfection. Force est de constater que la nouvelle génération de journalistes aura trop souvent manqué de ce minimum vital.
Car, contrairement aux premières troupes de la première édition, la venue du CRAC de Constantine allait mettre le festival sur une voie royale. En effet, les constantinois donneront un spectacle élaboré, grâce à un texte dense et judicieusement structuré, si bien que la presse de l’époque, sous les plumes avisées et acérées de Tahar Djaout[7], Abdelkrim Djaad, Boukhalfa Amazit, Hamid Bouchakdji, Kémal Bendimered, Abdelkader Djemaï, Djamel Eddine Merdaci, Mohamed Ali Lahouari[8], et tant d’autres, souligneront dans une introuvable unanimité le formidable bond qualitatif de la seconde édition.
Rassurons-nous, cette unanimité sera de courte durée ! Ce qui est plutôt de bons augures pour la suite de la compétition, car des distorsions, des contradictions, des altercations, des conflits, il y en aura à profusion chez les journalistes et correspondants. Surtout qu’avec l’avènement dès 1975 de l’UNJA, qui éditait son hebdomadaire L’Unité, la scène médiatique allait s’enrichir de fraiches et succulentes plumes.
Des jeunes journalistes qui auront d’abord renouvelé et enrichie la scène médiatique, dont certains, à l’image d’Arezki Metref, s’affirmeront avec élégance, aux cotés des ténors d’alors. Inutile de souligner combien l’émulation fut prolifique. Lors des débats d’après spectacles, qui à l’époque étaient la règle, ainsi que durant les conférences de presse, il fallait savoir garder raison pour ne pas s’emballer. Les responsables des troupes, ceux qui étaient habilités à animer les conférences, se retrouvaient souvent face à un sympathique mais intransigeant jury, un mini tribunal où les acteurs avaient changé de ton.
A l’époque, la qualité des débats et des écrits qui en résultaient, reflétaient à la fois la qualité des pièces présentées et la verve des jeunes et talentueux correspondants et autres envoyés spéciaux. Qui avaient très bien révisé leurs classiques, comme l’attestent leurs nombreuses contributions. En définitive, il se produira une véritable symbiose entre les journalistes et les comédiens et autres animateurs. En reprenant scrupuleusement les préoccupations rapportées dans les pièces, la presse ne faisait que répercuter un fait de société. Ainsi faisant, les journalistes ne traitaient jamais de problèmes politiques ni des revendications sociales, que sous l’angle du compte rendu. Cette synergie permettait de véhiculer les messages de soutien au monde ouvrier et paysans, de parler des luttes sourdes qui travaillaient la société. La presse aidait à amplifier tous les cris de détresse en provenance des couches populaires. Elle mettait un point d’honneur à répercuter l’engagement des participants aux cotés des paysans sans terre et à amplifier toutes les revendications qui s’exprimaient sur les planches.
A la lecture des papiers de l’époque, on découvre que l’aspect le plus prégnant est sans conteste la grande humilité des journalistes. En voici une illustration à travers un article de Hamid Bouchakdji, l’envoyé spécial d’ElMoudjahid, parlant de la troupe du CRAC[9], dans l’édition du 22 aout 1969 : « Déjà lauréats en 1968, les Constantinois seront cette année encore parmi les favoris du concours, d’autant plus que, selon certains dires, le spectacle des premiers jours ne semble atteindre le niveau de l’an dernier, en raison sans doute d’un manque de présentations et d’expérience. Cependant, les spécialistes du théâtre qui suivent ce festival ont noté avec satisfaction le sérieux des sujets traités et un souci de recherche dans la forme théâtrale et la mise en scène ».
A propos de l’esprit de tolérance dont feront preuve ces journalistes, voici l’exemple de la troupe “Prolet Kult », sujet polémique par excellence, le journaliste A. Bousserouel, après avoir descendu en flèche les acteurs, ponctuera ainsi son texte : « A la décharge de ces jeunes, il faut signaler qu’ils ont été pratiquement livrés à eux-mêmes, sans aides, ni conseils, et c’est déjà un miracle qu’une troupe théâtrale puisse encore exister à Saïda ». Ce passage à lui seul suffit à se faire une réelle idée de l’extrême tolérance dont firent preuve à la fois les organisateurs et les critiques. Les uns refusant ostensiblement de ramener l’élite, si tant est qu’elle existât, et les autres jouant à fond leur rôle de critique inféodés uniquement à leur conscience. C’est aussi l’exemple parfait et vivant de cette intelligence des responsables du festival que d’être parvenus à faire converger des idées et des points de vues différents et parfois contradictoires, vers un objectif commun.

Une critique sereine
En 1974, après une longue convalescence, le dramaturge Mostaganémois Ould Abderrahmane « Kaki » se signale par une présence soutenue au festival. Dont la commission est présidée par Ghali Elaakeb, le poulain de « Si Djilali ». A l’époque, « Kaki » ne ratait aucune occasion pour venir soutenir ses amis d’enfance. Et aussi prendre le pouls de cette expérience que ni lui, ni Mustafa Kateb, le directeur du TNA, n’avaient vu d’un bon œil lors de son lancement. Après une longue convalescence – consécutive à un terrible accident survenu 6 ans plus tôt –, Ould Abderrahmane « Kaki » prenait le temps de participer aux débats d’après spectacle qui étaient la règle. On constate de suite que les débateurs n’y allaient pas de main morte. Grace à la sagesse de « Si Djilali », de « Kaki » et de nombreux journalistes, les débats étaient recentrés sur l’essentiel. A savoir une critique constructive, positive, objective et sereine. Ce ne fut pas toujours le cas, si bien que, plus tard, durant plusieurs années, les débats seront tout simplement supprimés. Pas sûr que cela fût utile au théâtre. Pas plus qu’à l’expression libre d’une jeunesse engagée à fond dans le combat contre toutes les formes d’oppression. Il est bon de souligner que la participation de ces personnalités aux débats ne relève pas de la simple convenance protocolaire. En effet, ni «Kaki» ni Si Djilali ne se priveront d’intervenir dans les débats souvent houleux d’après spectacle. Cette présence a eut plusieurs avantages.
D’abord pour les jeunes journalistes. Qui vont trouver en ces spécialistes de l’art scénique de véritables pédagogues. Sans doute, est-ce la plus grande contribution de Kaki à l’épanouissement d’une critique saine avant-gardiste. Ces séquences d’interminables débats vont faciliter et aider à la mise à jour des connaissances. Ce qui va non seulement profiter aux acteurs, mais également à la corporation des journalistes, obligés de porter la contradiction…à armes égales. Comme en face, il y avait aussi de la répartie chez les animateurs des troupes, mais également chez de nombreux acteurs, on en est arrivé à asseoir une véritable critique et une véritable débat. Ce qui obligera les jeunes journalistes à se tourner vers les classiques afin d’acquérir les rudiments d’une critique solide. Il leur fallait maitriser leur sujet pour tenir tête à ces jeunes animateurs de troupes qui ne s’en laissaient point conter.
On reste frappé par la qualité des écrits, d’où perle une réelle maitrise du sujet à l’exemple de ce texte de Hamid Bouchdjakji :
« Certaines scènes sont à revoir : Celle du chant du corbeau et particulièrement du chant de la Palestine, tableau qui, à notre avis, est à remanier entièrement. Le monologue des protagonistes est confus, fatiguant aussi bien pour l’acteur que pour les spectateurs, truffé d’allusion et de paraboles qui ne portent pas et qui desservent le but recherché : à savoir la lutte d’un peuple (Palestine) arabe devant le sionisme.
Ce tableau qui nous touche à plus d’un titre, gagne à être étudié plus sérieusement, pour lui donner l’impact qu’il doit avoir et ce, en rendant le texte plus conclus, plus cru, et en le débarrassant des passages creux qui ne parviennent qu’à traduire le verbiage de ceux qui prétendent défendre les Palestiniens.
Le vrai spectacle a eu lieu après la fin de la représentation, lorsque l’animateur - Othmani Mokhtar – entouré des éléments de sa troupe[10], est venu engager le débat. C’est alors que les diatribes les plus violentes se déchainèrent parmi l’assistance. En réalité, et c’est la chose qu’il faut regretter, les candidats au dialogue n’étaient pas nombreux. Pratiquement tous ceux qui ont pris la parole, portaient le macaron du festival. Le spectateur lui, une fois la représentation terminée, a quitté la salle, pourquoi ? Parce que le choix de l’heure est malheureux (23h30). Parce que ceux qui prenaient la parole voulaient la garder et s’enliser dans les dialogues et les polémiques stériles. Enfin parce que nous avons senti qu’il existait une certaine animosité de la part de ceux qui critiquèrent la pièce.
Abderrahmane « Kaki » semblait déçu par la tournure prise, malgré le conseil qu’il donna aux parties de dépassionner la discussion et d’axer les débats sur les valeurs intrinsèques de la pièce et de son interprétation… »
A la veille de la clôture de la septième édition, on pouvait lire, sous la plume d’Abdelkader Djemaï, ce redoutable constat: « Se cherchant et se perdant, indécis, piaffeur, persifleur et pas souvent costaud, le jeune théâtre a été cette année assez maigre. Demain, il lui faudra prendre la route ».
Toujours aussi incisif, A. Djemaï poursuit : « Néanmoins, au cours de ce festival, il aura essayé de trouver sa voie. Comme les années précédentes. Et à chaque fois, n’osant pas se remettre pleinement en question, il se mord la queue. N’osant pas affronter les problèmes en face, il se montre de profil, parfois à l’envers. Et à l’endroit des troupes, il faudra insister sur le manque de responsabilité, en choisissant le théâtre comme moyen d’expression privilégié. Sept fois un festival, quelques tentatives, beaucoup de troupes, pas assez d’initiatives, de temps à autre des éclairs. Le bilan est à mettre au passif et ce théâtre a encore des dettes à payer envers lui-même ».
Abordant la question des moyens, le journaliste empruntera une parabole qui en dit long sur la coercition ambiante : « Si le jeune théâtre déjeune, il ne soupe pas. Le bouillon de culture verra flotter quelques morceaux de choix. On boit des lèvres et on repousse l’assiette. On boit des yeux et la scène n’offrira plus rien ».
Se faisant plus incisif, l’auteur, en observateur averti, devient très critique : « Voir les choses du bout de la lorgnette n’arrange personne. Voir les choses en termes de devenir et pourquoi pas en grand. Cela appartient au jeune théâtre de se vouloir comme il le désire… Pour cela, il devra se mettre en situation et en demeure d’avoir à charge un devoir envers un public populaire, à le respecter et à lui apporter des œuvres qui le concernent ».
C’est vers le spectateur que le journaliste se tourne pour mieux faire passer son message : « Si le public du festival de Mostaganem a ses humeurs, si parfois il est turbulent, insupportable, s’il rechigne et fait la tête, s’il bouscule quelques peu l’ordre et boude devant ce qu’on lui présente, il a néanmoins des raisons. Celles de ne pas l’ennuyer et de faire à ce qu’il décroche à chaque fois. Il aime être vaincu, c'est-à-dire, une fois de plus, à être convaincu. L’excuse facile est de l’éviter pour son caractère. La nécessité : de le saisir par les ‘’cornes’’ en lui offrant des pièces qui l’intéressent et en lui apportant ce qu’il attend ».
On le sent un peu déçu notre ami, mais il ne manquera pas de « boucler » par une note d’optimisme : « ce jeune théâtre a cependant dans le cœur et dans la tête la possibilité de remédier à sa crise d’adolescence. Il se veut pour la Révolution agraire, et veut la défendre par le moyen du théâtre. Un choix d’importance. Il lui restera la possibilité de la défendre par la réflexion dans son travail ».
Le témoignage d’Omar Fetmouche est poignant de sincérité, il décrit une véritable arène, où ne manque que la mise à mort: « Imaginez- vous avec une quinzaine de jeunes d’à peine 14 ou 15 ans, qui débarquent dans la fameuse Salle Afrique ! Ce fut un choc extraordinaire pour toute la troupe ; c’était une propulsion dans cette terrible ambiance, un vrai chaudron que cette salle ! Le vaccin à quadruple dose et un public insensible à notre jeune âge, intransigeant comme à son accoutumé et, disons le, sans pitié pour notre frêle troupe. Le spectacle a été très mal accueilli, moi j’avais à peine 20 ans et j’avais été totalement déboussolé par cet accueil du public. Puis vint la séquence interview avec le redoutable Arezki Metref, qui deviendra plus tard un ami. Il travaillait à l’époque pour L’Unité, organe central de l’UNJA. Les questions fusaient comme des flèches, et moi dans cette tempête j’essayais de garder mon calme. Ce fut terrible, j’avais perdu mon self-control et commençais vraiment à douter de moi et de mes jeunes acteurs. Je regrettais même de les avoir engagé dans cette aventure et je craignais de les blesser à jamais et de leur faire perdre confiance en moi, mais surtout en eux ».
Reprenant son souffle, il décrit l’ambiance surchauffée de la conférence de presse : « Ce fut une situation d’extrême culpabilisation que je n’avais jamais connue auparavant. Et à laquelle je ne m’attendais pas du tout, surtout après le passage en auditions devant le jury de sélection. Me revenait à l’esprit les éloges de Djamel et de Benmokaddem, il n’était pas possible qu’ils se soient trompés à notre égard. En pensant à eux, j’avais l’impression de les avoir quelque part trahis ! Bref, j’étais au fond du gouffre lorsque je vois arriver vers nous le patron de ce festival, l’imposant « Si Djilali », celui qui n’intervient que très rarement dans les débats et pratiquement jamais dans les conférences de presse. Et voilà que lui, le formidable et très paternel « Si Djilali » qui demande calmement à prendre la parole tout en continuant à tirer sur une interminable cigarette. Ce fut le silence total, tous les présents, journalistes et acteurs, étions scotchés à ses lèvres. D’un ton très calme de celui qui sait son poids dans la balance, il prononcera des paroles que je continue à sublimer comme une délivrance : ‘’ Ecoutez moi bien, disait-il, méfiez vous de cette troupe et de ces jeunes, vous allez les avoir pendant longtemps sur le dos, car ils n’ont pas encore tout dit, loin s’en faut ! ’’.
Ne cachant point son soulagement, Omar Fetmouche ajoutera : « La messe était dite, le grand patron, celui qui ne doute de rien, qui donne de l’assurance et de la dynamique au festival venait de trancher les débats à notre avantage. Je ne sais pas si son intervention a eut une quelconque influence sur les journalistes et les critiques, mais ce que je sais c’est que nous venions d’être sauvés par ce grand «Monsieur» à qui nous devions tout ! C’était ça «Si Benabdelhalim», un génie au grand cœur et un immense découvreur de talents. Lui seul savait rassurer et lui seul pouvait rassurer. C‘était pour moi et pour ma très jeune troupe le plus bel hommage. La dernière partie du festival fut pour nous une véritable consécration, car de toutes parts, on nous reconnaissait et on nous saluait. Moi qui revenais une année après à Mostaganem, mais cette fois-ci dans l’habit de l’animateur de théâtre, je n’en revenais pas ! Alors que j’avais quitté l’ITA pour une autre vie, je ne m’attendais surement pas à être consacré une année après dans cette même ville, mais dans un autre registre. Celui que j’avais choisi en toute conscience et en toute passion ».
A la 24èmeédition, dans le numéro 1298 de l’hebdomadaire Algérie Actualité, Abdelkader Djemaï fait lui aussi ce terrible constat. Sous le titre : « Mosta, au petit bonheur la chance », déjà très évocateur, l’intellectuel Oranais rédige un chapeau à l’article de Brahim Hadj Slimane. Dans un verdict des plus alarmants, voici ce qu’il disait : « Vingt quatre ans d’existence et toujours pas de public. Le festival a son histoire, ses heures de gloire, ses talents et ses périodes noires. Au temps des censures bêtes et méchantes, il trouva son ton dans la virulence. Manquant certainement de souffle et dans un climat plutôt hostile à toute forme d’expression, depuis quelques années, il patine sec. De Saïda à Constantine, de Tiaret à Alger, les grandes formations se sont retirées en silence. Autrefois, vivier du mouvement théâtral, aujourd’hui, juste une nostalgie qu’on égrène une fois l’an. L’échéance du Festival passée, chaque troupe retourne à sa case départ. Sans moyens, sans formation, sans local le plus souvent, le théâtre amateur a, malgré tout, donné au professionnel quelques-uns de ses meilleurs atouts et une part, aussi, de son style éclaté. Retrouvera-t-il son élan, ses interrogations ? En attendant, il se cherche et peut être, comme il l’a déjà fait, puisera-t-il dans son propre drame, la force de sa jeunesse ».



La province contre Alger
Très curieusement, avec l’ouverture politique consécutive aux manifestations d’Octobre 88, suivie de l’apparition – sous l’impulsion de Mouloud Hamrouche- d’une presse privée,  on vois émerger dans l’arène une nouvelle corporation, celle des correspondants locaux. La conséquence sur la pratique journalistique va avoir des retombées inattendues. Le journaliste qui va couvrir le festival n’est plus cet envoyé spécial venu d’Alger, mais le voisin, le collègue ou l’ami que l’on croise tous les jours et avec lequel il est possible d’établir une relation de proximité, voire de connivence.  Ça ne se passera pas toujours ainsi. Habituellement, l’envoyé spécial venu d’Alger, d’Oran ou de Constantine, était dans la plupart des cas, choisi en fonction d’une certaine compétence dans le domaine culturel, ou à tous le moins doté d’une forte attirance pour la critique et pour l’art du spectacle. Ce qui supposait une certaine prédisposition, voire simplement une grande envie d’apprendre.  Il se trouve que chez le correspondant local, par définition, il était choisi pour couvrir toute l’actualité, rien que l’actualité et les faits divers. Parfois, lorsqu’il avait une certaine fibre culturelle, c’était plutôt mal vu par la rédaction centrale. Force est de constater, qu’à l’usage, rares seront les partenaires du festival qui pourront se prévaloir d’une grande passion pour la culture. Il fallait donc faire contre mauvaise fortune bon cœur. Sans doute que la décennie noire y était pour quelque chose, mais les écrits journalistiques se feront moins prégnants, moins élaborés. Certes il y avait encore quelque belles plumes, mais nous étions à mille lieues des papiers de la génération précédente. Puis, avec la mise en place du commissariat, les moyens aidant, la presse sera très vite choyée. Mais cette générosité ne profitera pas aux correspondants locaux. En effet, avec la mise en place d’un chargé de la communication, les responsables engagent un bras de fer feutré. Grâce à des complicités algéroises bien infiltrées dans les médias aussi bien publics que privés, la conférence de lancement du festival sera réservée aux journalistes algérois. Puis, très vite cette complicité se concrétisera sur le terrain. Les journalistes triés sur le volet, vont être ramenés à grands frais à Mostaganem. Avec à la clef, une prise en charge royale au niveau des complexes touristiques des Sablettes. Mettant dans une gêne terrifiante les correspondants locaux.
Malheureusement, les résultats seront bien en deçà des espérances.  Des partis pris flagrants vont apparaitre. Lors des débats, de nombreux journalistes, contrairement à leurs ainés des deux précédentes générations, s’érigeront en véritables jurys populaires,  encensant une troupe « amie » ou originaire d’une région particulière et tombant à bras raccourcis sur une troupe concurrente. Qui ne se souvient de ces lamentables joutes oratoires où les honorables journalistes transformaient le débat en une véritable arène où le pugilat se le partageait au lynchage? Nous sommes très loin de cette époque bénie où le journaliste se gardait bien de donner son avis devant le public et face à des jeunes comédiens pris en tenaille. A l’évidence, l’absence d’une autorité morale ouvrait les portes à toutes les dérives. Et très curieusement, les responsables ont laissé faire. Si bien que très vite, l’impact de la presse sur la manifestation avait pris une tournure dramatique.
Voilà qu’un jour, quelqu’un a eu la généreuse idée de créer une revue du festival. De nombreux journalistes, dont certains envoyés spéciaux s’engouffrèrent dans la brèche. Après tout, pourquoi la manifestation n’aurait-elle pas sa propre communication ? Sauf que dans cette affaire, il y avait tout de même une entorse à la déontologie. Car les honorables correspondants jouaient sur deux tableaux. Nous sommes bien loin de cette époque où le rédacteur en chef d’Algérie Actualité interdisait fermement à Ahmed Cheniki, son jeune envoyé spécial, toute prise en charge par le festival !




En guise de conclusion

Durant les 25 premières éditions, le couple presse-festival aura vécu dans une parfaite communion, ce qui n’empêchait pas les discordes, les coups tordus, les reniements, les bouderies, voire la séparation houleuse, juste le temps d’une soirée. Le lendemain, tout rentrait dans l’ordre. Ce qui transparait clairement de nos jours, c’est que sans cette présence de la presse, jamais le festival n’aurait atteint une telle notoriété, aussi bien nationale qu’internationale. Mais ce serait faire preuve d’égarement coupable que de ne pas souligner par ailleurs que cette harmonie et cette synergie n’ont été possible que garce l’existence d’une presse publique, et uniquement publique, au travers de laquelle il était possible de faire du journalisme de très belle facture. Même l’austère El Moudjahid, qui était en réalité le porte-parole officiel de l’Algérie, à aucun moment sa rédaction ne sacrifiera la page culturelle. En consultant les articles de l’époque, on est admiratif devant l’intensité de la couverture réalisée par l’envoyé spécial d’ElMoudjahid, mais également par la régularité de sa page culturelle, sans doute l’une des plus étoffée et la plus régulière de la presse nationale.
Ce sont toutes ces conditions qui auront indubitablement concourus à l’émergence de textes référentiels en matière de critique artistique.
Face à ce qui parait être un succès fulgurant, la couverture médiatique aidant, il fallait s’attendre à un retour de bâton. Ce qui se produira lorsque les journalistes autochtones et étrangers commenceront à inscrire Mostaganem et son théâtre dans leurs agendas. La liberté de ton que les journaux refreinaient, surtout dans la sphère du politique, ne sera plus de mise s’agissant de la sphère culturelle. Quand on relit certains écrits, on est stupéfaits de la liberté de ton de leurs auteurs. Il est aisé de comprendre que le système politique en place n’allait pas s’en laisser conter. Notons qu’en face, certains patrons de journaux ne feront rien pour mettre fin à cette liberté d’expression tout à fait inédite sous un régime autoritaire, comme pouvait l’être le régime algérien. La plupart de ces patrons de presse, de ces chefs de rubrique, de ces chroniqueurs, de ces journalistes, avaient une très haute idée de leur métier, mais surtout de leur devoir vis-à-vis de la nation et du pays. A l’évidence, sans une presse dévouée, attentive, attentionnée, critique et vigilante, le festival de Mostaganem n’aura jamais tenu la route, ni n’aurait atteint la notoriété qui est devenue la sienne. C’est en grands communicateurs que les responsables avaient fait le choix d’abord de faire coïncider la manifestation avec la quinzaine commerciale de la ville de Mostaganem, mais aussi d’avoir fait le judicieux choix de la période des vacances scolaires et également institutionnelles. Mostaganem avait atteint une notoriété incontestable. En contrepartie, son festival a permis à de jeunes journalistes de se frotter à de prestigieux hommes de théâtre. Ils ont aussi regardé des spectacles de belle facture. Les organisateurs avaient besoin d’une critique aussi objective que besogneuse et magnanime.
Car il n’est pas possible qu’à la veille de cette 50èmeédition, l’histoire ne se souvienne pas d’Omar Ourtilane et de Tahar Djaout, morts en martyrs, ni de ceux qui sont partis avec la conviction du devoir accomplis. Ils furent un petit groupe, puis très vite, ils seront des dizaines à se relayer pour donner le meilleur d’eux-mêmes[11].
Ce n’est pas rien que de dire de nos jours que cette liberté d’expression de l’époque constituait la matrice de l’action revendicatrice et contestataire. C’est dans les entrailles de cette presse publique engagée et téméraire, que naitra, à partir de 1990, la presse privée algérienne. Celle dont se revendiquent tous les démocrates, mais également tous les autocrates qui s’en serviront à profusion et sans retenue. Il est presque certains que c’est dans la synergie du festival de Mostaganem que les premiers balbutiements de la future presse privée entameront leur irréversible engagement.
Il serait peur être raisonnable qu’un jour les organisateurs du festival songent à rendre un hommage à ces hommes de plumes, mais également à leurs confrères photographes. Hélas, dans les travées du festival, il arrive que parfois les journalistes ne reçoivent pas la considération qui leur est due. En de nombreuses occasions, ils auront fait l’objet de comportements pour le moins inconvenants.
Avec la fougue des premières joutes, les journalistes, sans sacrifier à l’objectivité, porteront fort et loin le message des jeunes acteurs et réalisateurs. L’embellie entre le festival et la presse durera à peine vingt saisons.
Nombreux sont les journalistes qui finiront par abandonner la partie, la mort dans l’âme. Leur festival était transformé en une véritable kermesse qu’ils eurent de la peine à accepter. Même les plus fidèles finiront par se lasser de tant d’arrogance, d’effronterie,d’insolence,d’offense et d’incivisme.
Avec la pullulation des médias privés et la grande frilosité de la presse publique, il est de plus en plus évident que les journalistes engagés de la première génération, sont devenus une denrée précieuse. Il est aisé de constater que ce ne sont pas les correspondants provinciaux qui vont assurer une relève introuvable. De ce fait, il devient vital pour le festival de se trouver une nouvelle forme de communication. Les réseaux sociaux doivent constituer une alternative. Elle n’est pas la seule, mais son impact est irremplaçable. Il se trouve que le FNTA n’a toujours pas sa propre page web !
 Comme aucune université ne forme des journalistes critiques, il va bien falloir retrouver les voies du bon sens et compter sur ses propres ressources. Mais la question la plus prégnante serait de savoir si le théâtre amateur a encore besoin d’une critique ? En quoi lui serait-elle utile ? Si la réponse à ces deux questions est affirmative, il va falloir reprendre la bonne vieille recette. Celle d’une réelle prise en charge de la formation, qui serait consubstantielle à une véritable structuration du théâtre amateur.
Ceci devrait se faire concomitamment avec la préservation de la mémoire. Alors, n’est-il pas venu le temps, en cet été du cinquantenaire, de songer enfin à rassembler ces archives -photographies et textes journalistiques- qui pourraient constituer, à n’en point douter, un livre d’au moins vingt mille pages.


Mostaganem, le 15 juillet 2017


[1]Si on admet que chaque spectacle aura fait l’objet d’un papier, sans compter les papiers d’ambiances, les interviews, les conférences de presse, les comptes-rendus de colloques et d’ateliers de formation, les synthèses et les bilans, on peut légitimement convenir qu’à raison de 25 journalistes présents à chaque manifestation, le chiffre de 20.000 papiers est parfaitement plausible. Si maintenant chaque papier équivaut à 2500 signes – ce qui est très peu, eut égard à l’aspect très particulier de la rubrique culturelle –, on aboutit pratiquement à insérer 4 papiers (soit 10.000 signes), dans une page de format tabloïde, ce qui donnerait pas moins de 5.000 pages de textes. Soit l’équivalent de 210 numéros pour un journal de 24 pages, sans photos, sans publicité et sans gros titres !
[2]Organisée par le Syndicat d’Initiative et de Tourisme (SIT) dirigée alors par Abdelkader Benderdouche, frère ainé de Djelloul Benderdouche, maire de Mostaganem.
[3]Secrétaire général de l’USFP Marocaine (Union Socialiste des Forces Populaires), le parti d’opposition du grand militant tiers-mondiste, Mehdi Ben Barka.
 [4]L’Unité, un hebdomadaire d’une grande qualité, organe de communication et de propagande de l’UNJA est sans doute l’organe de presse quia le plus écrit sur le festival de théâtre de Mostaganem. La plupart des journalistes de cette époque, qui feront le bonheur des médias plus tard, auront fait un passage besogneux par cet hebdomadaire.
[5]Le studio Milor d’Abdelkader Mahmoudi y occupa une place centrale. Pour avoir travaillé à la fois dans le reportage et dans la partie laboratoire, je sais combien les festivaliers étaient heureux, une fois le spectacle donné, de passer le matin acheter les images prises durant la nuit. Avec Mokhtar Atrouche, nous passions la nuit à traiter les films et à faire les tirages et les planches contact. Coté photographes professionnels, il y avait Rachid Dehag, A Bensafa de La République et Lazhar Mokhnachi d’Algérie Actualité.
[6]La RTA (Radio-diffusion Télévision Algérienne) était représentée par des journalistes de la radio (Chaine I et Chaine III) et par la television qui aura enregistré plusieurs éditions tant au niveau du stade Benslimane, de la salle Afrique qu’au niveau de l’ITA.
[7]Tahar Djaout nait le 11janvier1954à Oulkhou, commune d'Aït Chafâa. Il était à la fois écrivain, poète, romancier et journalistealgérien d'expression française. En 1993, il fut la première cible de la décennie noire. Après un long coma, il rend l’âme le 2juin1993 dans un hôpital algérois. Il avait à peine 39 ans. Il a fait ses premières armes de critique au festival de Mostaganem qui servait alors de laboratoire à la plupart des journalistes algériens.
[8] Ce réfugié politique Marocain, membre  de l’UNFP de Ben Barka travaillait pour la presse arabophone, Ech-Chaab et plus tard El Djemhouria.
[9]Le CRAC de Constantine est la troupe qui donna au festival, dès la seconde édition, son caractère national. Venus dans un vieux bus, les sociétaires du CRAC, avec un certains Abdallah Hamloui, mettront pas moins de 17 heures pour faire le trajet jusqu’à Mostaganem.
[10]Prolet Kult
[11]Voici une liste non-exhaustive : Abdelkader Djemaï, Mohamed Balhi, Kémal Bendimered, Nadjib Stambouli, H’mida Layachi, Arezki Metref, Ahmed Cheniki, Paul Balta,  Kosseï Salah Derouiche, Hamid Bouchdjakji, Mustafa Chelfi, Med Ali Lahouari, Tayeb Bouamar, Allaoua Djeroua, Benachour Bouziane, Mohamed Zaoui, Abdelkrim Djilali, Brahim Hadj Slimane, A. Bousserouel, Benbaghdad, et l’incontournable Hamdène Belouassouassi, qui était le correspondant local de l’APS.
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